Par Antoine Maurice
Ce mois-ci, nous avons rencontré Yannick Boisseau, professeur d’EPS au Collège-Lycée Saint Joseph Les Maristes à Marseille, ancien formateur au sein de l’UFR STAPS de Lyon, mais surtout développeur à l’origine d’un site relatif aux différentes applications qu’il propose sur tablettes tactiles. L’idée, au cœur de ces propositions, vise à simplifier les tâches de l’enseignant d’EPS et ainsi proposer à l’élève un enseignement des plus efficient. Dès lors, les applications qu’il développe visent, avant toute chose, à répondre aux besoins de l’enseignant et des élèves. Force est de constater que l’outil numérique n’est désormais plus la propriété de spécialiste tant il devient simple et judicieux de s’y lancer !
Peux-tu nous présenter rapidement ton site ?
Le site est avant tout conçu pour être un lieu d’échanges. Bien que les applications développées pour l’iPhone et l’iPad soient simples d’utilisation, la nécessité de proposer un support d’aide s’est rapidement imposée. Le système de communication de l’Apple Store (lieu où l’on peut télécharger les applications) est à sens unique : seuls les utilisateurs peuvent donner leur avis, formuler leurs remarques, sans que le développeur ne puisse répondre. Le site me permet de communiquer directement avec les enseignants qui utilisent mes applications. Ils me font part de leurs difficultés d’utilisation, des bugs éventuels, de leurs idées d’amélioration… J’essaie d’être le plus réactif possible pour qu’un dialogue constructif s’installe. Le site présente également les applications que j’ai développées à ce jour ainsi que celles qui sont en cours d’élaboration.
Comment ta démarche a-t-elle vu le jour?
Je suis un peu comme Obélix : je suis tombé dans l’informatique lorsque j’étais petit (J’ai eu mon premier ordinateur à 16 ans, un ZX81 !). J’ai donc toujours associé les outils numériques à mon travail d’enseignant. Ainsi, dans les années 90, j’ai développé une application de gestion de la note d’EPS au baccalauréat, distribuée par la revue EPS. Lorsque les tablettes sont apparues, j’ai tout de suite perçu l’intérêt qu’elles pourraient représenter pour notre profession. Ainsi, EPS 3X500 (ma première application) est née d’un besoin de terrain. Elle permet de calculer la note d’un élève de terminale lors de l’épreuve du 3X500. J’ai décidé de la publier sur l’Apple store à la demande de collègues qui souhaitaient pouvoir en profiter. D’autres besoins se sont fait sentir, et d’autres projets sont nés… Chaque nouvelle application à développer est un nouveau défi pour moi, car je découvre le langage de programmation spécifique d’Apple au fur à mesure, étant néophyte à l’origine…
Justement est-ce qu’à l’heure actuelle, les collègues sont obligés d’être tombés dans l’informatique étant petits pour pouvoir utiliser les outils numériques ?
La réponse est clairement non. Si, au départ, l’informatique était réservée à quelques initiés, elle s’est depuis démocratisée. Windows et son « plug and play » (traduction : « tu branches et ça marche ») et bien sûr Apple, avec ses systèmes d’exploitations de plus en plus intuitifs, ont permis aux néophytes de goûter aux joies du numérique. Les écrans tactiles ont, pour leur part, révolutionnés la communication homme-machine. Les contraintes et la complexité sont désormais passées dans le camp du développeur. Tout est conçu pour que l’utilisation des applications soit simple, voire simplissime. L’intuitivité doit régner en maître. A tel point que le troisième et le quatrième âge s’initient désormais à ces nouveaux outils que sont les tablettes. Mais ne nous y trompons pas, ces applications, que nous utilisons au quotidien sur nos smartphones, sont aussi puissantes et performantes que les logiciels de nos ordinateurs. Sont-ils condamnés à disparaître ?
Peux-tu nous présenter les applications (deux ou trois) que tu as créées ?
Celle que j’utilise le plus est EPS BOARD. Elle permet de sauvegarder graphiquement un « état » d’une classe donnée. Tous les élèves de cette classe sont représentés à l’écran. Il est possible de les déplacer, de changer leur couleur, de leur attribuer un rôle (arbitre, observateur, dispensé…). On peut ajouter des objets sur l’écran (terrains, cages, numéros…).
Ainsi, il est très facile de préparer ses séances (groupes d’élèves, rôles de chacun..) ou d’enregistrer un résultat (comme une montée descente par exemple) en fin de séance. Les utilisations de l’application sont quasi-infinies.
J’ai également conçu une application de gestion des élèves dispensés. (EPS INAPT). Plus besoin de chercher la date de reprise d’activité d’un élève. Un système de couleurs indique si la dispense est terminée. La date de reprise d’activité est automatiquement calculée en fonction de la durée de la dispense saisie (en jours et/ou semaines et/ou mois).
La toute dernière application que j’ai développée (EPS ATP) permet de gérer en temps réel un tournoi type « défi », en sport de raquettes ou de combat. Les élèves sont classés les uns par rapport* aux autres et peuvent se défier pour tenter de progresser dans le classement. L’application enregistre les victoires ou défaites et attribue les points automatiquement. Le classement est mis à jour en temps réel.
Concernant EPS-ATP comment le mets-tu en place avec tes élèves ? Utilises-tu plusieurs tablettes ?
Malheureusement, mon établissement n’est pas « encore » équipé de tablettes. Cependant, EPS ATP n’est pas une application orientée « élèves ». Sa vocation est de dynamiser les séances type « défis » (le classement est mis à jour en temps réel à chaque nouveau résultat, ce qui crée une réelle émulation entre les élèves) et surtout de simplifier la tâche de l’enseignant. Celui-ci est énormément sollicité lors de ces tournois (soit pour renseigner les élèves sur leurs adversaires potentiels, soit pour saisir les résultats). J’ai optimisé l’application au maximum (un clic pour connaître les adversaires potentiels d’un élève, trois pour saisir un résultat : ARBITRE – VAINQUEUR – PERDANT). D’autres applications disponibles permettent d’enregistrer les scores (ce qui à mon avis n’est pas vraiment utile). Après de multiples tests, j’ai opté pour une saisie minimaliste afin de ne pas être submergé pendant le tournoi.
Concernant l’organisation, deux options sont envisageables selon le type d’élèves que l’on a : Soit des matchs au temps (Tous les matchs débutent et se terminent en même temps, ce qui permet à l’enseignant de garder un contrôle sur la gestion du temps, des groupes et de l’espace (version plus adaptée à des élèves difficiles) ; Soit une organisation plus souple : les matchs sont classiques (deux sets gagnants en tennis de table, par exemple). A charge aux élèves de trouver un terrain disponible, un arbitre, et un adversaire à défier. J’ai personnellement adopté la seconde organisation, ayant en charge des élèves plutôt faciles et autonomes.
Beaucoup de personnes insistent sur la pertinence de l’outil numérique et notamment de la tablette au service des apprentissages des élèves, si tu devais en quelques lignes confirmer cette idée, quel serait tes arguments ?
Pour que les tablettes ne deviennent des gadgets pédagogiques, il faut les utiliser à bon escient. Confucius l’avait déjà pressenti : « une image vaut mille mots ». Pour certaines APS, les outils numériques peuvent être des supports de travail exceptionnels. La différenciation pédagogique rend parfois la tâche de l’enseignant difficile. En Acrosport, par exemple, les groupes d’élèves travaillent sur des projets différents. Les outils numériques peuvent aider l’enseignant en guidant les élèves sur le « quoi » et le « comment ». Il ne s’agit pas de remplacer le professeur, mais plutôt de le démultiplier. L’application Acrosport, disponible sur l’Apple store, offre par exemple bien plus de possibilités qu’une simple fiche (catalogue de figures classées, vue des figures sous 360 degrés,).
Mais la vraie révolution se situe à mon avis au niveau de la vidéo : Ces nouveaux outils peuvent fournir à l’élève un feedback sur sa prestation. ReplayCam (disponible sur l’apple store) est à ce titre une application incontournable. Le programme filme et restitue les images avec un décalage programmé. Il suffit donc de dédier un espace et de lancer l’application. Le ou les élèves réalisent leur prestation, puis vont tranquillement voir leurs exploits. Rien n’est enregistré. J’utilise beaucoup cette application en gym, danse, acrosport, escalade… Grâce au feedback vidéo, l’élève peut aisément se corriger.
Dernière question, tu nous as expliqué, à juste titre, la simplicité d’utilisation des tablettes. Maintenant, qu’en est-il si l’on souhaite créer son application ?
C’est une toute autre histoire. La démarche relève du parcours du combattant… Il faut, bien sûr, maitriser la langue de Shakespeare (tous les forums d’aide, les documentations sont majoritairement en anglais, et ils sont quasi-indispensables). Un ordinateur (mac pour les applications Apple et PC pour androïd) et si possible un smartphone ou une tablette sont requis pour tester ses créations. Il faut ensuite télécharger un logiciel de développement gratuit (Eclipse pour Android et xcode pour Apple). Il est également nécessaire d’apprendre ou de maitriser les langages de développement (Objective C pour Apple ou Java pour Androïd, par exemple). Mais il en existe d’autres… Il est enfin indispensable d’acheter une licence annuelle de développeur auprès d’Apple ou de Google pour pouvoir proposer ses créations sur les différents stores. Cette démarche est la plus standard. D’autres possibilités existent (Windev par exemple).
Mais rien n’est impossible ! Il faut simplement beaucoup de temps libre et une bonne dose de patience. Mais quel plaisir de voir fonctionner une application que l’on a conçue soi même ! Pour démarrer, je vous conseille le cours ci-dessous sur internet (lien à la fin de l’entretien). Et surtout, bon développement à tous !
Yannick Boisseau, Merci
Le site
http://yboisseau.wix.com/epsappli
Cours sur la création des applications
http://fr.openclassrooms.com/informatique/cours/creez-des-applic[…]
Sur le site du Café
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