Par Blandine Raoul-Réa
Encourager à essayer… Olivier Le Deuff que les professeurs documentalistes lisent à travers son site « Le Guide des égarés » ou sur Cactus Acide, a créé un document partagé, ouvert à tous. Pourquoi ? Et pourquoi pas ? Nous sommes allés lui poser les questions quant à cette démarche.
Briser la solitude ? Motiver l’expérimentation ? En tout cas partager, oui
Café Pédagogique : Olivier Le Deuff, vous lancez l’ouverture d’un document partagé sur la plate-forme google pour répertorier les projets innovant des enseignants. En quoi cet outil peut-il bien être utile alors qu’il existe des banques de données de scénarios pédagogiques un peu dans toutes les académies ?
Olivier Le Deuff : L’objectif est différent. Il s’agit de projets non finalisés pour la plupart. Le but est donc d’exposer ses envies et ses expérimentations et de se dire qu’on n’est pas seul dans ses tentatives et sa volonté d’innover dans les pratiques.
Café Pédagogique : Pourquoi cet outil ? Quelle continuité lui donner avec les réseaux.
Olivier Le Deuff : L’idée m’est venue en consultant un blog en anglais qui recensait des idées pour la rentrée et qui avait procédé de la même manière via un google doc. La liaison avec twitter est celle de la contagion des idées tout simplement. L’objectif est de transmettre en quelque sorte le virus de l’expérimentation innovante via le réseau twitter. Le choix de google doc est un choix parmi d’autre. La piste du wiki ou tout autres alternatives collaboratives était également valable. Le lien avec le site cactus acide n’est pas établi de manière nette car je ferais plutôt la synthèse sur mon site perso, le Guide des Egarés. C’est aussi l’occasion pour moi de m’interroger à nouveau sur le projet cactus acide qui stagne et que j’aimerais bien relancer autour d’une équipe de jeunes enseignants et notamment de jeunes lauréats du capes de documentation.
Café Pédagogique : Qu’attendez-vous de cette liste ?
Olivier Le Deuff : L’objectif est un recensement d’actions variées et multiples qui sortent des pratiques habituelles. Cette liste permet aussi de démontrer ce qu’on peut faire de manière simple avec les nouveaux outils du numérique. J’espère également que la liste recensera un nombre suffisant d’idées pour en inspirer d’autres. L’objectif c’est de partager des idées et des initiatives pour en faire émerger d’autres. Cette liste doit, en premier lieu, être utilisée comme source d’inspiration, dans un second temps comme incitation à échanger et à mutualiser. Finalement, la réflexion et l’écriture relatant la mise en place de projets n’est pas si courante chez les enseignants.
Café Pédagogique : Ne faudrait-il pas ouvrir en parallèle un outil de discussion et d’échange ? Twitter remplira-t-il cette fonction ?
Olivier Le Deuff : Twitter permettra d’avoir des retours ponctuels. Il sera bien sûr également intéressant que les protagonistes effectuent des retours sur leurs projets via des blogs ou tout autre moyen. L’intérêt vient en effet de la mise en visibilité du processus et des traces de constitution d’un projet. Cela permet de mieux décrire les obstacles et éventuels échecs. Pour les profs-docs, cette mise en visibilité n’est pas nouvelle. Mener des actions voire des séances quand d’autres sont présents est une habitude. C’est aussi une logique documentaire, dans les deux sens du mot document, à la fois comme support “enseignant” et d’enseignement et comme ressource accessible.
Café Pédagogique : Que peut-on « promettre » aux contributeurs ? Une valorisation de leurs projets ?
Olivier Le Deuff : Personnellement, je ne promets rien. Au-delà de la valorisation de leurs projets, l’objectif est qu’ils parviennent à obtenir des résultats encourageants pour eux et pour leurs élèves.
Café Pédagogique : Utiliser les outils en ligne de mutualisation contribuera-t-il à modifier les pratiques pédagogiques ? Comment voyez-vous ces changements ?
Olivier Le Deuff : Je crois que la mutualisation et le partage peuvent s’effectuer de manière internationale via le web. Ensuite, c’est aussi une manière d’évoluer en dehors des carcans habituels que sont notamment les programmes et manuels. Les carcans sont tous les cadres qui s’imposent à l’enseignant : ils sont de plusieurs types : institutionnels (programme, heures allouées, emploi du temps, etc.), matériels (salle, équipements, manuels), socioculturels. Ils sont donc souvent autant des atouts que des obstacles. Les outils du numérique permettent de s’affranchir de quelques uns. Il reste néanmoins que je milite pour une formation à ces outils qui dépasse les seuls usages pour aller vers une maîtrise technique plus importante et la possibilité de créer des dispositifs et des ressources réellement pédagogiques.
Cela signifie que de nouvelles manières d’enseigner vont également influer sur les contenus à transmettre. Je ne crois pas non plus aux dispositifs administratifs tels que les livrets de compétences ou autres qui figent plus qu’elles ne font évoluer les pratiques. Il reste le point crucial de la formation des enseignants qui ont tout de même besoin d’apprendre à exercer ce métier. Par conséquent, des dispositifs informels sont fort utiles au niveau de la formation continue mais ils le seraient encore davantage si les enseignants recevaient à la base une formation plus poussée en ingénierie pédagogique.
Sinon, je ne crois pas à l’idée d’une société de l’information et encore moins aux idéologies qui l’accompagnent. Je lui préfère l’idée d’une culture de l’information et de cultures participatives.
Lien vers le document partagé
https://docs.google.com/document/edit?id=1EUqeK-Ly_xcIpNbyZmerS4uQ-0BJt9TeFuJ9XyvUms0&hl=fr#