Deux livres originaux ! Le premier imagine une vie immobile, coincé dans le pli d’un livre. Le deuxième pose de drôles de questions.
Drôles de questions, de Mac Barnett, ill. Christian Robinson, Ed. Les Arènes Jeunesse
Ca commence par une question facile : Combien d’animaux voix-tu sur cette image ? L’illustration, sympa, présente un arbre sur lequel l’enfant se plait à chercher et dénombrer petites et grosses bêtes réparties ici et là. Facile, se dit-on ! Nous voilà avec un album à compter, on connaît ! Mais dès la deuxième page, ça se complique : Combien d’animaux sont cachés parce qu’ils ont peur de tigre ? On a beau scruter l’illustration… rien ! Il va donc falloir lire au-delà de l’image, et imaginer qui pourrait bien se dissimuler. Retour en ville avec une voiture de police et une enquête qui pointe son nez : Laquelle de ces femmes vient de voler une banque ? L’écolière avec son cartable, la duchesse à grande coiffe, la femme enceinte, la mémé au foulard à fleurs ? Aucun indice direct, à chacun d’élaborer ses hypothèses. Et ainsi de suite pour ces drôles de questions sans réponse explicite dans l’image au trait naïf, de papiers découpés et taches de gouaches texturées. Des visions poétiques d’un éléphant à la plage, une vache dans une éolienne, des brigands à cheval au soleil couchant, une porte dans la montagne… Pour faire courir l’imagination et discourir avec bonheur des réponses que chacun voudra donner.
Et si NoNo, de Inbar Heller Algazi, Ed. Les Fourmis Rouges
Nono a un problème. Son doigt est coincé. Là. Juste là. Dans le pli de ton livre. Zut. A partir de là s’élabore toute l’histoire de Nono et de sa vie qui va se dérouler, immobile, autour du pli du livre et de ce doigt coincé. Car si Nono ne peut pas se libérer, il faudra bien trouver un jeu pour l’occuper, lui apporter à manger, le protéger des moustiques la nuit, du froid de l’hiver, lui apporter ses devoirs… Et s’il grandit là, il faudra qu’il construise sa vie autour de ce doigt coincé ! Maison, famille, jusqu’à ce qu’il devienne un vieux papi… Une vie entière qu’on imagine pour ce pauvre Nono qui ne semble vraiment pas malheureux, entouré de petits lapins adorables. Le rapport texte image est délicieux : aux « Et si… » du texte répondent les illustrations toutes de tendresse et de couleurs flash, dans lesquelles les petits lapins jouent avec des cubes, apportent des carottes, arrivent avec leurs cartables. C’est à la fois farfelu et très mignon. Et la chute est parfaite pour mettre le doigt (oui, c’est bien le cas de le dire) sur ce qui se passe parfois dans sa tête : on part d’une idée et l’imagination s’emballe.
Marianne Baby