Par C. Froidure
L’atlas des énergies. Quels choix pour quel développement ?. Bertrand Barré.
La collection des atlas chez Autrement s’enrichit d’un numéro consacré aux énergies quelques mois après la tenu du festival international de géographie de Saint-Dié au cours duquel les festivaliers eurent à débattre des questions énergétiques au moment où celles-ci se posent avec acuité pour des raisons économiques (voir récemment le franchissement du plafond des 100$ pour le pétrole), sociétales car comme l’indique Christian Pierret dans sa préface, se pose la question du mode de vie, et environnementales sous l’angle des changements climatiques.
Dans le format désormais connu et ramassé de la série des atlas de cet éditeur, Bertrand Barré, professeur émérite à l’institut national des sciences et techniques nucléaires livre un ouvrage à la structure hyperclassique, ne trahissant pas son titre. Pour cet atlas des énergies, il consacre un premier chapitre à expliquer ce qu’il faut entendre par énergie . Les trois chapitres suivant passent en revue les trois grandes familles d’énergie : fossiles, nucléaire, renouvelables. S’ensuit un état de la situation énergétique dans le monde puis un aperçu des perspectives en ce domaine.
Suggérées dans l’introduction et affirmées dans la conclusion, quelques idées fortes traversent cet atlas : l’énergie est indispensable même à minima mais nos modes d’utilisation actuels ne sont pas pérennes ; de ce fait, il faudra réduire nos consommations et réorganiser notre bouquet énergétique.
Afin d’en comprendre tous les enjeux, le premier chapitre définit l’énergie ; il s’agirait de la propriété dont dispose un système « capable de modifier d’autres systèmes ». Ensuite sont distingués, les formes d’énergie (mécanique, calorifique, cinétique..), sources (fossiles, renouvelables, nucléaire) et les vecteurs (liquides, en réseau) mais, quelque soit les formes, sources et vecteurs utilisés, la déperdition est conséquente entre l’énergie primaire et l’énergie finale.
Nécessaire à toute forme de développement, l’énergie, utilisée à cette fin depuis le début de l’ère industrielles pèse de tout son poids, selon nombre d’experts, sur les évolutions climatiques ce qui pose la question d’un usage plus économe des énergies fossiles, d’autant plus que les réserves, difficilement évaluées et évaluables, ne sont pas extensibles.
Les trois prochains chapitres étudient l’une après l’autre les trois grandes énergies fossiles. Pour chacune d’entre elles, des cartes permettent à la fois de situer les principaux producteurs, exportateurs et importateurs de charbon, pétrole et gaz, tous trois définit dans des encarts. Le charbon abonde mais reste une énergie sale ; le pétrole est en fin de vie, on annonce régulièrement le peak oil et comme pour le gaz, ses zones de production sont concentrées entraînant des flux considérables soumis à des risques d’accidents ou d’attaques dans les lieux stratégiques que sont les détroits. Le gaz, aussi, fait l’objet d’un commerce rendu plus compliqué par la nature même du gaz naturel mais néanmoins en forte croissance.
Ensuite l’auteur aborde son sujet de prédilection ; dans cette partie regorgeant de définitions, Bertrand Barré fait œuvre pédagogique : tout y passe fission, fusion, atomes, ITER, cycles ouvert et fermé. La question des déchets est vue sous l’angle de leur traitement ou de leur confinement mais pas vraiment sous l’angle du risque.
Troisième source d’énergie, les énergies renouvelables. La biomasse reste pour une grande partie de l’humanité la seule source d’énergie quotidienne avec des impacts sur la santé et l’effet de serre mais de nouveaux usages sont apparus : électricité, biocarburants. L’hydraulique représente la principale source d’électricité renouvelable (99% de l’électricité en Norvège) et avantages (peu de GES, souplesse…) et inconvénients (inondations, déplacement de populations..) sont nombreux. L’éolien remporte un franc succès mais son usage reste asservi aux contraintes suivantes : régularité du vent, vitesse, axe de rotation de l’éolienne… Le solaire incarne un autre alternative sous ses formes thermiques et photovoltaïques. Un point rapide énumère d’autres possibilités restées au stade expérimental : les hydroliennes, l’énergie des marées…
L’avant-dernier chapitre réalise un état de l’énergie dans le monde en commençant par réaliser un historique de sa consommation marquée par une accélération depuis le début de l’ère industrielle, aboutissant à une mondialisation de la consommation masquant des disparités fortes. Les cartes mettent en évidence les gros consommateurs que sont les PID, l’émergence du duo Chine/Inde, régions importatrices nettes. Plusieurs doubles-pages présentent des trios : un trio de pays consommateurs (Etats-Unis, Canada, Japon) aux besoins et ressources inégales, un trio de pays de l’UE, un trio de pays exportateurs (Russie, Arabie Saoudite, Nigéria), ensemble composite tant démographiquement que dans l’usage fait de la manne pétrolière.
Face à cette croissance et aux changements climatiques, se pose un ensemble de questions : le mode de vie des pays développés est-il soutenable ? Quid de l’augmentation de la population mondiale et de ses besoins ?
Les différents scénarios élaborés par l’IIASA, Le GIEC posent les questions de la consommation énergétique et de ses impacts. L’IIASA envisageait trois hypothèses allant du maintien des tendances actuelles au triplement de la consommation or les perspectives avancées par le GIEC enjoignent tous à modérer ces dépenses énergétiques afin de juguler le réchauffement climatique ; ainsi, pour y parvenir, les pays industrialisés devraient diviser par quatre, le facteur 4, ses propres émissions. Mais au-delà de l’action des états et organisations, c’est aussi comme l’indique le dernier chapitre « l’affaire de tous », de nos consommations, de nos modes de vie pour lesquels des gisements d’économies résident déjà dans l’usage de matériels moins voraces en termes de consommation (voir les documents sur l’analyse du cycle de vie, les économies possible avec les meilleures technologies disponibles)
Un atlas de plus pourrions-nous dire dans l’escarcelle des éditions Autrement et des enseignants. Bien entendu, ce volet reste d’un intérêt évident pour tout enseignant de part la masse de documents, et en premier lieu les cartes, fournis. Le travail de définition constitue le 2ème atout évident de ce numéro.
A noter p77, une intention bienvenue intitulée « des cartes démonstratives » : deux couples de cartes utilisant les mêmes statistiques mais distillant un message différent ou le nécessaire regard critique fasse à la carte, image fabriquée et donc comportant sa part de subjectivité.