De la conférence de presse de mardi 16 janvier, on retiendra un Emmanuel Macron nostalgique. Nostalgique d’’une époque révolue. Nostalgique d’une époque où l’ordre et l’autorité régnaient. Uniforme scolaire, Service National Universel généralisé, doublement des heures d’instruction civique (oui, oui d’instruction civique et non d’Enseignement Moral et Civique), Marseillaise, cours de théâtre et d’histoire de l’art étaient les principaux éléments de communication sur lesquels s’appuyait le Président. Pourtant aucune de ces questions n’apparait dans le programme d’Emmanuel Macron candidat. Néanmoins, elles apparaissent bien dans un programme…
Depuis 2017, et Blanquer au ministère de l’Éducation nationale, les mots d’ordre pour l’éducation nationale sont : fondamentaux et autorité. Et depuis quelques mois, avec l’arrivée de Gabriel Attal à la rue de Grenelle, les annonces sur ces thématiques se multiplient. Des thématiques qui, si elles semblent chères au gouvernement, ressemblent à s’y méprendre au programme du Rassemblement National. Le programme, compilé dans un document de 16 pages, est disponible en ligne. Le Café pédagogique l’a consulté.
On y découvre qu’en 2022, la candidate Marine Le Pen faisait plusieurs propositions pour « reprendre en main le contenu et les modalités des enseignements, et renforcer l’orientation précoce des élèves, pour rétablir l’excellence éducative à la française ». Le Rassemblement national au pouvoir promettait que « le détail des programmes et les labels validant les manuels scolaires relèveront du ministre de l’Éducation nationale » et que « l’enseignement dans le primaire donnera une priorité absolue au français, aux mathématiques et à l’histoire de France ». Difficile de ne pas faire le lien avec la refonte des programmes annoncée le 5 décembre dernier par Gabriel Attal, alors ministre de l’Éducation nationale, dans le cadre du « Choc des savoirs », ainsi qu’avec la labélisation des manuels, annoncée le jour même.
Quant à la refonte du collège, annoncée lors de la même conférence de presse, le locataire de la rue de Grenelle semble avoir puisé là aussi l’idée dans le programme du parti d’extrême droite. « Le collège unique est une machine à échec » y est-il indiqué. « Il ne permet pas de pallier les difficultés des élèves en décrochage et, pire encore, il entretient une dynamique dans laquelle les formations dispensées à partir du lycée ne sont pas en adéquation avec les besoins de l’économie. Pour redonner au collège une place centrale dans la réussite des élèves, le diplôme national du brevet deviendra donc un examen d’orientation post 3e : en fonction des résultats de l’élève et de ses bulletins scolaires, celui-ci sera orienté vers l’enseignement général et technologique, vers l’enseignement professionnel ou vers l’enseignement des métiers par l’apprentissage ».
Quant à l’uniforme scolaire, qui figure en bonne place dans le programme du RN et qui serait généralisé en 2026 selon Emmanuel Macron, là aussi, on a affaire à une vieille marotte de la droite et de l’extrême droite. On ne compte plus les propositions de lois présentées à l’Assemblée nationale et au Sénat pour le rendre obligatoire dans les écoles.
Du côté de la carrière des professeur·es
Du côté de la place des professeur·es, là aussi, on peut noter certaines similitudes. Blanquer avait inscrit dans la sa loi de 2019, « l’obligation de réserve ». Marine au pouvoir, aurait été plus loin. Elle prévoyait le « renforcement de l’exigence de neutralité absolue des membres du corps enseignant en matière politique, idéologique et religieuse vis-à-vis des élèves qui leur sont confiés ». Et pour être sûre d’une bonne application de ce « devoir de neutralité », rien de tel que la bonne vieille méthode de la délation. Elle assurait ainsi vouloir accroitre le « pouvoir de contrôle des corps d’inspection en la matière », et aurait rendu obligatoire le « signalement des cas problématiques sous peine de sanctions à l’encontre des encadrants ».
L’un des derniers points du programme du Rassemblement National annonçait la mise en place de la revalorisation au mérite dans le déroulement des carrières. Le président faisait part de son souhait d’aller dans ce sens mardi soir…
Une des propositions de Marine Le Pen ne semble pas avoir été retenue, celle-ci aurait pourtant fait le bonheur des enseignantes et enseignants. Pour restaurer « l’autorité du maître (Macron a lui aussi utilisé le terme « maître ») et de l’institution scolaire », le parti estimait qu’il fallait revaloriser les salaires des enseignant·es. « Afin de replacer la France dans la moyenne de l’OCDE, les salaires des enseignants du primaire au lycée seront revalorisés de 3 % par an pendant 5 ans, soit une augmentation de plus de 15 % sur le quinquennat ».
Dans le programme du parti d’extrême, d’autres idées sont développées, comme l’augmentation « significative » des heures de classe à l’école primaire – alors que la France est déjà l’une des championne européenne en la matière… Espérons que pour faire barrage à l’extrême droite, il ne faille pas non plus en passer par là…
Lilia Ben Hamouda