Dans son dernier rapport, « L’Europe de l’éducation en chiffres 2022 », la DEPP brosse le portrait des professeurs européens. L’occasion de faire le point sur le profil, les conditions d’exercice et les salaires des enseignantes et enseignants français en comparaison avec leurs homologues des pays de l’Union Européenne.
Un métier majoritairement féminin
Dans le premier degré, les profs sont à 85,6% des femmes au sein de l’UE. Une proportion quasi identique en France avec 83,8%. Plus on s’élève dans les degrés, plus le métier se masculinise. C’est vrai en France et dans les pays voisins, avec respectivement 60,2 et 68,5% pour le collège et 59,9 et 61,5% pour le lycée.
Des motivations sociales
Les enseignants français et européens déclarent, dans des proportions quasi équivalentes, des motivations sociales à leur choix du métier d’enseignant. Pour 89%, il s’agit de pouvoir « apporter leur contribution à la société », pour 91% de « jouer un rôle dans le développement des enfants et des jeunes » et 76% ont rejoint la profession pour avoir la possibilité « d’aider les personnes socialement défavorisées ». En France, comme en Europe, la stabilité du métier et la possibilité de concilier vie personnelle et professionnelle ont aussi été des facteurs décisifs quant à leur choix de profession.
Un niveau de qualification assez homogène
Pour pouvoir prétendre aux métiers du professorat – en tant que titulaire (même si le récent concours interne exceptionnel change la donne), les enseignants français doivent avoir un Master, quel que soit le niveau d’enseignement. En République tchèque, pour enseigner en maternelle (préélémentaire), il faut être titulaire de l’équivalent du bac. Pour enseigner en élémentaire, un master sera nécessaire. L’Allemagne a des exigences de diplômes assez équivalentes aux exigences françaises – hormis pour les classes préélémentaires où le niveau exigé est une licence.
Pour l’enseignement secondaire, la majorité des pays européens exige, comme en France, un Master.
Une formation qui diffère d’un pays à l’autre
Seulement 72,9% des enseignants français ayant bénéficié d’une formation initiale depuis moins de cinq ans déclarent avoir été formés sur de la pédagogie générale. Ils sont en moyenne 83% en Europe. Ils sont moins de 80% à déclarer avoir été formés sur leur discipline d’enseignement contre 84% chez leurs homologues. Toutefois, un jeune enseignant français sur deux déclare avoir bénéficié d’un programme d’initiation formel ou informel lors de son premier emploi (stagiaire) contre 43,6% dans l’UE.
Concernant la formation continue, 92% des professeurs européens déclarent avoir participé à des activités de « développement professionnel », ils sont 83% en France. 79% les estime efficaces en Europe, contre 71% en France.
Temps de travail plus élevé que la moyenne…
Alors que les enseignants et enseignantes du premier degré en UE doivent un temps statutaire d’enseignement de 720 heures en moyenne, ce sont 900 heures que doivent accomplir les Français et Françaises. Dans le second degré, l’écart est moins flagrant, même s’il demeure important. 659 heures pour la moyenne européenne, 720 en France.
Quant au travail global, les Français sont soumis théoriquement à la durée légale de travail, soit 1607 heures. Une durée largement dépassée de l’aveu même de la DEPP qui reconnait un temps de travail hebdomadaire de 45 heures pour les profs lors d’une précédente étude. « Mais, au contraire d’autres métiers, elle n’y constitue pas le seuil à partir duquel sont calculées les heures supplémentaires ». Le travail invisible de l’enseignant n’entre donc pas en ligne de compte lorsqu’il s’agit de le payer en heures supplémentaires.
… Pour un salaire moins important
En début de carrière, pour un professeur des écoles en France, le salaire sera de 32 619 dollars US en PPA (parité de pouvoir d’achat) contre 69 599 pour un prof allemand. Au bout de 15 ans, ce sera 40 043 contre 90 970 pour l’Allemand. Et en fin de carrière, 57 885 contre 90 970. Pour un professeur du second degré, ce sera 35 709 dollars US en PPA en France, contre 77 358 en Allemagne. Au bout de 15 ans, 43 133 contre 92 566 et 61 282 contre 100 962 en fin de carrière.
En résumé, qu’il soit enseignant dans le premier degré ou dans le second, un prof français touchera moins en fin de carrière qu’un prof débutant allemand.
Pour justifier un tel écart, on entend souvent parler de temps de travail plus important de l’autre côté du Rhin. Alors, si ce constat est vrai en préélémentaire, qui n’est pas considéré comme un temps scolaire à proprement parlé en Allemagne, c’est faux pour le temps de d’enseignement et de présence pour les autres niveaux. Les profs allemands doivent 691 heures dans l’établissement à l’école élémentaire et 641 dans le second degré (Cf tableau).
Et des classes plus chargées que chez leurs voisins
Du côté du nombre d’élèves par classe, le constat est là aussi douloureux pour les enseignants français. En UE, les moyennes sont de 12,2 élèves en préélémentaire, 13,6 en élémentaire, 11,8 dans l’équivalent du collège et 11,2 dans l’équivalent du lycée. En France, la moyenne est de 23,2 élèves par classe en maternelle, 18,4 en élémentaire, 14,6 au collège et 11,3 au lycée.
Les enseignants et enseignantes français le savaient, la DEPP l’a confirmé dans ce rapport. Elles et ils sont moins bien lotis que leurs homologues de l’Union Européenne.
Lilia Ben Hamouda