Yannick Trigance revient sur les annonces de coupe budgétaire pour l’Éducation nationale. Pour le responsable politique, outre l’impact sur le fonctionnement de l’École de la République, « aujourd’hui abandonnée, maltraitée, méprisée » et qui « mérite mieux, bien mieux », cette annonce discrédite, une fois de plus, la parole politique.
En quittant la rue de Grenelle pour s’installer à Matignon comme Premier Ministre, Gabriel Attal proclamait « emmener la cause de l’école avec lui », annonçant notamment la création de 2137 postes d’enseignants par rapport au budget 2024 pour mettre en place ses réformes dont les fameux « groupes de niveaux » par ailleurs rejetés par l’ensemble de la communauté éducative.
Le décret publié le 22 février aura eu raison de ces belles promesses tout en traduisant d’abord et avant tout une réalité politique criante et cruelle : l’École de la République est définitivement rangée au rang des accessoires, les enseignants et les élèves sacrifiés sur l’autel de Bercy qui annule la bagatelle de 692 millions d’euros du budget de l’Éducation nationale (dont 69 % concernent les dépenses de personnels ) dans le cadre des 10 milliards d’économies annoncées sur les dépenses de l’Etat.
Le discrédit de la parole politique est terrible : après avoir martelé pendant des mois au plus haut niveau de l’État que l’École était au cœur des priorités gouvernementales, le budget de l’Éducation nationale est l’une des premières victimes – avec le logement, le handicap, l’enseignement supérieur ou encore l’écologie – de la politique d’austérité annoncée par le Ministre de l’économie et des finances qui vise d’abord et avant tout le secteur des dépenses de l’État, donc ceux de la solidarité et de la lutte contre les inégalités .
Face à cette nouvelle régression, la Ministre de l’Éducation nationale a bien tenté de contenir la colère de la communauté éducative en expliquant que ces annulations de crédits portaient “sur des crédits mis de côté, mis en réserve, que nous utilisons en cours d’année, si nous devons faire face à des chocs particuliers ou exceptionnels”.
Mais des crédits mis de côté pour quelle utilisation au moment où les collèges et les lycées découvrent pour un très grand nombre d’entre eux des dotations de fonctionnement qui n’augmentent pas et que les groupes de niveaux doivent être mis en place ?
Alors que la France présente les effectifs de classes parmi les plus chargés d’Europe, que nos enseignants ne sont toujours pas rémunérés à la hauteur de leurs missions, que le nombre de candidats aux concours ne progresse pas , que des milliers d’élèves sont privés d’heures de cours faute de remplaçants , que la formation initiale et continue reste indigente, que l’école inclusive reste à l’état d’incantation tant les conditions d’encadrement et d’accueil sont au-delà de l’inacceptable , que la baisse démographique aurait dû amener les dirigeants actuels à améliorer le taux d’encadrement dans les écoles, ce gouvernement préfère dilapider l’argent public dans l’achat d’uniformes totalement inutiles, poursuivant dans le même temps la mise en place d’une école ultra-libérale sur fond de séparatisme, de compétitivité et d’entre-soi au détriment d’une école de tous pour tous, d’une école qui ne laisserait personne au bord du chemin , d’une école de l’émancipation , de la fraternité et qui serait dotée des moyens à la hauteur de ses missions.
Cette École de la République aujourd’hui abandonnée, maltraitée, méprisée, cette école mérite mieux, bien mieux.
Yannick Trigance
Conseiller régional Île de France