Gérald Tirot est une référence incontournable pour tous les enseignants et enseignantes qui utilisent le numérique. Le formateur passionné par les usages pédagogiques des TIC et par les évolutions de son métier réalise une veille active, à la fois pédagogique et technologique, qu’il partage ensuite quotidiennement sur ses différents réseaux sociaux.
Comment vous est venue l’idée d’une veille pédagonumérique ?
J’ai adopté ce terme au détriment de celui de « technopédagogique » par le biais d’un article de L’École branchée, rédigé par Benoit Petit. Et pour moi, cela à tout de suite fait sens : cette appellation vise à mettre davantage en valeur la dimension pédagogique plutôt que les outils. Ce terme vient d’ailleurs de Tracy Rosen qui dit en substance que le but de l’intégration des TIC n’est pas l’intégration des TIC. Voilà pourquoi je parle plus volontiers de veille « pédago-numérique » que de veille « techno-pédagogique ». Et en tant que formateur passionné par les usages pédagogiques des TIC, je trouve que c’est un excellent garde-fou.
Pourquoi le terme de pédagonumérique ?
Pour ce qui est de l’idée d’une veille pédagonumérique, je pense que la genèse de tout cela remonte à ma formation de formateur. Pour l’anecdote, nous devions, moi et mes quinze autres collègues de formation, renseigner un Framacalc collaboratif pour nos différentes périodes d’application en entreprise. Malheureusement, personne ne savait ce qu’était un Framaclac, ni comment cela fonctionnait. La formatrice référente m’a alors demandé de préparer et de présenter au reste du groupe son fonctionnement. J’ai donc effectué des recherches en ligne, consulté plusieurs tutoriels et testé plusieurs fois l’outil, afin d’en maitriser les fonctionnalités et d’accompagner ensuite le reste du groupe à se l’approprier également. Très vite, c’est devenu un réflexe naturel, j’avais un besoin impétueux d’en savoir plus les contenus que nous recevions en formation et lorsque je trouvais en parallèle des ressources en ligne intéressantes, je les partageais volontiers avec le reste du groupe. Depuis la fin de ma formation, cette volonté d’approfondir et de partager avec les autres ne m’a plus jamais quitté. J’ai tout de suite compris que faire de la veille serait pour moi le moteur de mon développement professionnel.
J’ai eu envie de partager les fruits de cette veille avec mes pairs et quoi de mieux que les réseaux sociaux. En plus de mon compte LinkedIn et Twitter, j’ai réutilisé le site WordPress de mon B2i pour le transformer en un site de veille et de partage : « La Veille de Gérald ». J’ai également crée une page Facebook du même nom. Je partage ainsi régulièrement ma veille sur les réseaux, afin de faire « vivre » l’information car je suis convaincu de la nécessité des échanges entre pairs comme potentiel de réflexion sur nos habitudes pédagogiques. Je partage aussi, depuis octobre de l’année dernière, une infolettre via mon site WordPress, qui est mon point veille hebdomadaire.
Pour en finir avec ce sujet, je rajouterais simplement que la veille est également un formidable accélérateur de rencontres. J’ai pu enrichir mon réseau en nouant contact avec une constellation de personnes formidables et participer à des projets auxquels je ne m’attendais pas – Thot Cursus par exemple.
Comment vous est venue l’idée de votre infolettre – newsletter : « La Veille de Gérald » ?
Lorsque j’étais documentaliste, j’ai été pleinement impliqué dans le processus de certification Qualiopi de l’Institut. J’ai notamment mis en place une newsletter interne $, qui faisait état d’une veille hebdomadaire à la fois réglementaire, sectorielle, pédagogique et technologique. Cette idée de création d’une lettre d’information est restée et j’ai décidé bien plus tard de planifier et de partager la mienne par le biais de mon site WordPress. D’ailleurs, pour être totalement honnête, l’idée est venue de Denys Lamontagne, mon rédacteur en chef chez Thot Cursus, qui m’avait demandé de créer un bulletin d’information pour le site : « Les Notes de Gérald ».
D’après vous, quels sont les apports et les dangers du numérique en matière de pédagogie ?
Comme je l’ai dit, la première erreur serait de se concentrer uniquement sur la dimension technologique. Pour répondre à votre question, je vais reprendre les propos de Tracy Rosen qui sont pour moi une boussole – pédagogique : L’intégration des TIC ne devrait pas être le point de départ, tout ce que l’on fait en classe devrait tendre vers une seule chose le développement de compétences chez nos élèves. La technologie est un ensemble d’outils géniaux que les élèves peuvent utiliser pour faciliter – soutenir – le développement de leurs compétences, mais son utilisation ne doit pas être le but de la leçon. Il faut d’abord identifier l’intention (le but) et évaluer ce qui pourrait être le meilleur outil pour effectuer le travail. Le fait de mettre des tablettes dans les mains des élèves n’est pas suffisant pour que l’apprentissage se produise, il faut donc une planification comme on le ferait avec n’importe quel outil d’apprentissage et définir quelle compétence on souhaite que nos élèves développent dans notre activité ou situation d’apprentissage.
En ce qui concerne l’intégration du numérique dans les apprentissages, je ne me prétends pas un spécialiste et je préfère me référer aussi souvent que possible à ces deux autres ressources, qui sont pour moi des incontournables en la matière : « Apprendre avec le numérique » de Franck Amadieu et André Tricot dans la collection « Mythes et réalités » des éditions Retz et l’article « Usages pédagogiques des tic : de la consommation à la cocréation participative » de Margarida Romero pour le site Vitrine technologie-éducation – maintenant Éductive. Bien évidemment, l’utilisation du numérique doit également s’inscrire dans un contexte et un environnement d’apprentissage.
Propos recueillis par Hans Limon