Par Julien Cabioch @vivelesSVT
Etudier les productions bio et locales en cours de SVT
De la ferme des 1000 vaches à l’huile de palme en passant par l’intolérance au gluten, les sujets d’actualité évoqués sont multiples. Au lycée Eugène Woillez de Montreuil sur Mer (62), les élèves apprennent à apprécier les productions biologiques et locales dans un contexte de développement durable. Sous la houlette de Julien Gossart, enseignant de SVT, une équipe pluridisciplinaire implique les lycéens dans une série d’ateliers et de sorties pédagogiques. « L’engouement des élèves et leur implication nous ont conduits à amplifier et à développer les projets ». Comment fabriquer une pâte à tartiner sans huile de palme ? Une ferme bio est-elle rentable ? Retrouvez les questions abordées en classe de 2nde.
En quoi votre projet est axé sur la découverte des productions biologiques & locales ? Quels en sont les objectifs ?
Notre projet est axé sur la découverte des produits BIO et locaux par la découverte d’une ferme « la halte d’Autrefois », une chèvrerie produisant et transformant directement son lait en fromage situé à 30 min du lycée et produisant du pain à partir de variétés anciennes de blé. Cela passe aussi par la distribution de fruits (pommes, poires) à la cantine provenant pour une partie de chez un agriculteur BIO et de jus de pommes aux petits déjeuners ou encore des ateliers de fabrication d’une pâte à tartiner sans huile de palme et de crêpes par un acteur bio local. Nous animons aussi une opération « petit déjeuner » pour l’ensemble des élèves de seconde, avec sélection des produits par les élèves, mise en place et promotion par eux. Les produits distribués sont avant tout d’origine biologique et locale lorsque cela est possible.
Les objectifs sont de faire prendre conscience de l’impact d’une consommation locale de produits bio ayant une répercussion : sociale créant des liens entre les personnes, économique créant des emplois, environnementale en respectant les animaux, le rythme des cultures, le sol et surtout l’absence de produits chimiques (pesticides, insecticides, conservateurs). Ils ont été sensibilisés aux 3 pôles du développement durable. Il s’intègre ainsi totalement dans notre projet d’établissement où le développement durable y est inscrit, notamment par le label E3D que nous avons obtenu, il y a 3 ans.
Quelles sont les sorties pédagogiques effectuées par les élèves ? Comment sont-elles exploitées ensuite ?
La sortie à la ferme « la halte d’autrefois » par 2 classes pilotes, a été effectuée à partir des questions que se posaient les élèves. Chaque élève se mettait à la place d’un journaliste et prenait en note la réponse à la question si elle était abordée ou il la posait. Ainsi, différents thèmes, ont été abordés : La ferme bio est-elle rentable ? Quels sont les critères à respecter pour avoir le label bio ? Combien de personnes permet-elle de faire vivre ? Comment limite-t-elle au maximum son impact sur l’environnement ? (panneaux photovoltaïques, station d’épuration naturelle avec roseaux pour le petit lait, cuisson du pain dans un feu de bois, récupération de l’eau de pluie pour nettoyer la chèvrerie). Comment se fait la culture bio des légumes dans le potager ? Et d’autres élèves étaient chargés de prendre des photos afin d’illustrer la sortie.
L’atelier pâte à tartiner « sans huile de palme » et crêpes pour 3 classes pilotes s’est déroulé après un travail par la classe pilote qui n’était pas allée à la ferme. Elle a travaillé sur les effets de l’huile de palme et si celle-ci est une culture durable ou non. Le travail a été fait en partenariat SVT et Histoire/ Géographie durant les séances d’AP : séance de recherche, élaboration des grands thèmes (impact sur la déforestation, sur la biodiversité, sur la migration des populations locales, l’exploitation des ouvriers, l’évolution des sols, le coût de l’huile de palme par rapport aux autres huiles, dans quoi retrouve t’on l’huile de palme et quels sont ses effets sur la santé). Cela a abouti à l’élaboration d’affiches pour chaque thème abordé et disposées dans un puits de lumière au sein du lycée.
Quelles sont les productions réalisées par vos lycéens ? Comment sont-elles valorisées ?
Les élèves ont donc réalisé une page en anglais et en allemand avec leurs professeurs de langue afin de présenter la ferme de la halte d’autrefois sur le site internet pour les classes étrangères qui viennent régulièrement la visiter. La sélection de la meilleure page a été faite par la propriétaire de la ferme : Valérie Magniez.
Plusieurs autres productions sont effectuées : une étude d’un sondage et son exploitation avec leur professeur de mathématiques, le calcul du coût par personne de la réalisation de la pâte à tartiner et des crêpes afin de contrer l’une des remarques des élèves selon lesquels manger bio et local coûte plus cher ; l’élaboration des affiches : l’huile de palme est elle durable ? et une autre indiquant l’origine de l’ensemble des produits du petit déjeuner.
Sans oublier, la présentation et la mise en place du petit déjeuner à l’ensemble des 13 classes de secondes (générales, technologiques et professionnelles) par des élèves volontaires, le passage de la presse et un article dans le journal local et la création d’une rubrique développement durable reprenant les actions menées sur l’ENT.
Plusieurs disciplines contribuent au projet : SVT, anglais, maths, histoire-géo. Dans quelles mesures les thèmes abordés rejoignent-ils ces disciplines ?
En anglais et allemand, les élèves réalisent la page internet de la ferme et ainsi travaillent sur le vocabulaire et les formules à utiliser. En mathématiques : exploitation du sondage et travail sur les probabilités, travail sur le calcul de l’IMC et calcul du coût de la recette pâte à tartiner et crêpe par personne avec des ingrédients bio.
En Géographie : travail sur l’impact de l’Homme sur la déforestation, la population locale se retrouvant sans terre, le développement des bidonvilles, les conditions de travail dans les palmeraies.
En SVT, nous comparons deux types d’agricultures : ferme des milles vaches et la ferme de la halte d’Autrefois permettant de travailler sur le thème « le sol un patrimoine durable » avec les répercussions pour chacune des exploitations, l’impact sur la biodiversité et comment la préserver. Cela permet aussi de parler de certaines causes de mutations de l’ADN avec les produits chimiques et pesticides. Nous avons visionné un extrait du reportage Cash investigation sur les pesticides et un extrait du DVD « nos enfants nous accuseront ». Enfin, un travail sur comment garder son corps en bonne santé avec un retour sur l’IMC et son indication et comment le faire évoluer (alimentation saine et équilibrée) a été réalisé.
Comment s’effectue la concertation entre enseignants pour coordonner le projet ? Des écueils à éviter ?
La concertation se fait par 3 rencontres : une en fin d’année afin de faire voter par le conseil d’administration les visites prévues et de planifier les actions menées. Une autre rencontre a lieu en cours d’année afin de faire une mise au point sur le déroulement des différentes actions en cours et de préparer l’opération petit déjeuner qui demande une bonne organisation ( information des classes, détermination des groupes aidant, et planning des classes passant). Puis une dernière réunion a lieu pour faire un bilan lorsque l’ensemble des actions sont faites. Le reste de la concertation se fait par l’ENT ou directement en se voyant dans la salle des professeurs.
On ne pensait pas réaliser tout cela au début, mais l’engouement des élèves, leur implication nous a conduit à amplifier et à développer les projets. Et aussi le besoin d’avoir un « chef » de l’ensemble du dispositif et des porteurs de chaque projet afin d’éviter que plusieurs préparent la même chose et que d’autres choses soit oubliées.
Vous évoquez aussi les intolérances (lactose, gluten) mais aussi les produits issus de l’huile de palme. En quoi est-ce important d’étudier ces sujets avec des lycéens ? Comment le faites-vous ?
Je suis moi-même touché par une intolérance (et non allergie) au gluten et à d’autres produits (soja, pistache). En début d’année, lors du remplissage de la fiche de renseignement, j’ai remarqué que plusieurs élèves étaient dans le même cas, et également nous sommes confrontés à une augmentation du nombre d’élèves en pré-obésité et par des élèves consommant de plus en plus, des matières grasses (viennoiseries, produits industriels, sucrerie etc.) Il est important de sensibiliser les futures générations à d’autres manières de consommer plus durable pour l’environnement, permettant de créer de l’emploi pérenne localement, et surtout de produire des aliments de meilleure qualité gustative et pour la santé.
Quelles pistes avez-vous pour l’an prochain ?
En cours d’année, nous avons travaillé dans le thème cosmétique de MPS, sur la réalisation de produits cosmétiques bio (dentifrice, shampoing, bain de bouche, savon, crème pour le visage, démaquillant, parfum …) à partir de produits simples.
Nous pensons diversifier les ateliers avec plusieurs pistes possible : pâte à tartiner / crêpes ; fabrication de dentifrice bio et fabrication de savon à froid.
A cela, viendra se rajouter l’opération « un fruit pour la récré », les classes pilotes avec la MDL et le CVL vont chapeauter la distribution de fruits bio gratuitement le matin selon l’engouement et la gestion, nous pensons ensuite nous diriger vers la transformation des fruits en compote, smoothie, et soupes. Les recettes seront élaborées et proposées par les élèves. La distribution s’effectuera à la cafétéria gratuitement.
Entretien par Julien Cabioch
Datalogger : Des clés pour enregistrer les données climatiques
Pour enregistrer les données il faut souvent être présent sur le terrain longuement. Sur le site académique de Nantes, Gérard Fougerolle, professeur de SVT à Grez en Bouère, présente une autre piste : celle des clés datalogger. Ces capteurs peuvent être laissés sur place pour ensuite être raccordés sur un ordinateur pour en récupérer les données. Il donne quelques exemples de scénarios pédagogiques : » Placer les capteurs à quelques mètres seulement l’un de l’autre mais l’un à l’ombre et l’autre au soleil pour montrer l’influence de la température et de l’humidité sur le développement d’une population d’êtres vivants étudiés dans l’environnement proche du collège. Placer les capteurs l’un sous abri ou non et l’autre sous terre pour montrer que dans le sol, les végétaux (organes de réserves) et les animaux (larves d’insectes hibernantes) ne gèleront pas et reprendront leur activité au printemps. Si en surface l’activité animale et végétale semble « ralentie » en hiver, sous terre des relations trophiques grâce au caractère isolant de la terre perdurent, notamment celles des décomposeurs ».