Les Cahiers pédagogiques condamnent le projet Fillon
« Le nouveau ministre avance à visage découvert : éloge de la dictée considérée comme un des beaux arts, légalisation de la punition collective, projet de suppression des TPE en terminale. Et voilà que maintenant on nous annonce l’introduction d’une note de comportement au brevet. La liste n’est pas close ; on peut s’attendre à une remise en cause des tout récents programmes du primaire, il a même été question de l’examen d’entrée en sixième. Il est frappant de voir que, animé par un louable désir de simplification et d’économie budgétaire, le ministre préconise de supprimer les contenus et les dispositifs complexes répondant aux défis du monde du XXI° siècle tandis que sont mis à l’honneur quelques éléments solidement traditionnels (les bonnes vieilles méthodes), quantitatifs (dédoublement des classes de langue en terminale) ou disciplinaires. L’idée, vieille comme la scolastique la plus formelle, est que les contenus d’enseignement renferment naturellement leurs modes de transmission et s’imposent d’eux-mêmes pour peu que les enseignants disposent de bonnes conditions pour se faire entendre et sachent utiliser l’arsenal répressif propre à réduire les gêneurs au silence… » Pierre Madiot, rédacteur en chef des Cahiers pédagogiques condamne dans un éditorial le projet Fillon. « Ignorant le rapport de l’Inspection générale qui reconnaît aux TPE le mérite d’être » une remarquable préparation à la poursuite d’études « , le ministre veut les supprimer afin que les élèves se préparent mieux à l’examen ! Merci pour la démonstration… Nous aurons une école plus sélective et une autorité plus arbitraire. Voilà une affaire résolue ».
http://www.cahiers-pedagogiques.com/article.php3?id_article=1252
P. Meirieu dénonce le calcul pitoyable de la loi Fillon
« Vive « l’école rentable »! Dehors les « empêcheurs d’enseigner en rond » ! Si tel est le calcul, il est, tout à la fois, tragiquement politicien, déontologiquement inacceptable et terriblement régressif ». Philippe Meirieu, dans une tribune publiée par Le Monde du 24 novembre, analyse sévèrement le projet de loi sur l’éducation de F. Fillon. « Une telle démarche constitue une grave régression : les enseignants pourront, en effet, s’émanciper du projet d’école ou d’établissement et mettre ainsi en péril la cohérence éducative nécessaire aux enfants les plus fragiles. Les parents, eux, au nom de l’obligation de résultats, accentueront la pression consumériste sur l’école : ils ne manqueront pas de faire circuler les palmarès nécessaires permettant aux initiés d’épargner à leurs enfants les mauvais professeurs… En réalité, un tel calcul est pitoyable : fondé sur un mépris symétrique des parents réduits à des « consommateurs d’école » et des enseignants considérés comme de piètres professionnels, ne disposant que des sanctions, redoublements et exclusions pour faire réussir leurs élèves… Restent – et c’est peut-être le plus grave – les grands chantiers oubliés : la fracture scolaire qui se creuse de plus en plus entre les établissements prestigieux et les établissements ghettos ; la concurrence entre les établissements privés et publics et, au sein de l’enseignement public, entre ceux qui jouent la carte de la mixité sociale et ceux qui lui préfèrent celle de la sélection ; la nécessité d’enrayer le développement des officines privées de soutien scolaire, qui spéculent honteusement sur l’angoisse des familles ».
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3232,36-388263,0.html
L’association Education & Devenir parle d’un « retour en arrière ». » La notion fondamentale de projet d’établissement outil d’harmonisation et d’échange, a quasi disparu. Quel sera en effet le rôle d’un conseil pédagogique face à la reconnaissance insistante de la liberté individuelle de chaque enseignant en matière de discipline et de pédagogie ? Ne va-t-on pas accroître l’aspect » profession libérale » si souvent dénoncé du métier d’enseignant ?… Toute la dynamique issue de la création d’établissement autonome (EPLE – loi de 1985), de la loi d’orientation de 1989, du texte définissant les missions de l’enseignant (1997) et des innovations destinées à développer le travail en équipe et à donner du sens aux enseignements (TPE, IDP, PPCP) est remise en cause. La classe devient une » boîte noire » refermée sur elle-même, le tissu relationnel reliant la classe à l’établissement et à l’extérieur est déchiré ». Pour l’association, » à aucun moment on a perçu dans les propositions du ministre la compréhension du vécu de l’échec scolaire. A l’heure actuelle on ne sait déjà pas aider l’élève à surmonter le premier échec qu’il rencontre. Dans un parcours parsemé d’évaluations déterminantes ne va-t-on pas reléguer radicalement et plus tôt les plus démunis ?.. L’école va-t-elle produire des êtres formatés s’adaptant parfaitement aux besoins économiques du moment ou former des citoyens engagés, autonomes et critiques ? »
http://education.devenir.free.fr/Tribune.htm
Les associations éducatives inquiètes de la loi Fillon
Reçues par le ministre le 29 novembre, les 8 associations du CNAECEP (Cemea, Occe, Pep, Ligue de l’enseignement, JPA, Francas, Foeven, Eedf) ont exprimé leurs craintes « sur le renforcement des inégalités scolaires et sociales pouvant résulter du contenu des différentes mesures et tout particulièrement la course au mérite, … l’abandon programmé des TPE et des IDD ».
http://www.jpa.asso.fr
A. Prost : Fillon trahit Thélot
» C’est une trahison du rapport Thélot. (Le) projet de socle commun est réduit à un enseignement minimal de connaissances et à une note de vie scolaire. Si nous ne voulons pas des sauvageons, il faut éduquer les jeunes à l’école. Avec la mise en place d’une note de vie scolaire, on se limite à punir les élèves qui ne seraient pas socialisés. C’est une caricature ». Antoine Prost, historien et acteur de l’éducation, ne mâche pas ses mots dans un entretien accordé au Monde. Assimilant les objectifs fixés par le projet de loi d’orientation de l’Ecole à une « déclaration d’intention » qui n’engage pas le ministre, il juge sévèrement le texte. » M. Fillon va à l’encontre du résultat des recherches. Imaginez un ministre de la santé qui dispose de quarante études montrant qu’un produit est nocif et qui invite les médecins à le prescrire. C’est ce que fait le ministre en augmentant le pouvoir des enseignants en matière de redoublement, dont toutes les études montrent l’inefficacité. Cette décision est indigne. Elle ne résout pas le problème majeur des élèves en difficulté ». A. Prost n’a pas digéré la suppression des TPE : » la suppression par François Fillon des travaux personnels encadrés (TPE) en classe de terminale est ridicule. La première année, les professeurs ont dit : « On n’en veut pas. » La deuxième, ils ont trouvé que ça n’était pas si mal. La troisième, ils ont essayé d’en tirer vraiment parti. Aujourd’hui, on les supprime ! ». C’est aussi l’avis du Café !
http://www.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-3226,36-393774,0.html
Pédagogie différenciée : avis de décès pour Jean Houssaye
» Fausse «nouveauté» mais véritable régression pédagogique, la pédagogie de soutien fait sortir du quotidien de la classe la question de la prise en compte des différences entre les élèves. A ce titre, elle justifie la pédagogie traditionnelle, l’encourage, lui donne bonne conscience. La loi Fillon sur l’école signe la mort de la pédagogie différenciée, le retour de la pédagogie de soutien et la restauration de la pédagogie traditionnelle. Il restera aux acteurs de l’éducation à se prévaloir de leur prétendue nouvelle «liberté pédagogique d’enseignant» (qui a toujours été leur lot !) pour prendre en compte, au quotidien et autrement, les différences entre les élèves… Une remarquable tribune de Jean Houssaye, Université de Rouen, dans Libération du 25 janvier.
http://www.liberation.fr/page.php?Article=270370
Loi d’orientation : le cactus et sa fleur ?
« Assisterons-nous à la création d’une école très diverse suivant les établissements avec les avantages (adaptation plus grande à divers types d’élèves) et les inconvénients (augmentation des inégalités) ? Le système scolaire va-t-il être détruit comme le laisse penser Antoine Prost dans Le Monde (12/2/05)? Je pense, pour ma part, que les tendances homéostatiques du système scolaire le maintiendront encore pour un bon bout de temps dans une forme semblable à l’actuelle, les changement culturels demandant beaucoup de temps (plus que la durée d’un ministre) ! » Jacques Nimier fait une lecture optimiste de la loi d’orientation. Il y décèle « l’amorce d’une révolution culturelle dans la gestion de l’Education nationale… On passerait à un pilotage systémique ».
http://perso.wanadoo.fr/jacques.nimier/reflexions_loi_orientation.htm
P. Meirieu : L’Ecole a un avenir
» Ces propositions ne sont qu’une première étape dans la reconstruction nécessaire d’une utopie éducative pour faire face aux défis du XXIème siècle. Elles doivent être complétées et enrichies par tous les hommes et toutes les femmes qui croient plus que jamais nécessaire de « se souvenir du futur ». Au moment où le Parlement va débattre de la loi d’orientation, Philippe Meirieu, directeur de l’IUFM de Lyon, publie deux textes qui proposent une autre vision de l’Ecole. Un premier texte concerne le « socle commun ». P. Meirieu y distingue les savoirs transversaux et les savoirs spécifiques et propose » de fixer à chaque niveau de classe l’objectif suivant : « chaque élève devra réaliser, au cours de l’année scolaire, trois projets individuels ou collectifs, un sur chacun des champs de savoir spécifiques ci-dessus. Dans chacun de ces projets, il devra utiliser les connaissances prévues au programme de la classe et témoigner du niveau d’exigence requis par sa classe en matière de communication et de création. » ». Le second texte va plus loin puisqu’en 32 points il veut fixer « quelques principes possibles pour une éducation démocratique ». Premier principe : » L’éducation n’est pas un processus de fabrication, mais l’accompagnement de l’émergence d’un sujet libre. C’est pourquoi aucun système éducatif ne saurait être astreint à une « obligation de résultats ». En revanche, il est astreint à une « obligation de moyens » et doit rendre compte de la manière la plus transparente possible de tous les moyens qu’il met en œuvre pour lutter contre l’échec scolaire générateur de détresse individuelle et sociale, qui compromet l’avenir de la société tout entière et génère, sur la durée, d’immenses coûts sociaux ». Le texte milite pour une école démocratique qui émancipe l’élève et pour la « pédagogie du chef d’œuvre ». Deux textes sur lesquels peut se bâtir un autre avenir pour l’Ecole. Découvrez-les sur le site du Café.
http://cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/meirieu_index1.aspx
– Préface
– Le projet de loi
- – Le texte de la loi
- – Une première lecture des mesures de la loi Fillon
- – L’avis du Conseil supérieur de l’Education
- – La lecture du café : Peut-on encore s’intéresser à la loi d’orientation ?
– Les pédagogues
– Les réactions syndicales
– Les parents
– Les lycéens
– Dans la presse
– La question du bac
– La question des TPE
- – Tribune : Les TPE ou la violence
- – Tribune : Supprimer les TPE, c’est toucher à l’emblème d’une réforme réussie – Entretien avec Jacques Richard
– Le socle commun : l’analyse de P. Meirieu
– La question de la formation et des IUFM
- – Tribune : Formation des enseignants : J-L. Auduc : on tourne le dos aux besoins
- – Article : améliorer la formation initiale des enseignants
– Quelle Ecole pour l’avenir : 32 principes pour une éducation démocratique
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