Par François Jarraud
Chercheurs, parents, syndicats : les nouveaux programmes du primaire suscitent un large rejet. Le ministre s’obstine.
« Votre projet de programmes est marqué par l’inadaptation des contenus, par un affaiblissement de leur dimension culturelle et par une conception mécaniste des apprentissages ». Sous le titre « copie à revoir », un appel est lancé contre les futurs programmes du primaire.
Parmi les signataires on relève les noms de Remy Brissiaud, Bernard Devanne, François Dubet, Agnès Florin, Philippe Joutard, Claude Lelièvre, Jean-Emile Gombert, Philippe Meirieu, André Ouzoulias, Bruno Suchaut. L’appel est aussi signé par les dirigeants syndicaux (Snuipp, Sgen, Se-Unsa), d’associations professionnelles (Ageem, Afef), de mouvements pédagogiques (Gfen, Crap, Icem, Ancp, Cemea etc.), de parents (Fcpe), de la Ligue de l’enseignement etc.
Ils dénoncent » un appauvrissement sans précédent des apprentissages et des objectifs, à commencer par la lecture et l’écriture ». Pour eux, « loin de contribuer à la réussite de tous les élèves, il pénalisera de fait ceux qui ont le plus besoin d’école. Il ne favorisera pas la maîtrise de l’ensemble des connaissances et des compétences que l’école se doit de faire acquérir à tous les élèves. Il tourne le dos à l’ambition des programmes de 2002 qui était de doter tous les élèves des outils nécessaires pour réussir au collège ».
L’Appel
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lexpresso/Pages/2008/03/appel19.aspx
Le dossier du Café sur les programmes du primaire
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lesdossiers/Pages/2008/Programmesdu[…]
Le reportage du Café
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lexpresso/Pages/02042008_confpressea[…]
La pétition contre les programmes
http://www.programmesecoleprimairecopiearevoir.org/?petition=3
Pierre Sève : « de l’instruction sans éducation »
De nombreux spécialistes ont pris position contre ces programmes du primaire. Après R. Goigoux, R. Brissiaud, G. de Vecchi, Pierre Sève, IUFM d’Auvergne, dans une tribune sur le site du Café, estime que, en français, « la philosophie de ces « nouveaux » programmes tend à opposer étude de la langue et pratiques langagières, considérant que les pratiques langagières ne seraient que le terrain d’application des savoirs sur la langue ».
Il souligne que « la référence à la littérature paraît une révérence prise en compte à regret… L’interprétation disparaît. Il n’apparaît donc aucune allusion à la littérature comme socialisation des émotions, comme laboratoire de la compréhension (des processus d’élaboration à ceux d’intégration), comme expérience singulière du langage. Le sort fait à la poésie est particulièrement emblématique : occasion de retenir des mots évocateurs ou « amusants » en Grande Section (p. 21), elle disparaît (ou plutôt elle est réduite à la récitation) jusqu’au Cours Élémentaire 2 où l’on ne trouve qu’une proposition d’ « écrire un texte poétique en obéissant à une ou plusieurs consignes précises » (p. 29, c’est nous qui soulignons). Rien, donc sur l’invention propre des élèves, la patiente mise au jour des appétences langagières propres des élèves… Ainsi, quel que soit le domaine du français, langue, langage et parole sont clivés. Et, au mépris de toutes les avancées en épistémologie (comme en didactique), la langue domine le langage et la parole n’a point de place. C’est partout un appel à l’obéissance de la « règle » et au respect des normes. Qu’il s’agisse de lecture, d’écriture ou d’étude de la langue, le scénario est clair : le maître sait, les élèves appliquent, le maître contrôle. De pensée, point. De curiosité, moins encore. De l’instruction sans éducation ».
La tribune de P. Sève
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Des programmes qui renforcent l’échec pour C. Tauveron
« Que dirait-on d’un ministre de la santé qui, visant la diminution de la mortalité, imposerait aux médecins le retour à la saignée et au bain de siège ? » C’est la question que pose Catherine Tauveron, professeur d’université et spécialiste de la didactique du français, à la lecture des nouveaux programmes de français du primaire. Son analyse est sévère. Elle estime qu’ils « renforcent les attitudes précisément pointées dans PIRLS comme à l’origine des difficultés (des élèves français)… Comment pense-t-on former des enfants près à entrer en 6ème et, au-delà, à devenir des citoyens autonomes et avisés en ne sollicitant en eux que le copieur, le répétiteur, le régurgiteur, en les mettant constamment en sous-régime, autour de basses œuvres, tout en les forçant, paradoxalement, à digérer un programme grammatical démentiel…, alors même qu’on n’a jamais pu démontrer une quelconque liaison entre enseignement grammatical classique et performances langagières orales ou écrites ? »
Catherine Tauveron avait participé à la mise en place des programmes de 2002 et sa critique des futurs programmes pèsera dans le débat.
Sur le Café, l’article de C. Tauveron
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G. de Vecchi : Morale et philosophie
Le retour de l’instruction morale voulu par X. Darcos va-t-il définitivement enterrer les efforts que font les enseignants pour éduquer les jeunes au vivre ensemble ? « Puisque la morale appartient à la philosophie », écrit Gérard de Vecchi, formateur IUFM, « instaurons des moments de philosophie ». Que les maximes sortent de la bouche des élèves…
Lire l’article de G de Vecchii
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Histoire-géo : Le futur programme d’histoire-géographie analysé par les chercheurs
Micheline Roumégous et Pascal Clerc, géographes, analysent les nouveaux programmes d’histoire-géographie du primaire. Ils en dénoncent les insuffisances. » Ce programme est, avant tout, un formidable déni de toute la réflexion menée depuis trente ans au moins par des « spécialistes », des « experts », sur les modalités d’apprentissage, de mémorisation, et, bien sûr, sur la géographie scolaire, jamais confondue avec la géographie de référence. « La portée réelle des intentions » ne fait pas de doute : une formidable régression, pédagogique, disciplinaire et didactique ».
L’APHG, qui regroupe les professeurs d’histoire-géographie, a pris position contre un programme qui « ne tient compte ni du temps attribué ni de la diversité des élèves (sociale, familiale, psychologique) et se perd dans des objectifs inadaptés à des enfants de 12 ans »
Lire l’article
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Une consultation qui tourne à la révolte
Depuis quelques jours, les enseignants se réunissent dans les écoles pour faire remonter leurs analyses des programmes et parfois nous communiquent leur sentiment. Mais ils ne sont pas les seuls. Le Café publie des témoignages qui donnent la température au sein des équipes de conseillers pédagogiques dans deux départements, ces professionnels chargés d’aider les enseignants à appliquer les programmes.
Et puis il y a tous ceux que nous ne publions pas. « Nous souhaitons connaître le positionnement de notre hiérarchie ». Cette interrogation, lancée par des enseignants franc-comtois, souligne le sentiment d’une rupture idéologique apportée par les nouveaux programmes du primaire.
De nombreux établissements ou groupes de formateurs nous ont fait parvenir le compte-rendu de la consultation. Tous soulignent que « ces programmes nient les recherches en didactique et en psychologie cognitive » (91) ou affirment « le caractère rétrograde de la conception pédagogique » (Alpes Mmes). Les maîtres regrettent qu’on cherche « à apprendre sans comprendre » ou dénoncent « une confusion entre connaissance et intelligence ». Les textes sont souvent adoptés à l’unanimité et signés nominativement. Quelque part la consultation tourne aux cahiers de doléances…
La mobilisation est aussi visible grâce à la pétition lancée par les « 19 » : en trois jours elle a déjà dépassé les 15 000 signatures en quelques jours.
Lisez les témoignages recueillis par le Café
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Signer la pétition
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Le Snuipp demande une consultation « sincère »
« Comment porter une appréciation sur un programme de mathématiques ou d’histoire si le volume horaire hebdomadaire attribué peut varier du simple au double ? » écrit Gilles Moindrot dans une lettre ouverte à Xavier Darcos.
Le secrétaire général du Snuipp relève que faute d’indication sur les horaires des disciplines, la consultation lancée par le ministre souffre « d’un manque de franchise et de confiance vis-à-vis des enseignants des écoles ». Le Snuipp demande la publication immédiate de ces horaires.
Le snuipp
Le CSE rejette la suppression des samedis matin
Selon l’AFP, le Conseil supérieur de l »éducation aurait rejeté le 20 mars le projet de décret supprimant les cours du samedi matin et organisant la réutilisation des heures d’enseignement libérées. 31 voix se sont portées contre le texte (Snuipp, Fcpe, Fsu), 19 pour (Sgen Cfdt) et 14 se sont abstenues (Se-Unsa). Le Sgen et le Se-Unsa avaient signé un relevé de conclusions avec le ministère en préparation du décret. Les avis du CSE sont consultatifs.
Dépêche AFP
http://www.vousnousils.fr/page.php?P=data/autour_de_nous/l_ac[…]
Sur le Café, la signature
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