Bruno Devauchelle : Numérique et marchandisation
Marchandisation, industrialisation, sont deux termes qui s’associent de plus en plus souvent au monde de l’éducation. C’est sous l’expression de « marché de l’éducation » que s’incarne actuellement une évolution du développement de l’informatique d’abord puis plus globalement du numérique. Un vent de libéralisme économique (start-up, fonds d’investissements et autres crowdfunding…) accompagne la vague numérique portée par les histoires légendaires de fortunes commencées dans un garage… Plus largement, smartphone au fond de nos poches, nous avons accepté, presque tous, de nous soumettre à la tentation du marché, à titre personnel, alors pourquoi pas l’école et plus généralement l’éducation…
Bruno Devauchelle : Les traces numériques des élèves
En ouvrant un vieux carton enfoui dans un placard sur lequel est inscrit le nom de la classe et l’année, on découvre parfois les traces de notre parcours scolaire. Nos anciens devoirs côtoient les photocopies données par les enseignants, les cahiers abimés des graffitis d’une année languissante, les bulletins de notes aux appréciations imagées, et le fameux livret scolaire reçu après avoir eu le graal de la scolarité, le diplôme… Pourra-t-on encore dans les années à venir effectuer ce « pèlerinage en mémoire » ? Rien n’est moins sûr au vu de la numérisation de plus en plus grande de l’espace scolaire et de ce qui s’y vit.
Bruno Devauchelle : L’intelligence, numérique, artificielle ou non, ça n’existe pas…
Le mot « intelligence » est si commun que son emploi permet tous les excès ou les approximations. Cela d’autant plus que nombre de scientifiques estiment que ce terme ne définit pas réellement une entité, que ce n’est au plus qu’une notion, un mot pratique, mais pas vraiment scientifiquement attestée. Dans le monde de l’enseignement ce mot est évidemment au coeur de l’imaginaire collectif, tant le lien entre l’enfant, le développement et l’enseignement est lié au développement principal des capacités du cerveau et un peu (mais moins) du corps. C’est d’ailleurs ce primat d’une forme d’activité du cerveau sur d’autres qui a amené Howard Gardner à développer l’expression « intelligences multiples », qui suscite tant d’adhésion dans le corps enseignant et si peu dans le monde scientifique. Car, même Howard Gardner reconnaît que le recours au terme intelligence est un raccourci qui lui permet de mieux faire passer l’interrogation qu’il pose aux systèmes d’éducation formelle, scolaires en particulier.
Bruno Devauchelle : Numérique et orientation professionnelle : Comment former les jeunes ?
Il est courant d’entendre dire qu’une personne n’a pas été embauchée parce que sa personnalité perçue au travers d’Internet avait révélé une « incompatibilité » avec le profil du poste recherché. Cet exemple est souvent utilisé pour expliquer aux élèves l’importance de gérer sa « réputation en ligne ». Une thèse récente fait le lien entre le recrutement et l’identité. Son auteur Constance Georgy pose, dès l’introduction, le décor : « …le recrutement pose au recruteur la question des qualités incertaines de ses futurs employés. Il n’est alors pas étonnant de penser qu’Internet puisse être considéré lors de ce processus en tant que source indéniablement utile pour pallier à ce déficit. » (p.11) Faut-il alors prendre au sérieux ces récits de refus d’embauche à cause de traces qu’on aurait laissé sur Internet ?
Bruno Devauchelle : Créativité, collaboration, individualisme et numérique
Depuis l’invention des Hackathons, séances de créativité informatiques, les initiatives autour de ce genre d’action se multiplient. Le monde de l’enseignement (scolaire et supérieur) n’y déroge pas : Hackathon pédagogique, Créathon (à l’initiative du laboratoire Techne et département IME de l’université de Poitiers en partenariat avec Canope), Edumix et autres initiatives se multiplient aussi bien dans le secondaire que dans le supérieur. L’innovation si souvent médiatisée serait-elle en panne qu’il faille lui ajouter des « marathons » collectifs pour essayer d’aller plus loin et passer à la créativité, l’inventivité. Le bon vieux brainstorming aurait-il du plomb dans l’aile. Ou, pour le dire autrement, peut-on être créatif seul ou faut-il être à plusieurs ? Ou encore y a-t-il des techniques particulières pour que « tout le monde » devienne créatif ?
Bruno Devauchelle : La fin de l’école avec le numérique ?
Le déclin de l’institution scolaire viendra-t-il du dehors ou du dedans ? Il semble bien que plusieurs initiatives actuelles semblent poser la première hypothèse comme probable. Multiplication des écoles et universités d’entreprises, développement de nouvelles écoles privées, soutenues ou non par des fonds privés (et autres subventions), voilà quelques éléments qui interrogent un paysage marqué en France par la domination d’un enseignement public et privé sous contrat (financé par l’Etat en grande partie). Le projet de la « grande école numérique » lancé en 2015 semble aussi indiquer un chemin nouveau qui semble avoir été initié en France par Xavier Niel et l' »Ecole 42″ et ses responsables qui considèrent le prof comme un frein et qui laissent le travail automatisé de suivi à l’ordinateur et aux pairs. De même un responsable d’une société qui « vend des MOOCs » se plaint-il de l’inadaptation du système par rapport à son modèle d’enseignement sans présence.
Sur le site du Café
|