Comment surmonter la perte de l’être aimé (e) dans un couple qui s’est construit à travers l’amour de l’enfant de la disparue et le partage d’un travail imaginé ensemble ? La douleur est-elle différente s’il s’agit de l’union de deux femmes et que le fils, prénommé Léon ici, est le fruit d’une rencontre avec un homme, laquelle a eu lieu avant le choix d’une union homosexuelle ? Pour questionner l’émergence de nouvelles formes de parentalité dans leur pays, l’Argentine, deux jeunes cinéastes, Andi Nachon et Papu Currotto, s’associent pour la première fois et nous proposent « Léon », une fiction pleine de charme, toute en nuances, pétrie de tendresse et d’humanité.
Julie maintenant seule avec Léon, l’enfant de son amoureuse
Julie vient de perdre sa compagne, Baarby. Le beau visage anguleux, cheveux courts et bruns, laisse percevoir une détresse rentrée. Des cadres larges et prolongés nous la montrent dans un intérieur aux teintes chaudes, colorées et aux décorations soignées, à l’image du cocon que les jeunes femmes s’étaient aménagé pour y vivre avec Léon, jeune garçon à la tête d’ange et aux boucles noires. Julie tente, par la mécanique des gestes du quotidien, de tenir son chagrin à distance et de poursuivre l’activité du restaurant fondée avec sa partenaire.
L’essentiel réside dans le lien fort d’affection qui la lie à Léon, le fils de Barby.
Mais que va devenir ce sentiment réciproque, forgé au fil du développement du couple féminin qui aujourd’hui n’est plus ?
Surtout lorsque cette relation unique est fragilisée par le retour inopiné d’un père longtemps absent ?
LEON, fiction dramatique, délicate et subtile, n’apporte pas de réponses tranchées au diapason de ce moment de basculement d’une existence en perte de cadre affectif et amoureux. Mais Andi Nachon, la réalisatrice, également documentariste, scénariste, poétesse et professeure, et Papu Curotto le réalisateur, formé au théâtre, à la danse et à l’image, filment avec une simplicité et une grâce sans ostentation le dépassement du deuil dans une famille recomposée, l’immense détresse d’une mère aimante pour un enfant qu’elle n’a pas conçu et dont le devenir lui importe plus que tout.
Une fiction au plus près du coeur battant des êtres sensibles, empreinte d’une violence ‘douce’ et discrète, celle des émotions intimes et secrètes, et de leur caractère universel dans le cadre des nouvelles formes de parentalité.
« Léon » transcende ainsi les faux problèmes liés au genre pour figurer la place primordiale de l’amour dans l’épanouissement d’un enfant.
Samra Bonvoisin
« Léon », film de Andi Nachon & Papu Curotto-sortie le 26 juin 2024