On sait la France championne des inégalités sociales en éducation. Mais quels processus l’expliquent ? Andréas Schleicher, qui dirige le service Education de l’OCDE, montre que les représentations y ont aussi leur part.
« La France compte une proportion comparativement modeste d’élèves défavorisés mais les chefs d’établissement la perçoivent comme importante et les résultats scolaires y sont étroitement liés au milieu socioéconomique – plus étroitement en fait que dans tout autre pays à l’exception du Chili et de la République slovaque », écrit A Schleicher. Inversement, « en Corée et à Singapour, plus d’un élève sur deux issu du quartile inférieur de l’échelle socioéconomique se situe dans le quartile supérieur du classement international du PISA. Au Japon, 45 % des élèves défavorisés présentent la même « résilience » et obtiennent de meilleurs résultats au test du PISA que l’on pourrait le penser au vu de leur milieu socioéconomique d’origine. En revanche, en France et aux États-Unis, seuls 20 % environ des élèves sont résilients, et un sur dix seulement en Israël », affirme –t-il.
Ainsi s’établit une inversion que souligne A Schleicher. « Le sentiment qu’ont les chefs d’établissement du handicap socioéconomique est plus étroitement corrélé à l’inégalité des chances face à l’éducation que ne l’est le handicap socioéconomique réel ».
« Le handicap socioéconomique représente un véritable défi pour les spécialistes de l’éducation dans le monde entier, mais dans des pays comme la France ou les États-Unis, le handicap supposé est bien plus grand que le handicap réel et il exerce une influence importante sur les résultats scolaires. Dans des pays comme Singapour, le handicap socioéconomique réel est bien plus important que ne l’imaginent les chefs d’établissement, mais le système éducatif semble parvenir à aider les élèves à le surmonter. » Ainsi pour Andreas Schleicher, directeur de l’éducation et des compétences à l’OCDE, la pauvreté n’est pas une fatalité. Son poids dans l’avenir scolaire des enfants n’est pas lié au taux de pauvres dans les classes mais aussi à la représentation que s’en font les enseignants. La pauvreté peut peser double.