L’étude européenne Eurydice montre que la grande majorité des pays européens touchés par la crise réduisent leurs dépenses d’éducation. Le cas français n’est pas qu’exceptionnel. Il semble peu durable.
Dans cette étude Eurydice, la singularité de la France saute au yeux. Bien sur, la France fait partie des pays qui ont réduit leurs dépenses éducatives jusqu’en 2012. On sait qu’en gros sur les 10 dernières années, la dépense intérieure d’éducation a diminué d’un point de PIB ce qui est énorme. L’Etat a supprimé 80 000 postes d’enseignants et en même temps gelé les salaires.
La situation s’est inversée depuis 2012. Le gouvernement a annoncé la création de 60 000 postes et remis en place la formation des enseignants (soit 27 000 postes à déduire des 60 000). En 2013, le budget de l’éducation nationale augmente de deux milliards dans un pays qui réduit massivement ses dépenses pour diminuer le déficit budgétaire. Cet effort n’est pas unique en Europe. D’autres pays européens augmentent aussi leurs dépenses éducatives. Mais ce sont des pays où la situation économique et budgétaire est nettement meilleure comme la Turquie, un « dragon » européen, ou l’Allemagne.
La situation de l’Ecole en France en 2013 est tout à fait exceptionnelle. L’effort budgétaire consenti pour l’éducation est de plus en plus insupportable aux yeux des autres ministères astreints à des coupes d’autant plus drastiques que l’éducation crée des postes. Quand l’éducation affiche qu’elle échappe au nouveau tour de vis décrété par Bercy début mars, la Défense par exemple se voit imposer des coupes tellement sévères qu’elles posent la question du maintien de l’appareil militaire. L’Etat fait porter aux collectivités territoriales de nouvelles dépenses (la formation professionnelle par exemple ou le périscolaire) alors même qu’il réduit de 5 milliards ses versements à ces collectivités. On comprend que cela génère de vigoureux frottements…
Est-ce durable ? Combien de temps les efforts consentis pour l’éducation resteront-ils supportables au regard des équilibres entre les missions de l’Etat ? La question est déjà posée. En axant sa politique éducative sur la création de 60 000 postes, le gouvernement s’est enfermé dans une situation qui apparait intenable si la situation économique ne se relève pas rapidement. Tôt ou tard, la question de l’efficacité du système et des économies à réaliser là où la dépense est forte, comme en lycée, va se poser. L’Ecole pourrait bien aussi devenir son propre recours en terme de financement.
François Jarraud