« L’exécutif ne peut plus se contenter de déclarations d’intention : il doit entendre cette parole massive, et y répondre par des engagements clairs et chiffrés » déclare Guislaine David mardi 8 avril 2025 lors de la conférence de presse consacrée à l’inclusion, suite à une consultation menée dans le Premier degré. « Les moyens ne sont pas là, le bricolage ne peut pas durer », pour la secrétaire générale du Snuipp-FSU, exigeant « une décision politique majeure ». Face à une situation de plus en plus tendue, le syndicat appelle à une grande mobilisation et demande l’organisation d’États généraux pour refonder l’école inclusive.
60% des personnels déclarent une dégradation de leurs conditions de travail directement liée à l’inclusion sans moyen.
Le SNUipp a organisé une grande consultation nationale de 15 jours, recueillant 67 011 témoignages de professeurs des écoles et d’AESH. Le syndicat souligne que tant l’administration que le ministère demeurent sourds aux recommandations, malgré les propositions faites par la recherche, notamment Yves Reuter ou Alexandre Ployé.
Les témoignages des personnels sont accablants : 60 % d’entre eux déclarent une dégradation de leurs conditions de travail directement liée à l’inclusion sans moyens suffisants. L’inclusion est le sujet principal de préoccupation pour les enseignant.es du Premier degré.
Un signal d’alerte : 3/10 est la note moyenne des personnels attribuée à la qualité de la scolarisation actuelle des élèves en situation de handicap.
Le SNUipp-FSU souligne un signal d’alerte : la note moyenne attribuée à la qualité de la scolarisation des élèves en situation de handicap est de seulement 3 sur 10. Ce résultat va de pair avec un sentiment de ne pas (pouvoir) répondre correctement aux besoins des élèves. Ce n’est donc pas une surprise que de nombreux enseignants expriment un sentiment de mal-être et de dénuement, face à une surcharge de travail et un manque de moyens. Souffrance et violence institutionnelle sont omniprésentes. Pour Guislaine David, « l’inclusion a besoin d’une ambition nouvelle, soutenue par des actes, des engagements politiques clairs et chiffrés ». « Les moyens ne sont pas là », « le bricolage ne peut pas durer » déplore la secrétaire générale du Snuipp-FSU. Pour elle, il est urgent de prendre des décisions politiques pour un changement structurel du système.
Des propositions concrètes pour améliorer la situation
Parmi des propositions du syndicat, la plus plébiscitée par les personnels, soit 70% des personnels, est l’ouverture supplémentaire de places en établissements spécialisés. La ministre de l’Éducation nationale Nicole Belloubet a évoqué, lors de la conférence de presse de rentrée, la scolarisation de 24 000 enfants dans les écoles faute de places dans des établissements spécialisés. Une situation qui aggrave la souffrance des élèves et des personnels. La secrétaire générale du SNuipp parle du sentiment d’abandon et impuissance des personnels.
AESH : un statut et une formation à repenser
La deuxième mesure choisie concerne le statut des AESH. Plus de 65 % des personnels interrogés estiment qu’il est nécessaire de créer un véritable statut pour les AESH, ainsi que de les former adéquatement. Le problème de la stabilité des AESH est également soulevé : durant l’été, de nombreux contrats sont annulés ou non-renouvelés, ce qui contribue à un turnover important. Les enseignants réclament également un recrutement massif de personnels spécialisés, notamment pour renforcer les RASED et les ULIS, afin de répondre à la demande croissante d’accompagnement des élèves en situation de handicap. Plus de la moitié des répondants (53,5 %) souhaitent réduire les effectifs pour améliorer l’accueil des élèves. « Il faut profiter de la baisse démographique », rappelle Guislaine David, secrétaire générale du SNUipp, soulignant que la réduction des effectifs est « une nécessité pédagogique et humaine ».
L’impuissance du gouvernement face à la situation
Le syndicat pointe l’incapacité du gouvernement à faire face à la réalité du terrain, malgré les promesses. La situation des élèves en situation de handicap et des élèves à besoins particuliers est particulièrement alarmante. Guislaine David déplore également une gestion désorganisée des effectifs, ainsi que l’empilement d’acronymes et de dispositifs (PIAL, PAS) qui, loin d’améliorer la situation, contribuent à dégrader les conditions d’enseignement. Le manque de formation, la précarité des AESH et le remplacement insuffisant sont des problèmes récurrents.
Un besoin d’ambition nouvelle
Le SNUipp appelle à une « prise de conscience politique », soulignant que tout le monde s’accorde sur le constat : « la situation est intenable ». Les enseignants et l’administration doivent faire évoluer leurs pratiques, leurs attitudes et la culture scolaire. L’inclusion bouleverse la culture enseignante : travailler ensemble dans une classe, avec des AESH et divers personnels spécialisés, demande une réorganisation profonde de l’école, notamment par le biais de formations adaptées.
L’avenir de l’Ecole inclusive est celle de l’Ecole tout court, une école qui ne peut et ne doit être qu’inclusive, plus fraternelle, égalitaire et solidaire à tous les étages, des salles de classes aux salles de professeur.es.
Djéhanne Gani
Dans le Café pédagogique :
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