Dossier spécial
Alexander, Ben Hur, Gladiator… dans le sillon des grosses productions hollywoodiennes, les concepteurs de jeux conçoivent des jeux qui entretiennent une certaine image de l’Antiquité… un domaine très à la mode ! Pouquoi ne pas s’interroger sur les raisons d’un tel engouement ?
Dans quelle mesure faut-il tenir compte, en langues anciennes, de la pratique des jeux vidéos ? Quelques manuels littéraires en ont déjà fait l’expérience : faire référence à jeu connu permet d’introduire un sujet sous un angle plus séduisant. Ce qui est possible pour le Moyen Âge doit l’être aussi pour l’Antiquité, à condition d’aborder le jeu vidéo de manière lucide, en connaissant autant que possible ses principes, ses arrière-pensées, et son fonctionnement, ainsi que les attentes qu’il est censé combler, et qui ne coïncident pas forcément avec les exigences de la pédagogie.
Certains jeux affichent une vocation directement pédagogique : le jeu est alors un moyen, et non une fin. C’est le cas de « Grèce ancienne », qui permet d’acquérir des connaissances sur l’Antiquité grecque, tout en travaillant ses mathématiques… (âge : 10 ans et plus).
http://www.lescale.net/grece/pjeu.html
Un autre jeu de civilisation est actuellement en démonstration, sur Rome cette fois : « Glory of roman empire » (galerie d’images intéressante, et vidéo de démonstration).
http://www.gamers.fr/jeu_patchs.php?id=5181
« God of war » II est prévu pour 2007. Son héros se nomme Kratos. Un simple coup d’oeil sur les images aujourd’hui publiées suffit à montrer la proximité entre ce jeu censé se rapporter à l’Antiquité, la science fiction (La Guerres des étoiles, Jurassic parc…) et l’Heroïc fantasy (Le Seigneur des anneaux par exemple). Les monstres occupent une place de choix. Finalement, l' »Antiquité » devient synonyme d’intemporalité, mêlant toutes sortes d’exotismes et de peurs.
http://www.generation-nt.com/jeux-video/14794/god-of-war-divine-retribution
D’autre part – mais cela tient à l’essence même du jeu d’action – la violence (combats de gladiateurs, guerre, etc.) occupe une place centrale. Dans certains jeux, le sang coule à flots. Cette violence est située dans un schéma répétitif (combats successifs se terminant par l’affrontement entre le joueur et un « boss », et ainsi à chaque tableau, jusqu’à la fin où a lieu le combat suprême). La littérature et l’histoire antiques n’ont rien à envier à une telle monotonie… et la littérature a tout à gagner à la comparaison. Un exemple parmi d’autres : une étude des combats de gladiateurs (et une visite aux arènes de Nîmes, qui présente une exposition sur ceux-ci) montre que les règles de ce « sport » étaient plus complexes, moins gratuites que ne le laissent entendre les jeux d’action. Cf. ci-dessus : « Gladiateurs : sur une idée reçue… »
En outre, les décors apparaissent comme relativement pauvres, réduits à quelques signes qui « font » antique (les colonnes grecques par exemple). De quoi faire écho aux ruines antiques que l’ont peut voir de nos jours, comme si ces lieux avaient été en ruines dès l’Antiquité, réduite à un vaste champ de bataille.Pour les amateurs de triglyphes ou des métopes, il y a peu à se mettre sous la dent…
http://www.playfrance.com/images-ps2-altered-beast.html
« Savage skies » se présente comme un jeu d' »epic fantasy »… Le mot est lâché : c’est « épique » ! Mais de l’épopée, le jeu retient essentiellement le rapport de force… et un manque complet de repères spatio-temporels.
http://www.adrenalinevault.com/consoles/reviews/ps2/review_temp.asp?game=savskies
Voir aussi « Civilizations at war »…
http://jouez.branchez-vous.com/actualite/06-06/10-233702.html
Il est intéressant également de noter que la référence à l’Antiquité développe favorise non seulement l’anachronisme, mais le goût pour l’anachronisme. « Asterix Et Obelix XXL 2 : Mission Las Vegum » : le titre est éloquent… « il demeure très amusant de rencontrer une statue géante de Pikmin au détour d’un jardin verdoyant, le logo de Quake habilement fondu dans un emblème romaine, ou encore une sculpture détournée du héros de Sly Racoon. Un
monde passionnément décalé, offrant une crédibilité, non par une cohérence, mais paradoxalement par ce morcellement de références totalement barré », écrit un internaute…
http://www.jeuxvideo.com/articles/0000/00005741_test.htm
Une note sous cet article, destinée aux étudiants de « Lettres classiques », joue également sur le lieu commun et l’anachronisme… Il s’agit, cette fois, du jeu « Alexander at war ».
http://www.inpactvirtuel.com/news/Rome-Total-Alexander-9657.htm?vc=1
Le jeu peut donner l’apparence de repères spatio-temporels, comme c’est le cas avec Spartan. A cet égard, la présentation générale (cliquer sur « vue d’ensemble du jeu ») est assez éloquente…
Le site de ce jeu propose une interview du concepteur.
http://www.totalwarriorgame.com/fr/
Après tout, les anachronismes et les visions déformées ne datent pas d’aujourd’hui… Et l’Antiquité fait bel et bien partie de notre imaginaire, au point que le souci de vraisemblance finisse par paraître secondaire.
Le jeu « Civcity Rome » devrait voir le jour dans le courant de l’été 2006. Quelques images peuvent être consultées à l’adresse suivante. La réalisation graphique semble intéressante… à nous de dénicher les éventuelles erreurs, ici et là !
http://www.inpactvirtuel.com/fiches/jeux/captures_du_jeu_CivCity–Rome.htm
Autre nouveauté : « God and heroes »…
http://www.mmorpgs.info/?rub=news_multi_univers&tid=14541
On le voit bien : d’un jeu à l’autre, la place du jeu par rapport au savoir peut être très différente. Sur un échantillon d’images par exemples, il est possible de faire le tri, de manière à aider l’élève à savoir quelle est la part de jeu, et quelle est la part de savoir. Cela, afin de lui rendre les repères, que le jeu oblitère, parfois, à dessein.
A lire : cet article d’un internaute joueur, sur les jeux vidéos relatifs à l’Antiquité… avec une bonne dose d’esprit critique, et aussi des erreurs, notamment sur les fonctions du mythe…
http://www.jeuxvideopc.com/articles/361-les-jeux-video-l-antiquite/