Par François Jarraud
Le ministère publie les résultats d’une enquête menée par Nadine Esquieu (DEPP) avec le soutien de la MGEN sur la perception de leur métier par les chefs d’établissement. Elle montre un fort pessimisme des chefs d’établissement sur l’avenir du système éducatif. Mais on retiendra aussi que les chefs d’établissement veulent être les pilotes de leur établissement tout en s’affranchissant de la gestion des personnes…
Un large pessimisme
71% des chefs d’établissement sont pessimistes sur l’avenir du système éducatif. C’est sans doute le principal résultat de cette enquête menée en 2010 par Nadine Esquieu auprès de 500 chefs d’établissement. Les personnels de direction ont le sentiment de travailler plus qu’avant (même ceux qui ont peu d’ancienneté) et de manquer de moyens et de marges d’initiative. Seuls 38% sont satisfaits de leur degré d’autonomie. Ils sont insatisfaits sur leur charge de travail et soumis au stress.
Une perception irréelle de leur rôle
L’écart entre le métier réel et le métier rêvé est parfois important. Les chefs d’établissement veulent être des pilotes, ils veulent être responsables du dynamisme de leur établissement. Ce sont les deux premiers traits qui les caractérisent et dans le métier idéal la dimension « pilote » est très majoritaire. En même temps il refusent d’être responsables de la gestion des ressources humaines et n’ont pas d’intérêt pour la psychologie de l’enfant. Si aujourd’hui la coordination pédagogique des enseignants est leur première activité dans le métier idéal ils se voient réfléchir au pilotage et penser la stratégie de leur établissement. C’est donc pus une dimension intellectuelle de leur rôle qui les attire que la gestion réelle de l’établissement. Et c’est un peu problématique…
Des profils différents
L’enquête fait apparaitre des profils différents de chefs d’établissement. Globalement ceux qui exercent dans les établissements les moins faciles sont plutôt plus satisfaits de leur rôle. Les plus jeunes , formés sous Chirac et Sarkozy, sont insatisfaits car ils rejettent à la fois la gestion des enseignants et la présidence des conseils dans l’établissement. Ils voudraient consacrer leur temps au projet d’établissement et aux relations avec les inspecteurs d’académie. Ce sont eux qui flottent le plus dans une conception irréelle du métier.
Quelques inquiétudes
C’est avec ces cadres que la refondation de l’Ecole doit se faire. Or, ce que ne dit pas l’étude, c’est la distance entre les fonctions réelles du chef d’établissement autonome et le métier dont rêvent les chefs d’établissements. Et cela tout en demandant fortement une large autonomie. La revendication du pilotage, délesté de la gestion des hommes et des élèves, semble particulièrement problématique. La conception du métier comme l’exercice d’un pilote bâtissant un projet s’oppose à la seule conception valable dans un système d’établissements autonomes : le partage du pilotage. Comment refonder l’Ecole avec ces conceptions surtout quand elles sont alliées à un fort pessimisme ?
François Jarraud
L’étude
http://cache.media.education.gouv.fr/file/201/23/2/DEPP-Dos[…]
Les CPE sont encore plus pessimistes sur l’avenir du système éducatif que les chefs d’établissement. Ils sont encore plus décalés entre le métier qu’ils voudraient faire et celui qu’ils sont amenés à faire. Frustrations et découragement sont les principaux enseignements de l’enquête réalisée par Nadine Esquieu publiée dans les Dossiers de l’éducation nationale. De quoi interroger la refondation.
Pessimistes à 83%
83% des CPE sont pessimistes sur l’avenir du système éducatif. Ceux qui cherchent à savoir pourquoi la refondation patine ont intérêt à prendre conscience de l’humeur des troupes. Après les chefs d’établissement, l’enquête de N Esquieu dresse le portrait d’une catégorie qui n’existe que dans le système éducatif français et où le mal-être est profond : les CPE. La moitié d’entre eux souffre d’un profond manque de reconnaissance. Il faut y ajouter un sur cinq qui estime que les enseignants ne s’intéressent pas à eux. 78% déclarent vivre dans le stress.
Pédagogues contrariés
C’est sans doute le métier où l’écart est le plus fort entre métier réel et métier attendu. Que font les CPE : gérer des conflits, faire appliquer le règlement. « Ils sont absorbés dans la gestion quotidienne des difficultés de tous ordre mais souhaiteraient intervenir sur des missions plus pédagogiques ».
Que voudraient-ils faire ? Ils veulent un rôle social et pédagogique. Ils veulent « contribuer à la pertinence de l’action éducative de l’établissement » et « y développer des enjeux sociaux ».
Plus diplômés que leurs chefs
Les CPE semblent plus conscients de la vie réelle des établissements. Ils perçoivent davantage la dégradation de la vie scolaire, sentiment qui l’emporte alors que les chefs d’établissement se bercent de douces illusions. Plus diplômés que les chefs d’établissement, les CPE ne semblent pas attitrés par le modèle de la direction dans lequel on veut les faire entrer. Leurs rêves sont ailleurs. Inaccessibles ? CPE, un métier impossible…
François Jarraud
L’étude
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