Par François Jarraud
« Sanctionner les parents n’est pas une solution ». Réagissant à la loi Ciotti qui punit les parents en suspendant les allocations familiales, l’Unaf (Union nationale des associations familiales) montre que la situation est complexe et pose la question de la responsabilité de l’Ecole. L’Unaf publie les résultats d’une enquête qualitative menée auprès d’une quarantaine de familles.
L’absentéisme a des motifs variés. « Statistiquement et officiellement mesuré par les absences non justifiées, l’absentéisme recouvre en fait une réalité plus vaste ». L’enquête établit trois grandes familles de causes. L’élève peut s’absenter parce qu’il est en difficulté scolaire et se sent humilié ou découragé par des mauvaises notes répétées. Certains ont des difficultés scolaires qui relèvent des « dys » : dysorthographie, dyslexie etc. Le groupe le plus important concerne les jeunes en difficultés psychiques. Il y a les adeptes des jeux vidéo mais aussi des jeunes influençables qui se laissent entraîner par d’autres. Un dernier facteur est l’orientation scolaire : les jeunes subissent leur orientation et font payer cette situation à l’école et à leurs parents. Parmi les facteurs accélérant l’absentéisme, les jeunes signalent les absences des enseignants et les horaires irréguliers.
Des parents concernés. Selon l’UNaf, les parents réagissent différemment mais ne sont pas démissionnaires. Certains privilégient l’échange avec leur enfant, d’autres les sanctions, seul un petit groupe excuse leur enfant systématiquement. Administrativement ils ont raison : dans la plupart des établissements le motif d’absence est considéré comme valable s’il est soutenu par les parents.
Les responsabilités de l’école. « Il est nécessaire de bien prendre la part de responsabilité des établissements scolaires…Tous les établissements ne semblent pas : prévenir immédiatement les parents, instaurer une relation de confiance, un « dialogue avec les familles », « dialoguer avec le jeune pour le responsabiliser », appliquer les sanctions préconisées », souligne l’UNaf. Mais l’association soulève surtout la question des 16-18 ans. « Il existe un manque de clarté sur ce que l’on attend des jeunes au-delà de 16 ans : de l’assiduité ? de l’autonomie ? de la responsabilisation ? La liberté est-elle toujours gérable à cet âge et quelle position « éducative » attend-on des parents dans ce cas-là ? » L’Unaf aimerait bien que les règlements des lycées s’alignent sur ceux des collèges. L’association invite les établissements à communiquer avec les parents, « à mieux relier l’établissement scolaire et les familles par des outils permettant une action rapide dès la première heure de cours « séchée » par l’élève sans attendre que la situation ne se dégrade »; à « responsabiliser d’avantage l’élève par une reformulation du cadre de fonctionnement de l’école et de la loi au regard de l’obligation scolaire et du devoir d’assiduité » ; à « accompagner les parents si besoin avant que la sanction ne tombe ».
Basée sur des cas précis, cette étude sort le débat des clichés où la majorité l’a enfermée. Bien des études ont montré la complexité de l’absentéisme scolaire et l’absurdité des dispositifs qui pénalisent les parents. La publication par l’Unaf de cette étude montre que, là aussi, on attend du gouvernement une politique qui ne soit pas guidée par le populisme mais par une prise en compte sérieuse des problèmes. La « parole des parents » rejoint ceux qui se font du souci pour l’Ecole.
Etude UNaf
http://www.unaf.fr/spip.php?article11221
Absentéisme : quelle efficacité pour la loi Ciotti ?
http://cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2010/rentre[…]
La loi Ciotti adoptée
Les sénateurs ont adopté le 14 septembre sans modification le texte voté en première lecture par l’Assemblée.
La nouvelle loi établit en son article 1er que « dans le cas où, au cours d’une même année scolaire, une nouvelle absence de l’enfant mineur d’au moins quatre demi-journées sur un mois est constatée en dépit de l’avertissement adressé par l’inspecteur d’académie, ce dernier, après avoir mis les personnes responsables de l’enfant en mesure de présenter leurs observations, et en l’absence de motif légitime ou d’excuses valables, saisit le directeur de l’organisme débiteur des prestations familiales qui suspend immédiatement le versement de la part des allocations familiales dues au titre de l’enfant en cause ». Ce n’est pas avant la constatation sur au moins un mois de l’arrêt de l’absentéisme que le versement peut être rétabli. Autrement dit, compte tenu des congés scolaires, 3 ou 4 mois plus tard.
L’amendement de la honte. Les sénateurs ont adopté également les deux amendements qui avaient durci le texte. Le premier amendement fait déduire la part supprimée des allocations familiales du calcul des ressources pour les minima sociaux de façon à réduire en cascade tous les avantages sociaux. Le second, « l’amendement de la honte » demande aux écoles et établissements de faire un rapport annuel sur leur taux d’absentéisme ce qui renforcera encore les démarches d’évitement et augmentera la concurrence entre établissements.
Un texte inefficace. Stigmatisant les familles populaires, celles qui perçoivent les allocations familiales, le texte ne semble pas à même de lutter contre l’absentéisme. L’exemple anglais,où un dispositif encore plus répressif existe depuis des années, montre qu’il n’a pas prise sur un phénomène qui a des racines variées et souvent profondes. Ce n’est pas forcément la « démission parentale » qui entraîne l’absentéisme. Et ce n’est pas en affaiblissant la famille qu’on y remédie. Des politiques alternatives existent. Mais elles ont le défaut de ne pas donner de bous émissaires aux électeurs.
La nouvelle loi
http://www.senat.fr/dossier-legislatif/ppl09-586.html
Absentéisme quelle efficacité ?
http://cafepedagogique.net/lesdossiers/Pages/2010/rentre[…]
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