Par François Jarraud
Comment lutter contre les inégalités scolaires ? En dépit de toutes les déclarations politiques sur l’égalité des chances et la volonté d’établir l’égalité, force est de constater que les inégalités perdurent quand, localement, elles ne s’accentuent pas. L’ouvrage « Un enseignement démocratique de masse. Une réalité qui reste à inventer » publié par des chercheurs belges de l’université de Louvain apporte des éclairages nouveaux sur cette problématique.
Constatons d’abord que la Belgique est une terre de fortes inégalités de résultats scolaires. Par exemple l’accès au supérieur long concerne 14% seulement des enfants de pauvres (quartile le plus bas) contre 38 des enfants de familles aisées (quartile le plus élevé). D’autres indicateurs, relevés par V. Dupriez et M. Verhoeven, montrent que les inégalités scolaires sont plus fortes en Belgique que chez les autres états européens ou même de l’Ocde.
Est-ce pour autant que les inégalités de revenu soient particulièrement fortes en Belgique. Et bien non? V. Vandenberghe montre que la Belgique peut avoir de fortes inégalités scolaires avec de faibles inégalités sociales. « Il est incorrect de penser que l’on peut facilement corriger le caractère inéquitable du supérieur belge en majorant l’aide financière aux familles » écrit-il. Pour lui l’extension de l’allocation de rentrée scolaire aux étudiants serait sans effet.
C’est donc qu’il y a d’autres facteurs tel le culturel. « Les traits hérités telle niveau de diplôme des parents, singulièrement celui de la mère, continuent d’affecter très fortement la probabilité de décrocher ce fameux sésame » notent . Verhoeven, V Dupriez,et JF Orianne.
Mais l’ouvrage a aussi l’avantage de ne pas renvoyer la faute aux seuls parents et élèves. Nos auteurs et finalement J Draelants introduisent l’établissement comme fondateur d’inégalité. Autant le discours sur l’égalité est accepté par tous les acteurs de l’Ecile, autant les enseignants sont parfois convaincus de l’inégale valeur des élèves et des vertus des inégalités. Les auteurs montrent aussi le poids des positionnements d’établissement dans la création des inégalités. Pire la réforme pédagogique pleine de bonnes intentions, peut se convertir « en marqueur négatif d’un établissement.
On retiendra de cette lecture la complexité des facteurs d’inégalités scolaires en Belgique. Et en France ? Quelle peut être la part des inégalités culturelles ? Et bien on est pas prêt de le savoir puisque les enquêtes conçues par la Depp (ministère) pour distinguer facteurs sociaux et culturels ont été annulées du fait de la crainte de certains parents de voir ces résultats utilisés par la police. Or sans statistiques sociales adieu les politiques sociales.
Mariane Frenay et Xavier Dumay, Un enseignement démocratique de masse. Une réalité qui reste à inventer, Presses universitaires Louvain 2008. »