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Forum 2010 : sur un air d'opéra
 

L’innovation, une affaire de femmes ? Après Annie Girard et son école nomade, après Monique Argoualc’h et Intergenr@ations, le grand prix du forum a été attribué cette année à Florence Rebeschini Aulanier.

 

Son projet a été fort remarqué dans les allées du forum pour son ambition et son côté doux dingue. Enseignante en SES, Florence convoque l’art lyrique pour combattre les clichés. Ses élèves de terminale se font librettistes pour traiter de la discrimination. Le compositeur Benjamin Hamon met l’opéra en musique qui devient ensuite un court opéra filmé. Auparavant un travail sur l’art vocal aura été réalisé avec des chanteuses lyriques afin que les élèves puissent se faire interprètes de leur propre création. De son côté, Florence fournit chiffres et données. Elle veille au fil des portées à ce que les composantes du programme de terminale ne soient pas oubliées.

 

Cette idée originale est née d’un hasard. Florence Rebeschini Aulanier a découvert le travail de Benjamin Hamon lors d’une représentation au théâtre du Rond-Point des lauréats du prix Beaumarchais. L’œuvre présentée parlait des SDF sur un ton évitant à la fois le misérabilisme et le folklore. Florence prend contact avec le producteur pour rencontrer le compositeur. De cette rencontre naîtra une première collaboration sous la forme d’une visite dans la classe puis d’un spectacle que les élèves apprécieront beaucoup. Dans le bus du retour, ils reprennent les airs. Florence tenait son idée.

 

Depuis quatre ans, elle prend corps de multiples façons, entraînant dans son sillage une école primaire, un collège, une maison de retraite, franchissant les frontières des générations. Elle a séduit des partenaires précieux : DRAC, Conseil Régional de Picardie, mairies et même des mécènes privés. « Combattre ce qu’il y a de plus laid chez l’homme par ce qu’il y a de plus beau », le propos de Florence Aulanier sont percutants dans une Région où le Front National a atteint par endroit 25% des suffrages. L’idée de prendre à pleine voix les variantes de la discrimination essaime et grandit. Les opéras se donnent sur scène ou s’exposent en films, accompagnés de multiples initiatives qui invitent toutes les générations à réfléchir en musique. La représentation musicale se vit alors comme une lutte douce contre les représentations.

 

En donnant accès l’opéra à des adolescents et à leurs parents dont la culture ne les portaient pas spontanément vers ce type de musique, l’initiative ouvre les horizons en dépoussiérant les clichés d’un opéra nid de castafiores. En organisant des spectacles dans les maisons de retraite, elle donne l’occasion à des personnes de générations différentes de se débarrasser de leurs à priori respectifs. En exposant par la voie artistique les données brutes des différences sources d’inégalités, les courts opéras favorisent une prise de conscience là où les campagnes de sensibilisation s’émoussent dans leur portée.

« L’art lyrique pour combattre les clichés » a remporté dans les allées du Forum la palme du projet fou, un belle et douce folie qui ouvre les cœurs et s’affranchit des frontières de nos représentations.

 

Un exemple de court opéra :

http://www.dailymotion.com/video/xcyx5q_au-bon-accueil_school#from=embed

D’autres courts opéras sont en ligne. Pour les retrouver, tapez « Court Opéra » sur dailymotion.

Monique Royer

 

Forum 2009 : le train de l'innovation

Le forum est fini. Dans le train stationné dans la gare de Lille, j’énumère mentalement les histoires à écrire, les portraits de projets jetés à la va vite sur mon bloc notes, les impressions laissées dans une poche de ma besace, et surtout les innovations que je n’ai pu visiter, faute de temps. La Rochelle, c’est loin, six heures de voyage, de train et d’attentes, mais mon périple ferroviaire ne pourra à lui seul rattraper les instants perdus. Alors, je reprends le roman entamé à l’aller pour retrouver doucement le cours des choses, poser à nouveau le pied dans la vie ordinaire.

Côtoyer durant deux jours des personnes dont la qualité première est le goût d’avancer, d’apprendre et de partager, est un véritable bain de jouvence, une plongée dans la belle humanité. Lundi, à nouveau reviendront le quotidien, les craintes sur l’an prochain et l’arrivée du Bac Pro en trois ans, les effets des restrictions budgétaires. Bref, l’heure est au blues sur le quai de Lille la festive. Et puis, le wagon s’anime. Deux enseignants du forum s’installent de l’autre côté de l’allée. Monique Argoualc’h passe et je l’interpelle. Un prof qui vient de la Martinique, nous prend en photo, mon appareil a perdu toute son énergie. Le forum continue dans la voiture 19…

 

Le projet de Monique fait partie de ceux que je n’ai pas eu le temps de visiter, le hasard des réservations va réparer l’oubli. Monique est encore dans la surprise d’avoir obtenu le grand prix, il ya trois heures à peine. Depuis, les interviews s’enchainent, les manifestations et SMS de félicitation arrivent. Elle rit, malicieuse, d’avoir été gentiment accompagnée par Luc Cédelle jusqu’à la gare pour l’aider à porter son prix, dont une Xbox ; cadeaux qui garnissent un volumineux carton. « Jusqu’à midi, j’étais déjà ravie, là je suis encore surprise ». Elle a apprécié durant le forum de ne plus être une extraterrestre, d’oublier les doutes et de rencontrer des regards bienveillants. L’atelier a été un temps fort, plein de fous rires et de créativité. Du grand prix, elle est encore toute étonnée, tant son projet ne lui paraît pas extraordinaire.

Monique anime une classe relais à Brest. Elle accueille par demi journées des collégiens repérés comme en grande difficulté dans l’institution et présentant des problèmes de comportement. 10 à 15 élèves de 6e, 5e et 4e sont inscrits dans sa classe où ils viennent par groupe de 4 à 5. Dans le Finistère, le choix a été fait de ne pas les retirer du collège complètement mais de miser sur un changement progressif pour augmenter les chances d’insertion. Ces élèves ont souvent une image dégradée d’eux-mêmes, ils se considèrent comme des nuls. « Ils ne sont pas capables de construire, donc ils détruisent » analyse Monique. C’est pourquoi, le travail sur l’estime de soi est primordial.

A l’occasion d’une rencontre avec un directeur de maison de retraite, son envie de développer un projet intergénérationnel commence à prendre une forme concrète en partant du constat que les jeunes et les « vieux » n’ont pas d’endroit pour se rencontrer dans la vie. Le lieu sera la maison de retraite et l’objet des ateliers Internet, outil que maîtrisent les jeunes. Le projet bénéficie d’un contexte favorable, celui de la ville de Brest qui lance fréquemment des appels à projets pour contribuer à la réduction de la fracture numérique. Retenu, et donc bénéficiant d’un financement, il peut s’appuyer sur l’association Infiini en tant qu’intervenants extérieurs.

 

Intergénér@tions est dans sa sixième année. 70 élèves ont déjà participé à l’animation des ateliers d’une heure dont bénéficient une à deux fois par semaine des groupes de quinze personnes âgées dépendantes. Un club de retraités a aussi demandé à se joindre à eux, et désormais ce sont trois publics qui se côtoient : les jeunes, les personnes âgées et les retraités. Avant de devenir animateurs, les élèves suivent une formation en deux étapes proposée par l’association Infini. Dans un premier temps, ils revisitent Internet pour acquérir les bases nécessaires afin d’expliquer le fonctionnement et les usages. Ensuite, ils reçoivent une formation de formateurs pour maîtriser les bases de la pédagogie adaptées au public des personnes âgées, et à leurs possibles difficultés d’apprentissage ou de maniement de la souris liées à la surdité ou à des problèmes moteur par exemple. Pendant les séances, Monique et une animatrice de la résidence sont présentes pour suppléer les élèves en cas de problèmes. Mais ce sont les jeunes qui animent, expliquent, jouent le rôle du formateur.

 

Les premières trente minutes de la séance sont consacrées à des activités d’apprentissage : correspondre avec le courrier électronique, découvrir des sites, allumer et éteindre l’ordinateur, etc. Les élèves ont rédigé un certain nombre de fiches techniques pour outiller les séances. Ensuite, jeunes et personnes âgées écrivent ensemble, en prenant soin de traduire leurs propos dans les deux langues pratiquées : le français normalisé des personnes âgées et le français « Sms » des jeunes. Car, ce sont de véritables échanges culturels qui se développent ente les deux générations, dont les langages et les références sont à priori éloignés. Une dame ancienne sténo dactylo retrouve dans le langage Sms des similitudes avec sa pratique professionnelle passée. Un monsieur demande à un jeune de l’aider à trouver les termes justes pour répondre à son petit fils dans un courrier électronique. Le travail de traduction se prolonge en classe et donne lieu à d’autres apprentissages.

 

 

Les échanges interrgénérationnels sont riches de qualités relationnelles. Ils ne se limitent pas aux temps des ateliers et se poursuivent par des envois de mail. Les personnes âgées s’approprient Internet même si pour eux « sans les ados, c’est moins intéressant ». Ils considèrent les jeunes comme de véritables formateurs, allant même jusqu’à les vouvoyer, une marque de respect qui va droit au cœur d’élèves ayant perdu toute estime de soi. Tout le monde est ravi et le bouche à oreille fonctionne jusque dans les collèges fréquentés par les jeunes. Un reportage vidéo a été réalisé sur leur expérience. Le réalisateur, également auteur compositeur a même écrit une chanson.

 

Monique est très heureuse d’avoir reçu autant de regards bienveillants et encourageants sur son projet. Heureuse pour elle et surtout pour ses élèves. Elle ne sait pas encore comment elle va leur annoncer la bonne nouvelle du prix, et de la récompense, cette volumineuse X Box qui deviendra surement un nouveau support d’échanges entre les générations. Elle est aussi contente pour tous ceux qui contribuent à la réussite de l’expérience à commencer par la ville de Brest et sa politique éducative et culturelle impulsée par son maire Francçois Cuillandre et l'élu en charge de l'expression multimédia Michel Briand. « Sans l’aide de la ville, j’aurais fait du bricolage et nous n’aurions pas bénéficié de telles formations ».

L’intervention du maire de Roubaix, René Vandierendonck, pour l’ouverture du forum avait ému l’assistance par la clarté des propos et la conviction dans le rôle de l’éducation pour surmonter les difficultés économiques et sociales. L’expérience brestoise désigne à nouveau les collectivités locales comme un soutien possible et efficace de l’innovation pédagogique, un ballon d’oxygène qui, s’il est au diapason des partenaires de l’éducation, fait naître et vivre les projets.

Et des projets, Monique en a plein d’autres, autour de la vidéo, du wiki, avec des élèves, avec des gens du voyage. Tiens, des gens du voyage ! Comme un clin d’œil à Annie Girard, une réponse à son message de bienvenue, dans le train qui s’approche de Paris, le blog se termine sur une note nomade. D’un grand prix du forum des enseignants innovants à un autre, deux femmes innovantes et souriantes se passent le relais. Merci les filles et encore bravo !

Monique Royer

Annie, Grand Prix des Enseignants Innovants à Rennes

Par Françoise Solliec (avril 2008)

 

Comment s’est élaboré, dans une classe de CP/CE1 des Landes accueillant des enfants du voyage, le projet « Lectures nomades » pour lequel Annie et Patrice Girard ont obtenu le grand prix du jury du 1er Forum des enseignants innovants à Rennes le 29 mars ?

 

 

Du journal papier au JT, mais un JT seulement avec des « bonnes nouvelles »

 « Tout a commencé, il y a maintenant déjà longtemps » nous explique Annie Girard, directrice de l’école primaire d’Orthevielle dans les Landes « lorsque nous avons décidé de réaliser avec ma classe de CM1/CM2 un journal mensuel, distribué gratuitement dans les deux villages du regroupement pédagogique. Un comité de rédaction a été mis en place, mais le contenu du journal devait se constituer des contributions de toutes les classes. Au début, personne ne croyait à la longévité de l’aventure, mais lorsque 3 ans après le maire d’Orthevielle a constaté que la publication avait toujours été régulière et que les familles l’attendaient avec intérêt, il a décidé d’investir dans un équipement informatique important, sous forme d’une classe mobile (qui coûtait quand même 15 000 euros). Nous avons donc décidé de réaliser ce journal sous forme télévisuelle, mais après avoir regardé attentivement quelques JT, les élèves ont trouvé que les contenus en étaient souvent « trop tristes » et que ce serait bien de se consacrer uniquement aux bonnes nouvelles ».

Il faut dire qu’avec les nombreuses activités (travail avec La main à la pâte, études d’œuvres d’art, de musiques ….) menées dans l’école, les élèves ne manquent pas de sujets pour réaliser les productions, dont un bel échantillon est présenté sur le site de l’école. Un exemple de leur travail (visible sur Educnet) avait d’ailleurs été présenté à Educatice 2006 et récompensé par l’attribution d’un tableau interactif.

« Actuellement, notre JT mensuel fait une large place au thème du patrimoine qui est le thème de travail annuel. Nous sommes en contact avec différents correspondants et nous avons beaucoup travaillé sur la comparaison de la vie dans les villages aux 19ème et au 20 ème siècle ».

 

Cibler l’outil informatique sur les enfants en difficulté de lecture et d’écriture

« L’an dernier, j’ai pris une classe de CP/CE1 » continue Annie, « et j’ai vite repéré des enfants en difficulté par rapport à l’apprentissage de la lecture. Il m’est alors apparu souhaitable de cibler l’utilisation des outils informatiques sur ces élèves, notamment sur les élèves nomades qui sont présents à l’école d’octobre à avril. Cela correspondait aussi à un souhait de réduction de la fracture numérique et, comme ils ne disposent pas d’Internet dans les caravanes, j’ai présenté mon projet à Apple, qui a accepté de prêter une quinzaine de baladeurs numériques. Ils ont été mis à disposition des élèves, après signature d’un contrat avec les familles. Les mamans ont été très contentes de se voir confier ces outils modernes et valorisants et les élèves tout de suite enthousiastes ».

Les baladeurs permettent ainsi aux élèves de consulter chez eux des articles du JT ou des ressources mises à disposition sur le très attirant site de l’école, notamment celles de la partie « Qu’as-tu appris », qui donne des exemples du travail effectué chaque jour avec le tableau interactif.

« Pour le travail de lecture proprement dit », explique Annie Girard, « nous préparons la lecture le mardi en classe et ils doivent l’enregistrer chez eux sur leur baladeur, de préférence en compagnie de quelqu’un de la famille qui puisse intervenir en cas de besoin. J’apprends ainsi beaucoup de la façon dont travaillent les élèves en écoutant leurs enregistrements le jeudi et je constate leurs progrès : ils sont maintenant capables de lire des textes de 8 lignes ».

Ce travail sur balado-diffuseur change complètement le rapport avec la famille, qui peut aussi, au travers de différents podcasts audio ou clips video, voir comment les enfants les enfants travaillent en classe et les suivre plus efficacement.

« Pour l’écriture, c’était très difficile » remarque Annie, « ils ne faisaient au début de l’année aucun lien entre les mots parlés et leur représentation écrite. Nous utilisons les images de la méthode de lecture des enfants du voyage pour composer une phrase, puis aller la taper sur l’ordinateur, mais nous sommes encore très loin d’une écriture immédiate. Le travail sera à reprendre l’an prochain, lorsque je les retrouverai en CE1 ».

En effet, les enfants vont bientôt reprendre leur vie nomade. Mais ils partent avec un cahier de consignes et de travail, exclusivement centrés sur la lecture. Comme les mois précédents, un agenda (qu’on peut visualiser sur le blog de la classe) précisera les lectures à effectuer chaque semaine et servira de lien avec les enseignants des différentes écoles qui vont accueillir ces élèves, souvent à raison d’une par semaine.

 

Un prix pour la classe, l’école, le village…

« Après que nous ayons reçu le prix du 1er forum des enseignants innovants » déclare Annie Girard, nous avons reçu beaucoup de courriers et de soutien. Bien sûr, nous avons fêté cela avec toute la classe, car les élèves en étaient les premiers responsables. Mais plus largement, les habitants des deux villages du regroupement pédagogique m’ont manifesté leur plaisir. La production de l’école reste leur affaire. D’ailleurs, il y a maintenant près de 6 ans que nous avons distribué les premiers journaux et leurs rédacteurs sont en 2nde, mais ils continuent à nous voir souvent et à nous apporter leurs contributions ».

 

Le site de l'école

http://ecole.orthevielle.free.fr/

Le blog de l'école

http://web.mac.com/anniegirard/CP-CE1/Bienvenue.html