Modification des seuils, suppression des effectifs réduits, fermeture de 2000 établissements… Ce rapport explosif « Revue de dépenses : dispositifs en faveur de la jeunesse » daté du mois d’avril de l’Inspection générale de l’éducation, du sport et de la recherche (IGESR) et de l’inspection des finances a été rendu public. Dans un contexte de baisse démographique et de rigueur budgétaire, le rapport « propose des méthodes d’optimisation de la répartition des moyens d’enseignement sur le territoire, prenant en compte les aspects démographiques à l’horizon 2027 ». L’objectif est l’optimisation des moyens du ministère de l’Éducation nationale. Le rapport de 166 pages préconise la suppression de milliers de postes et la fermeture de centaines de classes. L’esprit est à l’économie et non à l’amélioration des conditions de travail et d’enseignement au profit de la réussite de tous les élèves. Les pistes de travail de ce rapport sont des pistes d’économie et le rapport formule trois préconisations dans ce sens. Quel arbitrage sera fait pour l’École, un arbitrage politique pour ce qui a été annoncé par le Premier ministre comme la « priorité nationale » ou sera-ce un arbitrage et pilotage économique ?
1ère piste : la fermeture des classes et la suppression de postes
La première piste de travail est la rationalisation du nombre de classes en identifiant les classes « surdotées », c’est-à dire à « effectifs trop réduits » pour optimiser les taux d’encadrement ou avec les mots de la mission pour « harmoniser l’encadrement et réduire les disparités entre établissements tout en optimisant les moyens humains et matériels ». Cela représenterait la fermeture de 300 à 600 classes à l’école primaire, entre 1000 et 1450 classes au collège et la suppression de postes -entre 1380 et 1820 Temps plein. Cette option signifie concrètement de fermer des classes, de réduire les offres d’option et de dédoublement dans le 2nd degré.
La mission identifie les disparités territoriales et selon la typologie d’établissement : à titre d’exemple « en particulier, les fermetures de classes dans les académies de Bordeaux et de Normandie seraient pour des écoles publiques hors éducation prioritaire, alors que les fermetures à Créteil ou à Versailles porteraient sur des classes des écoles en REP. Les fermetures de classes en Guyane seraient en grande partie sur des classes en éducation prioritaire renforcée : sur les 39 classes fermées de l’académie, 23 seraient en REP+. »
2ème piste : relever les seuils de dédoublements en éducation prioritaire
La deuxième piste d’économie est d’augmenter les seuils de dédoublement en éducation prioritaire. « Un relèvement du seuil de dédoublement des niveaux CP, CE1 et CP-CE1 se traduit par des fermetures respectives de 117, 377, 839, 1548 et 2359 classes pour des seuils de dédoublement de 13, 14, 15, 16 et 17 élèves par classe dans 3 %, 10 %, 20 %, 34 % et 47 % des écoles respectivement. » Les académies les plus touchées seraient alors les académies de Guyane, de Montpellier, de Reims, de Toulouse, de Versailles et de Lyon.
L’argument de l’absence d’effets positifs sur les apprentissages est avancé et « la mission estime en conséquence qu’un relèvement raisonné de ce seuil peut être modélisé ». Se dirige-t-on vers la fin du dédoublement des classes de Grandes Section au CE1 en REP ? Les 16 686 créations de postes TP depuis 2017 représentent un coût d’emploi de 800 millions d’euros par an.
3ème piste : réorganiser le maillage territorial des écoles et des collèges
La mission propose de réorganiser le maillage territorial selon la démographie scolaire et d’ajuster l’offre éducative « dans une recherche de meilleure cohérence du nombre d’élèves par établissement au niveau national et en prenant en compte le temps de trajet d’un élève à son établissement ». Cette piste entrainerait 1925 fermetures d’écoles et 33 collèges.
Ces pistes de travail sont laissées « à disposition du Ministère de l’Éducation nationale ». Selon le rapport, « les perspectives démographiques à court et moyen terme peuvent en effet justifier une réduction des moyens d’enseignement nécessaires ». Une autre nécessité ou une possibilité ne serait-il pas de profiter de la baisse démographique pour baisser les effectifs des classes, et améliorer les conditions de travail et d’enseignement ? La France est un pays où les effectifs des classes sont plus élevés en moyenne, les salaires plus bas et le temps de travail plus important.
Djéhanne Gani
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