C’est une Note très originale que la Depp, division des études du ministère, publie le 4 juin. Elle est consacrée à « la carrière des enseignants en Europe ». Nous n’avons pas retrouvé de Note antérieure sur ce sujet à la Depp alors même que la source, une étude européenne d’Eurydice, en est à sa troisième publication. Cet intérêt soudain pour la situation des enseignants dans les autres pays européens renvoie aussi aux politiques françaises…
Qu’en est il de la formation continue obligatoire ?
La Note d’information de la Depp synthétise les principaux points de l’ouvrage publié par Eurydice, le système statistique européen, en février : » Les carrières enseignantes en Europe: accès, progression et soutien ». Mais les thèmes abordés renvoient aux débats très actuels sur l’éducation en France
Ainsi, » le développement professionnel continu est obligatoire et avec un nombre d’heures défi ni pour tous les enseignants en primaire et secondaire dans près de la moitié des systèmes éducatifs (21 sur 43) », ce qui renvoie directement au débat sur la loi BLanquer. Rappelons qu’en France il n’est obligatoire que dans le premier degré. La Depp akoute , en se basant sur Talis, que » le caractère obligatoire de la formation continue n’entraîne pas automatiquement un fort taux de participation des enseignants. À l’inverse, certains pays présentent un taux élevé sans pour autant imposer aux enseignants de participer à des actions de formation continue ». A noter que le choix des thèmes de formation est le plus souvent effectué au niveau local. « Dans 28 systèmes éducatifs, les écoles bénéficient de subventions des autorités publiques pour la fourniture de leurs propres activités de FPC ».
Eurydice aborde aussi la question de l’indemnisation de ces formations, un sujet qui va bientot se poser en France de façon vive si la formation continue devient obligatoire et hors temps scolaire comme cela est prévu par la loi Blanquer. La Depp oublie de le signaler mais cette formule est loin d’être majoritaire en Europe : « Les enseignants peuvent assister aux activités de FPC pendant leurs heures de travail dans 36 systèmes éducatifs » (sur 41).
Des enseignants fonctionnaires ?
La Note aborde aussi l’évaluation des enseignants, sujet qui va évoluer avec la loi de transformation de la fonction publique. » Au sein de l’établissement, cette responsabilité incombe au chef d’établissement dans plus des trois quarts des systèmes éducatifs, tous niveaux confondus », note la Depp qui ajoute que dans la majorité des systèmes cette responsabilité est partagée par le chef d’établissement avec un autre acteur. « Les évaluateurs ont de plus en plus recours à l’autoévaluation des enseignants comme source complémentaire d’information. Tandis que cette pratique était peu répandue en 2011-2012 (seuls 20 % des systèmes éducatifs étaient engagés dans cette voie), elle est utilisée dans plus de la moitié des systèmes en 2016-2017 et imposée dans un tiers des pays », note la Depp.
La loi de transformation de la fonction publique et la loi Blanquer donnent aussi plus de pouvoir au chef local pour le recrutement des enseignants. » Dans le modèle majoritaire, les établissements scolaires occupent le rôle d’employeur des enseignants en poste. Ils sont directement responsables de la nomination des enseignants, ils définissent leurs conditions de travail (souvent en collaboration avec d’autres partenaires) et veillent au respect de ces conditions », note la Depp. Mais c’est que le système d’un corps national avec recrutement par concours est minoritaire en Europe. Evidemment le développement de la contractualisation (prévu par la loi de transformation) devrait remettre ce système en cause. La note de la Depp montre que le statut de fonctionnaire est minoritaire en Europe.
Le relativisme tranquille de cette intéressante Note s’arrête sur une question qui concerne la carrière des enseignant et qui a fait l’objet d’un autre ouvrage d’Eurydice cette année : il s’agit des salaires enseignants. On y voit une Europe coupée en deux avec l’est qui affiche des salaires nettement inférieurs à l’ouest. Mais quand on regarde de plus près on voit que 24 systèmes éducatifs européens sur 41 payent leurs enseignants mieux que la France. Ainsi pour les professeurs des écoles, le salaire de départ en France est de 23 401€ . Il n’est que de 8493€ en Bulgarie. Mais il est de 44 327 € en Allemagne, 31 879en Espagne, 58 476 au Luxembourg, 47 591 en Suisse, 31 336 aux Pays Bas etc.
F Jarraud