Refusées à l’unanimité en comité technique ministériel, les « lignes directrices de gestion ministérielles relatives à la mobilité des personnels » de l’éducation nationale sont immédiatement publiées au B.O. Prises en application de la loi de transformation de la fonction publique, ces mesures remettent en question le rôle des syndicats dans la gestion des mutations et livrent les enseignants aux arbitrages de la seule administration. Cette réforme est aussi mortelle pour les syndicats dont l’action est immédiatement menacée.
» La loi n° 2019-828 du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique a introduit dans la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l’État des dispositions prévoyant l’élaboration de lignes directrices de gestion par les administrations en matière de mobilité », précise le texte publié au B.O.
Adoptée cet été, la loi de transformation de la fonction publique a profondément transformé le statut des fonctionnaires et, en première ligne, des enseignants. Parmi les mesures adoptées, la fin du contrôle par les commissions paritaires de l’avancement et de la mobilité des agents, la généralisation de la contractualisation pour quasiment tous les emplois, l’évaluation du mérite par le supérieur hiérarchique direct avec effet salarial, la possibilité de rompre le contrat de fonctionnaire simplement, le détachement d’office dans une entreprise privée, etc. Avec cette loi, le gouvernement « modernise » la Fonction publique en faisant sauter les verrous du contrôle syndical. L’avenir du fonctionnaire semble être le management privé.
Le texte présenté le 5 novembre en commission technique ministérielle, rejeté unanimement et maintenant publié, porte sur les mobilités. Il concerne tous les personnels de l’éducation nationale, dont les enseignants.
Le texte prévoit la multiplication des postes à profil. » Le ministère souhaite développer le recours aux procédures de sélection et d’affectation sur les postes spécifiques aux niveaux national, intra académique et intra départemental. Les affectations prononcées sur ces postes spécifiques dans le cadre du mouvement spécifique national pour les enseignants du second degré relèvent de la compétence ministérielle ».
La mobilité sous controle de l’administration directe seule
Durant les démarches de mobilité seule l’administration peut informer les personnels. « Des conseils et une aide personnalisés sont ainsi apportés aux agents dès la conception de leur projet de mutation et jusqu’à la communication du résultat d’affectation ». Car la procédure sera totalement retirée aux commissions paritaires. Les syndicats ne pourront plus vérifier la procédure utilisée par l’administration et sa régularité au regard des textes. Ils ne pourront pas plus intervenir pendant la phase de mobilité.
L’enseignant seul face aux erreurs et aux pressions
C’est seulement après que la décision de mutation ait été prise que l’enseignant (ou le membre du personnel) pourra attaquer l’administration devant le tribunal administratif. » Les personnels peuvent former un recours administratif contre les décisions individuelles défavorables prises au titre de l’article 60 de la loi du 11 janvier 1984 lorsqu’ils n’obtiennent pas de mutation ou lorsque devant recevoir une affectation, ils sont mutés dans une académie ou un département ou une zone ou sur un poste qu’ils n’avaient pas demandé(e). Dans ce cadre, ils peuvent choisir un représentant désigné par une organisation syndicale représentative de leur choix pour les assister. « . La loi fixe des contraintes aux organisations qui pourront intervenir.
Une rupture définitive des statuts
Les syndicats Cgt, FO, Fsu, Snalc, et Unsa ont présenté le 5 novembre un voeu affirmant « leur opposition « aux principes hérité de la loi du 6 août 2019″… et rappelant « leur attachement à l’égalité de traitement des agentes et agent pour tous les éléments de leur carrière et à la transparence sur les modalités de leur gestion, égalité et transparence qui ne peuvent être garanties que par le maintien et le renforcement des compétences des commissions administratives paritaires ». Le rejet de ce texte le 5 novembre a entrainé la convocation d’un nouveau CTM le 13 novembre. On sait maintenant quelle issue le ministre a donné au refus unanime des syndicats sur ce texte.
En effet la réforme vise à effacer l’influence des syndicats et à les affaiblir définitivement. Elle met aussi les enseignants et personnels sous la gestion directe et sans controle de leur chef immédiat. C’est un tournant dans le statut des fonctionnaires de l’Education nationale qui est en train de se produire. Ce mois de novembre le gouvernement entame la fin de la gestion paritaire des carrières. C’est un verrou que le ministre veut faire sauter définitivement. Il est en train d’y parvenir.
François Jarraud
Les lignes directrices de gestion ministérielles
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