Le 19 octobre dernier, la Grande Lessive appelait écoliers, collégiens, lycéens à envahir l’espace public avec des productions artistiques sur le thème de l’eau, « Avec ou sans eau ». Plus de 3 000 collectifs ont participé, des écoles et établissements, mais aussi des conseils de quartiers, des centres sociaux, des EHPAD. En France et à travers le monde. Depuis plus de douze ans, Arnaud Mermet, conseiller pédagogique à Dakar, entraine ses collègues dans l’aventure de la Grande Lessive. « Dès que j’ai connu l’existence de la grande lessive, j’ai trouvé l’idée géniale, pas compliquée à faire et réunissant des millions de gens autour de la création ! » explique-t-il. Carole Le Bihan, enseignante à l’école Maurice Nordman à Paris, la grande lessive, c’était avant tout un acte militant, « pour montrer ce qu’il se passe de bien au sein de l’école publique ».
Arnaud Mermet est professeur des écoles et formateur dans le réseau AEFE depuis vingt ans. Il est en poste à Dakar depuis plus de deux ans, après avoir enseigné en Mauritanie, au Liban… Cela fait douze ans qu’Arnaud propose à ses collègues enseignants et enseignantes de participer à la Grande Lessive. « Depuis mon arrivée à Madagascar en 2011, j’ai mis en place, dans chaque école où j’ai travaillé, la grande lessive avec des formations et un accompagnement pour chaque thématique proposée », nous raconte-t-il. « Une majorité des classes y ont participé, mais malheureusement certaines enseignantes et certains enseignants ont encore peur de se lâcher dans ce genre de projet. Il y a encore l’idée terrible qu’on est doué ou pas en arts plastiques et qu’on peut ou pas mal l’enseigner ». Selon lui, la Grande Lessive permet de « laisser créer les élèves en réfléchissant ensemble à la problématique artistique et aux messages que l’on veut faire passer ».
Pour valoriser l’école
À l’école Maurice Nordman de Paris, la grande lessive, c’est une affaire de quartier. Cela fait trois ans que toute l’école maternelle de cinq classes participe deux fois par an à la Grande Lessive. « Il y a trois ans, on nous a dit qu’il y aurait une possible fermeture de classe – avec une fuite vers le privé et vers une école d’un autre arrondissement. En équipe, on a réfléchi à comment rendre plus attractive notre école, comment la valoriser.. La Grande Lessive s’est imposée à nous. C’était finalement un acte militant » raconte Carole Le Bihan, enseignante dans l’école. « La Grande Lessive permet de faire sortir l’école de ses murs, d’être dans la rue, dans le quartier ».
Depuis 2020, l’équipe associe les parents au projet. « Les parents connaissent bien les commerces du quartier, on leur a donc proposé de demander que les productions de nos élèves, leurs enfants, soient affichées dans les commerces environnants. Ils ont joué le jeu. Depuis, au lieu de durer une seule journée, l’exposition reste pendant toutes les vacances dans les commerces ».
L’année dernière, Carole Le Bihan avait une classe de PS/GS. Lorsque le thème de la Grande Lessive était « Ma cabane et/est la tienne », ses grandes sections ont fabriqué une cabane, qu’ils ont photographiée. « J’ai ensuite imprimé la photo sans bordures, ils ont retravaillé le cadre et on a étendu ces productions ». Pour les petites sections, il s’agissait d’inventer la cabane d’Albert, le poisson rouge de la classe. « Je leur ai proposé un dessin de poisson, ils ont imaginé sa maison ».
À Dakar, chaque production était différente, « chaque classe comprenant diversement la thématique proposée avec des références culturelles de l’enseignant ou l’enseignante et des élèves composites ». Le 19 octobre dernier, chaque classe participante a accroché ses œuvres sur les cordes dans la cour, « toutes les classes qui le veulent visitent l’exposition de toutes les classes participantes et en fin de matinée les portes s’ouvrent pour les parents qui visitent avec leurs enfants la grande lessive, c’est un moment de convivialité, de vivre ensemble et d’échanges autour de la création et de la vie de l’école », précise Arnaud.
Lilia Ben Hamouda