Les mesures de la réforme :
Concours accessibles dès la fin de la licence : dès 2026, les concours de recrutement auront lieu lors de l’année L3, au cours de l’année de la licence. Ce changement vise à élargir l’accès à la profession et à permettre une préparation plus précoce des candidats.
Création d’une licence pluridisciplinaire « professorat des écoles » : à partir de septembre 2026, une licence spécifiquement dédiée à la formation des enseignants du premier degré sera mise en place. Cette formation pluridisciplinaire vise l’acquisition des compétences professionnelles liées aux exigences du concours, avec une dispense d’épreuve pour les diplômés.
Formation en master, rémunérée et alternée : après la réussite au concours, les candidats suivront un parcours de deux ans de formation en master, alternant stages pratiques en établissements scolaires et enseignements académiques. Cette formation sera rémunérée.
Engagement de service après titularisation : les enseignants seront tenus de servir pendant quatre ans dans la fonction publique après leur titularisation, afin d’assurer une stabilité et une continuité dans les établissements scolaires.
Une réforme qui suscite critiques et inquiétudes
La réforme suscite de vives critiques, notamment de la part des syndicats. Sophie Vénétitay, secrétaire générale du SNES-FSU, dénonce le repositionnement du concours à bac+3 qui, selon elle « déqualifie » la profession. Elle craint que cette mesure n’aggrave les difficultés liées à l’attractivité de la profession et la perte sur la qualité du recrutement et la reconnaissance du métier.
La conférence des associations de professeurs spécialisés dénonce également une « sape de l’enseignement scolaire par un recrutement au rabais » : pour elle « cette mesure entraînerait une baisse alarmante du niveau de maîtrise disciplinaire, au détriment des élèves. Les concours, passés dès février-mars de l’année de licence 3, évalueraient un niveau bac + 2 effectif, et non bac + 3 comme fallacieusement avancé. Elle fragiliserait ainsi les professeurs. On ne peut, en effet, être un professeur efficace si on maîtrise mal les savoirs et les méthodes disciplinaires que l’on enseigne ».
Pour les associations signataires (APBG, APDEN, APLettres, APPEP, APSES, APSMS, UPBM, UdPPC), il existe des leviers pour revaloriser le métier de professeur qui nécessitent des moyens : la baisse des effectifs des élèves, l’augmentation des salaires, des formations qui n’abaissent pas le niveau d’exigence de savoir des enseignants.
Jean-Pierre Véran, membre du Collectif d’interpellation du curriculum (CICUR), critiquait dans Le Café pédagogique, l’approche « cloisonnée » de la réforme, qui, selon lui, ne répond pas aux besoins actuels d’une éducation plus transversale. Il écrivait : « Ainsi donc, rien ne change dans le moule de formation des enseignants. Nous avons pourtant changé de siècle. Les multiples transitions qui caractérisent le nôtre pourraient pousser à penser autrement les enseignements proposés aux élèves et, par conséquent, la formation prévue pour les enseignants ».
Quant à l’UNSA Éducation, elle considère que « cette réforme doit permettre de retrouver petit à petit des viviers plus denses aux concours, mais aussi de diversifier les profils des candidats ». Pour le syndicat, cette réforme permettrait « une plus grande mixité sociale et scolaire », [à] «commencer par des professionnels qui incarnent toute la diversité de la population ».
Un contexte de crise du recrutement
Cette réforme intervient dans un contexte de pénurie croissante d’enseignants. Près de 3 200 postes d’enseignants étaient non pourvus à la session 2024 des concours. Cette situation de crise du recrutement reflète les difficultés pour attirer de nouveaux enseignants. Pour les syndicats, comme pour l’ensemble des enseignants, les conditions pour rendre la profession plus attractive sont l’augmentation des salaires et une amélioration des conditions de travail. La formation des professeurs, initiale comme continue, est essentielle pour garantir la qualité de l’enseignement. Un des enjeux de la réforme, au-delà de l’attractivité d’un métier en crise, d’une profession à renforcer, ne doit-il pas être de penser l’école, les savoirs dispensés dans un souci de réussite de tous les élèves ?
Djéhanne Gani
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