Mardi 14 novembre, une centaine d’enseignant·es de lycée agricole s’est rassemblée devant le bureau de la direction de l’enseignement agricole à l’appel de l’intersyndicale. Ils et elles étaient là pour signifier leur mécontentement. Le 30 août dernier, sans aucune concertation, il leur a été signifié que dans le cadre de la réforme de la voie professionnelle, ils et elles travailleront plus pour gagner autant, voire moins dans certains cas.
Au 1er septembre, la méthode de calcul du temps de service des enseignant·es en lycée agricole a été modifiée pour 30% des régions académiques. L’administration prévoit sa généralisation au 1er septembre prochain.
Il s’agit, dans le cadre du bac professionnel nouvelle formule, de diviser le volume horaire de pluridisciplinarité par le nombre de semaines à l’année et non plus par le nombre de semaines de présence des élèves dans l’établissement (en règle générale entre 27 et 29). « L’administration divise le nombre d’heures de cours en pluridisciplinarité annuel par 36 semaines – semaines de cours théoriques – au lieu des 28 réels. Cela fait fondre le volume réel d’au moins 20%. On n’est plus sur du travail effectif, mais sur du travail théorique annualisé. Ils dégagent une marge financière sur le dos des collègues » décrypte Thomas Depierre du SEA-Unsa. Par exemple, pour un professeur qui avait 1,07 heure hebdomadaire pour les cours pluridisciplinaires, le volume horaire de cette heure tombe à 0,78 heure avec le nouveau système de calcul.
« C’est l’annualisation du temps de service » dénonce Fréderic Chassagnette du Snetap-FSu. « On nous dit, en gros, que les heures de pluridisciplinarités valent moins que les autres heures, qu’une heure de cet enseignement vaudrait moins. En annualisant le temps de travail des enseignants et enseignantes sur 36 semaines, l’administration nie tout le travail sur les temps de stages ». Si cette modification concerne seulement les bacs professionnels aujourd’hui, l’intersyndicale suspecte le gouvernement de vouloir généraliser à toutes les filières agricoles ce qui signifierait une perte de 250 ETP, soit 25% de plus que toutes les suppressions du premier quinquennat. « Ce qui est sous-entendu, c’est qu’il y aurait assez de professeurs et qu’il ne serait pas utile de recruter… ».
Cette nouvelle méthode de calcul permet aussi de financer la semaine de plus de stage collectif effective dès cette année. « Cette semaine, elle ne serait pas payée par l’administration mais par les autres enseignants et enseignantes » explique Jean-Pierre Nolin de FO enseignement agricole. « C’est comme si dans une entreprise, le patron disait qu’il y avait besoin d’embaucher quelqu’un et que c’était les employés qui finançaient cette embauche ».
« Entre 2017 et 2021, 300 emplois ont été supprimé dans l’enseignement agricole, ce qui reviendrait à 10 000 postes dans l’éducation nationale » a déclaré Marie Pierre Monier, sénatrice, présente en soutien au mouvement. « C’est incompréhensible. Nous avons pourtant plus que jamais besoin d’un enseignement agricole solide pour relever le défi du renouvellement des générations d’agriculteurs et agricultrices. Sous 5 à 10 ans, 50% de la profession partira en retraite ».
1 100 enseignants sur un peu moins de 7 000 enseignants se sont vu signifier dès cette année cette méthode de calcul. L’administration, qui a reconnu l’iniquité de cette décision a décidé de faire marche arrière pour cette année mais entérine la généralisation dès septembre suivant.
L’intersyndicale demande le retour à la méthode de calcul antérieure et l’abandon de la réforme prévue à la prochaine rentrée.
Lilia Ben hamouda