Le 28 novembre 2020, Rémi Brissiaud est mort. Rémi me laisse le souvenir vif d’un mélange magnifique et explosif de générosité, de convictions, d’intelligence, d’énergie, de courage. Tout ça pour une même personne. Même (surtout ?) dans la controverse, Rémi était incroyable.
Il va donc falloir faire sans lui. C’est triste, humainement et pour l’enseignement des mathématiques : Rémi Brissiaud a changé la didactique des mathématiques, et l’aurait encore fait évoluer. Il fait partie des figures qui l’ont rendue plus visible, plus accessible. Par sa combativité, il a changé certains de nos gestes professionnels : comment dénombrer une collection sans penser à Brissiaud (« un et encore un », et on fait ce geste qu’il a tellement répété pour nous en formation) ? Comment mieux définir un carré que comme un rectangle régulier, et éviter ainsi des obstacles considérables pour la construction mentale des enfants en géométrie ?
Encore tout récemment, Rémi a inventé les Noums. Il a construit à partir de Picbille, qui déjà avait évolué au fil du temps, pour l’actualiser, intégrer de nouveaux apports de la recherche. Il a su s’adapter en restant fidèle à lui-même, se réinventer sans se renier. Il a testé sa méthode, en allant lui-même dans les classes de CP, tous les matins, à presque 70 ans. Rémi Brissiaud a travaillé et réfléchi toute sa vie pour faire réussir les élèves. Il était mû par un projet de société, parfum mathématiques.
Je suis heureuse d’avoir eu la chance de connaître Rémi. Il m’a fait envoyer son matériel des Noums ce mois-ci. Il est sur mon bureau. Je vais le balader avec moi, partout où je le peux : à nous de prendre le relais, avec le respect et la modestie qu’il nous inspire, pour continuer de diffuser les apports de Rémi Brissiaud. Faire réfléchir la communauté des passeurs de maths à partir de ses savoirs est sans doute le meilleur hommage que nous pouvons lui rendre.
Claire Lommé