Par Françoise Solliec
Comment les élèves voient-ils les profs ? Nous avons demandé à Floréale Mangin, présidente de l’union nationale des lycéens, UNL, également membre du CNVL, de nous présenter les réflexions de l’UNL à ce sujet.
Un travail suivi avec les syndicats enseignants et des pédagogues
L’UNL, affirme Floréale Mangin, est très attachée au système éducatif et souhaite travailler pour son amélioration. L’école doit être un endroit d’éducation, mais ce n’est pas seulement le rôle des enseignants, c’est la communauté toute entière qui doit s’en emparer.
« Nous ne cherchons pas du tout à aller à l’encontre des enseignants, mais à travailler avec eux. Ca fait parfois mal, mais nous sommes bien placés pour parler d’un certain nombre de problèmes ». Par exemple, l’UNL a beaucoup travaillé avec André Antibi et discuté avec les lycéens des problèmes inhérents à la notation des copies. La plupart des lycéens ne sont pas conscients de leur rapport à la note, ni de l’influence qu’elle a sur leur travail. Dans certains enseignements, comme en classes préparatoires, les notes, surtout les mauvaises, sont accompagnées d’une correction détaillée qui aide à progresser. La remise en cause de la constante macabre d’Antibi est tout à fait justifiée. Les élèves ont besoin d’une évaluation formative et non pas d’être cantonnés dans les rangs des « mauvais », d’autant qu’ils arrivent parfois à comprendre le contenu du cours bien après.
L’UNL participe à des rencontres régulières avec les syndicats d’enseignants : TPE, méthodes pédagogiques, analyses du système éducatif. Cela permet d’avoir une meilleure représentation des problèmes des enseignants. Cela permet aussi d’organiser l’action intersyndicale et de faire avancer des revendications de manière commune.
Les congrès de l’UNL sont l’occasion d’inviter des pédagogues reconnus, tels Philippe Meirieu avec lequel a été discutée notamment la question de la démocratie lycéenne. « C’est encore un autre rapport avec le corps enseignant ». Globalement, l’UNL note peu d’implication des enseignants dans les comités de vie lycéenne, CVL, mis en place après la consultation organisée en 1998 par Philippe Meirieu sur Quels savoirs enseigner dans lles lycées ? mais précise que cela dépend des établissements.
Selon l’image qu’en a l’UNL, le métier d’enseignant reste une vocation pour certains des jeunes profs. Ceux-ci ressentent cependant la difficulté d’être seuls face à un groupe d’élèves pas forcément heureux de leur situation. Ils sont également conscients d’être mal payés et mal considérés (la durée des vacances leur est souvent reprochée, ainsi que la sécurité de l’emploi, qui n’est plus pourtant aussi évidente dans le choix du métier). Cette mauvaise image affecte le regard des élèves sur l’ensemble des enseignant, « même si on a tous eu des rencontres avec des profs qui ont fait changer notre regard sur le monde. Notre expérience personnelle joue aussi : pour moi à l’UNL, j’ai découvert l’éducation autrement ».
Grâce aux anciens membres de l’UNL devenus stagiaires ou formateurs à l’IUFM, l’organisation lycéenne s’est également penchée sur la formation des enseignants. Il lui semblerait bon que profs et élèves soient davantage acteurs communs de la vie de l’établissement. « Se sentir bien dans son établissement, c’est important. Ainsi on note souvent des recrudescences de violences après un renforcement des dispositifs sécuritaires. Il ne faut pas oublier que la première implication est dans la vie de l’établissement, avant même l’appartenance au groupe classe ». Les lycéens sont prêts à subir le savoir, mais estiment qu’on ne leur demande pas assez leur avis.
Dans les discussions avec la FSU, plusieurs tables rondes ont été consacrées à la problématique de l’orientation et notamment le rôle et la situation des CO-Psy. Les débats ont été parfois houleux mais ils ont permis de confronter les représentations un peu idéalisées des lycéens avec la réalité et d’aboutir ensuite à des relations moins tendues, notamment dans les CA d’établissement.
De manière générale, l’UNL trouve le travail assez difficile pour la représentation syndicale. « Par exemple, au CNVL, les adultes présents ne nous laissent pas beaucoup de place. Nous avons également des difficultés avec les lycéens non syndiqués, qui ont peur de nous ». Le travail dans les instances académiques, CAVL, laisse aussi à désirer : « il y a trop de projets et pas assez d’actions » estime Floréale Mangin, qui ajoute « à l’UNL, la majorité des demandes concernent des problèmes de droits. Si les lycéens connaissaient mieux leurs droits, le fonctionnement serait meilleur ».
En conclusion, quelles seraient les recommandations que l’UNL voudrait faire aux enseignants ? « Ecouter davantage les élèves, tout en sachant poser son autorité. Ouvrir les IUFM sur cette réalité, essentielle, de la gestion de la classe. Savoir établir des liens interdisciplinaires, appuyés sur du concret, dans les matières enseignées : cela dépend trop souvent du seul bon vouloir des enseignants ».