On savait, grâce au Baromètre Unsa, que les enseignants n’adhèrent pas du tout aux réformes Blanquer. Un sondage Ipsos, réalisé début janvier et publié par la Fsu le 31 janvier montre les ratés du quinquennat pour les fonctionnaires et particulièrement pour les enseignants. Sans surprise, la principale déception concerne le pouvoir d’achat. Huit enseignants sur dix s’en plaignent alors que les autres fonctionnaires (tous corps) sont nettement moins nombreux à estimer que leur pouvoir d’achat s’est détérioré. C’est aussi pour leur salaire que les enseignants son prêts à suivre les syndicats. Et ce n’est pas leur seule singularité.
Trop de travail, pas assez de salaire
Révélé à l’occasion du congrès national de la Fsu, le sondage porte sur 1568 fonctionnaires interrogés dans la première quinzaine de janvier. Interrogés sur ce qui s’est amélioré ou détérioré durant les 5 dernières années, 56% des fonctionnaires citent leur pouvoir d’achat et 65% leur charge de travail. Pour les enseignants on monte à 80% dans les deux cas. On sait que le salaire des enseignants est nettement inférieur à celui des autres cadres A de la fonction publique d’Etat, les autres ministères ayant compensé le gel du point fonction publique par des primes. L’appréciation de la charge de travail reflète toutes les réformes introduites par JM Blanquer qui a revu en 5 ans les programmes de tous les niveaux scolaires et a mis en place des programmes plus lourds. S’ajoute à cela dans le 1er degré la raréfaction des équipes de soutien , comme les Rased. Et dans le 2d degré l’augmentation du nombre d’élèves du fait de la croissance démographique et des suppressions de postes.
On va retrouver la question salariale dans les attentes des enseignants. 84% attendent des syndicats des revendications sur les salaires, 39% pour le recrutement d’autres agents et 21% pour une autre formation.. Ils sont aussi 71% prêts à protester si les emplois précaires augmentent, ce qui a été particulièrement le cas dans ce quinquennat. 63% demandent des règles de transparence dans la gestion du personnel, ce qui renvoie à la loi de transformation de la fonction publique qui a supprimé les commissions paritaires.
L’attente d’une reconnaissance sociale
Le sondage montre aussi la dégradation des rapports avec la hiérarchie, 54% des enseignants se sentant moins reconnus par elle. 51% estiment aussi que leur formation s’est dégradée (contre 35% pour les autres fonctionnaires).
Enfin 72% des enseignants (contre 50% pour les autres fonctionnaires) jugent que la reconnaissance sociale dont ils bénéficient s’est dégradée. Une autre question explique ce sentiment. Pour 77% des enseignants (contre 62% des autres fonctionnaires) les discours négatifs à l’égard des questionnaires expliquent leurs difficultés avec les usagers.
La numérisation critiquée
Il y a aussi des surprises dans ce sondage. Ainsi seulement 56% des enseignants estiment que le service public s’est montré efficace durant la crise sanitaire contre 75% des autres fonctionnaires. Les enseignants sont nettement plus nombreux à mettre l’égalité et la laïcité dans les valeurs du service public.
Une autre surprise c’est le fort scepticisme sur la numérisation. Pour 54% des enseignants la dématérialisation a détérioré le service rendu aux usagers, souvenir peut-être des mois de confinement. Pour 62% cela a aggravé les conditions de travail (contre 48% des autres fonctionnaires) et pour 67% la motivation des agents (contre 59% pour les autres fonctionnaires). On mesure l’impact négatif des mois de confinement et l’analyse critique de l’enseignement à distance et de la dématérialisation des corrections de copies, des saisies répétitives etc.
Pour la Fsu, » il est urgent de rompre ce cercle vicieux de l’affaiblissement des services publics et de la dégradation de la situation faite à leurs agent-es par une politique ambitieuse ! » Le sondage donne ainsi un cap au congrès et à la direction de la FSU qui devrait être réélue.
François Jarraud