Par Christophe Jaeglin
La réforme du collège inquiète énormément les professeurs d’allemand, ainsi que les professeurs de LRA. Plus encore que le fait de voir les heures d’enseignement se réduire en peau de chagrin et de devoir dorénavant assurer un service sur deux voire trois établissements, c’est la disparition des classes européennes et des 6èmes bilingues, jugées « élitistes » qui choquent les professeurs d’allemand.
C’est sous le titre « Non à la mort programmée de l’allemand ! » que plusieurs associations dénoncent les conséquences jugées catastrophiques de la nouvelle réforme du collège sur l’enseignement de l’allemand en France. Le sort des classes européennes semble scellé, supprimées pour élitisme, mais ce n’est pas tout. C’est également le devenir des classes bilangues qui mobilise les enseignants de collège. Celles-ci ne s’ouvriront plus qu’à partir de la 5ème et non à partir de la 6ème à l’exception des classes accueillant des élèves ayant commencé l’allemand à l’école primaire. En effet, le nouvel arrêté relatif à l’organisation des enseignements dans les classes de collège, qui comprend la nouvelle grille horaire, précise dans l’article 8 que : « Les élèves qui ont bénéficié de l’enseignement d’une langue vivante étrangère autre que l’anglais à l’école élémentaire peuvent se voir proposer de poursuivre l’apprentissage de cette langue en même temps que l’enseignement de l’anglais dès la classe de sixième. Le cas échéant, une dotation horaire spécifique peut être attribuée à cette fin. »
Grille horaire
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Documents/docsjoints/arretecol[…]
Mais on sait que de moins en moins d’élèves sont concernés par l’apprentissage de l’allemand en primaire. De nombreux professeurs d’allemand dénoncent avec cette suppression des classes bilangues un bond en arrière d’une quinzaine d’année. En effet, pour l’ADEAF (Association pour le Développement de l’Enseignement de l’Allemand en France), ce sont ces classes bilangues dès la 6ème qui ont permis de maintenir l’enseignement de l’allemand. L’association publie des chiffres et des témoignages sur son site, ainsi qu’une revue de presse édifiante :
http://adeaf.net/spip.php?rubrique28
Bien que l’horaire de LV2 ait été relevé en passant de 2 heures hebdomadaires dans la première version de la réforme, à 2h50, et malgré la généralisation de la LV2 en 5ème, de nombreux professeurs d’allemand ont peur de se retrouver sur trois établissements différents. Une situation déjà désagréable pour tout enseignant mais qui, compte tenu de la rareté de l’allemand, peut sérieusement compliquer la vie d’un enseignant. Les associations demandent aussi le respect du traité franco allemand. Ainsi Pierre-Yves Le Borgn’, député (PS) des Français de l’étranger et président du groupe d’amitié France-Allemagne, a dénoncé cette situation en s’adressant à la Ministre de l’Education.
http://www.pyleborgn.eu/2015/04/reforme-du-college-et-apprentissage-[…]
Des syndicats appellent à la grève. La pétition à l’initiative de l’ADEAF a récolté plus de 24000 signatures en deux semaines à peine, et d’autres pétitions et actions sont en cours…
http://www.petitionpublique.fr/PeticaoVer.aspx?pi=rcADEAF
De nombreux acteurs du franco-allemand, dont M. Joachim Umlauf, Directeur de l’Institut Goethe de Paris, estiment que les dispositions prises vont à l’encontre des accords binationaux, signés ces dernières années. La polémique enfle sur le sujet et notre ex-Premier ministre et ex-collègue Jean-Marc Ayrault critique lui aussi les dispositions prises à l’encontre de l’enseignement de l’allemand, dans une lettre adressée à Mme la ministre de l’Education datant du 02 avril. Il y fait notamment référence à l’intervention du député P-Y Le Borgn’ et écrit que la promotion de l’apprentissage de l’allemand est « au cœur de la coopération franco-allemande ». Il y exprime également ses craintes quant à la suppression des sections européennes :
http://www.lesechos.fr/politique-societe/societe/0219362026-ayrault-s[…]
D’autres articles paraissent également Outre-Rhin, où l’annonce des dispositions de la réforme commence à inquiéter nos amis allemands. La célèbre FAZ (‘Frankfurter Allgemeine Zeitung’, Michaela Wiegel, correspondante à Paris) craint que dans les années à venir les universités franco-allemandes et les organismes tels que l’OFAJ viennent à manquer de candidats suffisamment versés dans la langue allemande. Le secrétaire général de l’OFAJ, Markus Ingenlath a quant à lui préciser qu’il saluait la volonté de la ministre d’instaurer l’apprentissage de l’allemand dès le début de l’école primaire, mais déplore que dans cette réforme l’on confonde politique éducative et politique sociale.
http://www.faz.net/aktuell/politik/ausland/europa/frankreich-kuerzt-d[…]
La journaliste Christine Longin de la «Saarbrücker Zeitung » du 15.04 craint que la réforme du collège risque à long terme de mettre en péril les acquis de l’amitié franco-allemande, tels que les échanges transfrontaliers d’élèves.
http://mobil.saarbruecker-zeitung.de/nachrichten/themen/Themen-des-Ta[…]
Gageons que ce ne sont là que les premiers articles et que la polémique risque encore de gonfler dans les prochaines semaines.
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