Dossier

Par C. Froidure

L’entreprise à l’heure du développement durable ?

La médiatisation du développement durable, la connaissance (mais pas forcément la compréhension) de l’expression par un frange croissante de l’opinion, sa prise en compte par les états, son intérêt commercial ne pouvaient qu’entraîner une réaction du monde de l’entreprise.

Reste à tenter de mesurer celle-ci, d’en appréhender les tenants et les aboutissants mais cette évaluation n’a rien de simple. Comme il est dit dans la documentation photographique, « Le développement durable, quels enjeux géographiques ? », l’entreprise a un rôle primordial à remplir dans la mesure où selon les auteurs, elle est capable de transposer les discours institutionnels en actes or intégrer le développement durable est « une démarche récente, souvent validée par des organismes indépendants » selon Assen Slim, mais accompagnée de plus en plus souvent par une structure dans l’entreprise dédiée au développement durable, mais on observe une « différence de contenu d’une entreprise à l’autre ».

« Rien ne sert d’avoir des idées si elles ne se vendent pas. Le développement durable ne relève pas de la responsabilité propre de l’entreprise. Il s’agit de prévoir pour être prêt le jour où l’évolution des marchés et des normes étatiques le demandent », ainsi parlait M. Dubreil, directeur des projets haut de gamme chez Renault dans une interview donnée à l’Humanité ; en effet, l’entreprise a pour raison d’être les bénéfices et les questions qu’elle se pose vis-à-vis de toute nouvelle idée restent :

« Combien cela peut-il rapporter à l’entreprise ? »

« Combien cela peut-il coûter à l’entreprise ? »

et les réponses à ces questions sont aiguillées, pour Assen Slim, par les pressions qu’exercent le marché, les investisseurs, les normes, ce que confirment Yvette Veyret et Gérard Granier en illustrant l’engagement d’entreprises par leur adhésion à Global Compact, série de principes de développement durable ; l’adhésion y est libre mais « il y va de l’intérêt bien compris de ces entreprises qui inscrivent leurs initiatives dans un cadre plus large », celui de l’attente des populations.

Faisant le point sur le secteur du tourisme, Jean-Pierre Lozato-Giotart, dans « Le chemin vers l’écotourisme » précise dans ce secteur économique, que les trois grands acteurs que sont Americain Express, Carlson Wagonlit Travel et IQ3 Travel, sont « décidés à assurer les conditions de la réussite du tourisme durable mais leurs résultats financiers médiocres, voire négatifs et surtout l’impossibilité à maîtriser les sautes d’humeur de la nature, les aléas géopolitiques, économiques renforcent la prise de risques financiers dans ce secteur sensible au moindre type de problèmes ». L’auteur convient qu’en France, le développement durable « semblent se limiter pour l’instant à la construction de nouveaux hébergements » et il confiait au Café lors d’une interview que, la plupart du temps, lorsque l’on demandait à un hôtelier ce qu’il pensait du tourisme durable, la réponse quasi-unanime était que son hôtel soit rempli durablement.

On le voit bien l’une des questions majeures est bien celle de l’engagement réel des entreprises dans une politique de développement durable. Un article paru dans les Echos, le 31 mais 2006, Julie Chauveau relevait la multiplication des colloques, des instruments de communication sur le sujet à tel point que les ONG dénoncent régulièrement le verdissement de l’image de certaines entreprises.

Le dossier qui suit n’entend pas être exhaustif tant le sujet est vaste.

Le parti pris choisi a été de sélectionner un certain nombre d’entreprises et d’essayer de voir à partir de leurs sites Internet quelle était leur implication dans le développement durable ? leur définition du développement durable ? Leurs objectifs en termes de politique et de stratégie de développement durable ? Leurs actions ? Existe-t-il une structure dédiée au développement durable ?

On le voit le questionnement est loin d’être clos ; de plus les entreprises choisies ne sont peut-être pas les plus représentatives, d’autres auraient certainement été plus à même d’illustrer le thème de l’entreprise et du développement durable. Ici, le choix fait est celui d’une quinzaine d’entreprises française du CAC 40 :Danone, Renault, Arcelor, Total, Société Générale, Suez, Vivendi, Carrefour, L’Oréal, France Telecom, EDF, Bouygues, Michelin, EADS, Lafarge, Veolia Environnement, Sanofi-Aventis.

Le dossier qui suit se présente sous la forme de questions, les réponses essaient de coller au plus près des sites Internet consultés.

« Le développement durable », Assen Slim, collection Idées reçues, Le Cavalier Bleu.

http://cafepedagogique.studio-thil.com/lemensuel/lenseignant/[…]

« Le chemin vers l’écotourisme. Impacts et enjeux environnementaux du tourisme d’ajourd’hui, Jean-Pierre Lozato-Giotart, Editions Delachaux et Niestlé.

http://cafepedagogique.studio-thil.com/lemensuel/lenseignant[…]

Le développement durable. Quels enjeux géographiques ?. Yvette Veyret, Gérard Granier, la documentation photographique, la documentation française.

http://www.clionautes.org/spip.php?article1246[…]

Quel aspect prennent le site ou les pages dédiées au développement durable ?

Alors que l’on pouvait penser à priori que le vert ou les références à la nature seraient à l’honneur dans une majorité de sites, ça n’est pas le cas : Danone (des fleurs), Suez (des oiseaux), Renault (développement durable en vert et de l’herbe), Lafarge (des titres en vert) succombent à cette stratégie ; pour le reste, on conserve les couleurs de l’entreprise sans « verdissement » du site.

Depuis quand l’entreprise s’investit-elle dans une démarche de développement durable ?

A cette question, il est délicat de répondre pour nombre des ces firmes. En effet, seules Danone (1972), Renault (1995), Arcelor (2002) avancent une date précise et facilement trouvable. Pour les autres, on utilise des expressions vagues (« de longue date » pour EDF par exemple) ou aucune référence temporelle n’est faite ou facilement identifiable. On peut supposer qu’un investissement sur le long terme est un atout en termes de communication donc il est possible que pour beaucoup de ces sociétés, l’engagement soit récent.

Quel dénomination est donnée à la rubrique du site dédiée au développement durable ?

Le plus souvent (dix fois), l’expression développement durable est reprise telle quelle (Danone, Arcelor, Vivendi, Bouygues…). Pour les autres, le titre varie ; on parle de responsabilité sociétale et environnementale chez Total, de commerce responsable chez Carrefour, de mobilité durable chez Michelin, d’éthique et de responsabilité sociale chez EADS…

Combien de rubriques compte le site de ces entreprises ?

Le chiffre varie de quatre (Danone) à plus de dix (Total). Toutefois le nombre de rubriques n’est pas forcément parlant, le contenu a évidemment son importance tant au niveau de la qualité de l’information (le site apporte-t-il des exemples précis d’actions menées, des résultats chiffrés).

Existe-t-il une structure dédiée au développement durable dans l’entreprise ?

Dans au moins 11 cas, la réponse est positive mais elle prend des noms différents : direction du développement durable (Danone, Arcelor, Vivendi), comité développement durable (Suez, Renault), comité d’éthique (Véolia environnement), un panel d’experts pour le développement durable chez EDF. Pour les autres entreprises, le Café n’a pas clairement distingué d’organisations mises en place pour mener une politique de développement durable.

Quelle définition donne-t-on du développement durable ?

Là les définitions divergent. Certaines reprennent la définition reposant sur les trois piliers : économie, environnement, société. C’est le cas de Renault, d’Arcelor, Carrefour. D’autres en envisagent moins ou plus : la Société Générale met l’accent sur les aspects sociétaux et environnementaux, Sanofi-Aventis identifie des enjeux sociaux, sociétaux, économiques et HSE (Hygiène, sécurité, environnement). Des sociétés comme Bouygues, Total ou EADS ne donnent pas vraiment de définition et reste très vague dans leur approche.

Certaines firmes définissent le concept en fonction de leur activité ; ainsi Michelin parle de mobilité durable, Vivendi souhaite permettre « aux générations actuelles et futures de satisfaire leurs besoins en divertissement et de développer leurs talents. »

L’aspect économique semble prédominant chez Danone, plus encore chez l’Oréal (parle de croissance durable), naturellement mis en avant par Michelin et Vivendi (voir question précédente) ; pour les autres sociétés, l’aspect économique est un versant parmi d’autres du concept.

Quels sont les objectifs de la politique entrepreneuriale de développement durable ?

Là quasiment chaque entreprise a les siens même si quelques points communs sont identifiables :

Ceux liés au climat : réduction des émissions de GES, de CO2, , lutter contre le réchauffement climatique, lutter contre les changements climatiques.

Ceux liés à l’insertion de l’entreprise dans la société : souci de l’impact social de l’entreprise, promouvoir un engagement social, agir en entreprise citoyenne, contribuer au développement social, protection de la jeunesse.

Ceux liés à l’environnement en général : respect de l’environnement, préservation des ressources, , prévention des risques.

Par contre, il existe des objectifs particuliers à des entreprises : accès aux médicaments dans les pays en développement (Sanofi-Aventis), définir des standards minimaux mondiaux en matière d’environnement (Veolia Environnement), la construction durable (Lafarge), promouvoir les énergies nouvelles (Total), économiser le carburant (Michelin)…

Quelles actions particulières sont menées par ces entreprises ?

Là il est compliqué de lister les actions menées par les entreprises choisies ; nombreuses sont celles dont chaque site rend compte. On peut quand même observer pour au moins trois d’entre elles que les actions sont soit peu nombreuses, soit d’un impact semblant peu évident :

*la Société Générale qui fait des essais de voitures électriques et l’acquisition d’électricité verte pour son siège de La Défense.

*France Telecom : plan de recyclage des mobiles, baisse de la consommation de 4% de la consommation de carburant.

*Bouygues dont la plupart des actions classées dans la rubrique développement durable relève du … mécénat.

*EADS : un code éthique, un plan visant au recyclage à 85-95% des avions en fin de vie.

Pour d’autres, l’investissement semble plus conséquent, le site propose des résultats chiffrés, de objectifs pour le futur :

*Danone : Grameen Danone (construction d’un usine de yaourts au Bangladesh pour réduire pauvreté, créer de l’emploi, préserver l’environnement), un programme d’usines sobres en ressources en eau avec pour objectif la baisse de 30% de la consommation d’eau en 2010, qualification de 13 exploitations laitières fournissant Danone comme exploitations raisonnées…

*Renault : adhésion à Global Compact, Mobility 2030, GCCI ; lancement d’une gamme de véhicules eco2 ; réduire en 2007 les émission de CO2 de 45% par rapport à 1998 sur le périmètre de l’UE…

*Lafarge : réduction de la consommation d’eau (baisse de 29% pour le ciment depuis 2000), 50% des matières premières utilisées pour le plâtre sont recyclées, développement d’un indice de biodiversité avec la WWF, mise au points de nouveaux matériaux de construction.

On note quelques points communs : la multiplication des indices, notations, normes (norme 14001) dont se revendiquent ces firmes, la volonté de réduction des émissions de polluants dans le domaine des transports (ce qui signifie moins de dépenses de carburant donc une dépense en moins pour les entreprises)…

Ces entreprises produisent-elles un rapport sur leur politique de développement durable ?

Plus de la majorité publie un rapport développement durable (L’Oréal, Bouygues, Arcelor, Carrefour…). Pour les autres, pas de publications disponibles à première vue.

Les rapports.

Veolia.

http://www.developpement-durable.veolia.com/fr[…]

Lafarge.

http://www.lafarge.fr/05032007-publication_sustaina[…]

Alstom.

http://www.alstom.com/home/about_us/corporate_re[…]

Sanofi-Aventis.

http://developpementdurable.sanofi-aventis.com[…]

L’Oréal.

http://www.loreal.fr/_fr/_fr/group_new/pdf/LOREAL_RDD_20[…]

Carrefour.

http://www.carrefour.com/docroot/groupe/C4com/Commerce respo[…]

Vivendi.

http://www.vivendi.com/corp/fr/publications/documents/2007_[…]

…

La norme 14001.

Il s’agit d’une norme environnementale mise au point par l’organisation internationale de normalisation.

http://fr.wikipedia.org/wiki/ISO_14001

http://www.iso.org/iso/fr/

Global Compact.

Il s’agit d’un pacte mondial destiné aux entreprises appelées à suivre, appliquer une série de valeurs au nombre de dix réparties en quatre domaines : les droits de l’homme (pas être complice de violation des droits de l’homme), la droit au travail (élimination du travail forcé), l’environnement (appliquer le principe de précaution, mette au point et diffuser des techniques respectueuses de l’environnement), la lutte contre la corruption.

Le Pacte mondial.

http://www.unglobalcompact.org/Languages/french[…]

La nouvelle version du site (janvier 2008)

http://www.un.org/french/globalcompact/

Les principes du Pacte et les indicateurs GRI.

Parmi les indicateurs environnementaux, les « entreprises sont invitées à appliquer l’approche de précaution face aux problèmes touchant l’environnement » (consommation totale de matières premières, pourcentage de matériaux utilisés qui sont des déchets…), « à entreprendre des initiatives tendant à promouvoir une plus grande responsabilité en matière d’environnement » (description des impacts sur la biodiversité, émissions de GES…)

http://www.unglobalcompact.org/docs/how_to_participate_d[…]

Déclaration des chefs d’entreprises signataires du Pacte.

http://www.unglobalcompact.org/Languages/fr[…]

GCCI (global corporate citizenship initiative):

Il s’agit d’une sorte de forum rassemblant des entreprises autour du thème de l’entreprise citoyenne.

http://www.weforum.org/en/initiatives/corporatecitiz[…]

Le développement durable sur le site du MEDEF.

La rubrique développement durable insiste sur le volet économique par le titre « le développement durable, un accélérateur de croissance pour les entreprises », par l’ordre dans lesquels les trois piliers sont énoncés (performance économique, performance sociale et sociétale, performance environnementale).

Le site propose un guide du développement durable pour les PME, une proposition de méthode sur comment faire du développement durable ?, quelques témoignages d’entreprises et de secteurs économiques investis dans cette thématique.

http://www.medef.fr/main/core.php?pag_id=13176

Utopies :

Il s’agit d’un cabinet de conseil spécialisé dans le développement durable. On trouve sur ce site des conseils afin de réussir un rapport de développement durable (le choix du nom, les enjeux du secteur et de l’entreprise en matière de développement durable…) et cite en exemples quelques bons rapports comme ceux de Danone pour la France et Nike, BP pour l’étranger par exemple.

http://www.utopies.com/devdurable/introduction.htm

http://www.danone.fr/wps/portal/jump/DanoneCo[…]

Les principe de développement durable pour Utopies.

http://www.utopies.com/devdurable/introduction/[…]

Géoconfluences :

Dans le corpus documentaire du dossier développement durable, un ensemble est consacré aux rapports entre entreprises et développement durable à partir de l’exemple du Rhône et de l’agglomération lyonnaise.

http://geoconfluences.ens-lsh.fr/doc/transv/Dev[…]

Le sites développement durable des entreprises.

Danone.

http://www.danone.com/fr/developpement-durable.html

Renault.

http://www.renault.com/renault_com/fr/main/30_DEV[…]

Arcelor.

http://www.arcelor.com/index.php?lang=fr&page=387

Total.

http://www.total.com/fr/responsabilite-societale-environne[…]

Société Générale.

http://www.socgen.com/rse/#message-du-president