Pivot de la refondation de l’Ecole, le dispositif Plus de maîtres que de classes (PDM ) souffre, selon le très récent rapport de l’Inspection générale, de difficultés de mise en place sur le terrain. Mais est-il vraiment la solution à la réduction de l’échec scolaire dans les quartiers populaires ? Bien des études appuient ce que beaucoup d’enseignants observent : réduire la taille des classes serait plus efficace. Alors pourquoi le PDM s’impose-t-il si facilement ?
Institué par la loi d’orientation, le dispositif « Plus de maîtres que de classe » doit permettre de réduire l’échec scolaire dans les zones d’éducation prioritaire. Selon la circulaire d’application, » il s’agit de prévenir la difficulté scolaire, tout au long de la scolarité primaire, et d’y remédier si elle n’a pu être évitée. L’action sera prioritairement centrée sur l’acquisition des instruments fondamentaux de la connaissance (expression orale et écrite, mathématiques) et de la méthodologie du travail scolaire. » Et la loi d’orientation réserve 7 000 postes d’ici à 2017 pour permettre son déploiement là où c’est nécessaire.
L’échec des dispositifs équivalents à l’étranger
Pourtant plusieurs expériences faites à l’étranger n’ont pas été concluantes. Ainsi , dans le Tennessee, le projet STAR a montré que l’effet de l’assistant dans les classes était nul. Par contre la réduction du nombre d’élèves avait eu des résultats et particulièrement pour les enfants des minorités. Comme le rappelle le rapport de l’Inspection générale, « les élèves des classes à effectifs réduits conservaient le bénéfice des acquis obtenus durant les cinq années suivantes jusqu’aux premières classes de collège, y compris dans des disciplines non enseignées à l’école primaire ». Plus récemment, la Grande-Bretagne a recruté près de 200 000 assistants pour aider les enseignants dans les classes de l’éducation prioritaire. Or le constat, toujours selon le rapport de l’Inspection, est « sans équivoque » : » le système des assistants génère des effets négatifs en termes d’acquisitions scolaires ou d’amélioration de celles-ci sauf pour une tranche d’âge (13-14 ans) ».
Réduire la taille des classes est efficace
En France, en 2006, la célèbre étude de Piketty a calculé l’effet qu’aurait une réduction du nombre d’élèves sur la réussite scolaire. Ce travail est repris et développé par Mathieu Valdenaire dans sa thèse soutenue en juin 2011. La grande force de ce travail c’est de s’appuyer sur une méthode incontestable. Elle joue sur les effets de seuil qui font que de façon aléatoire certaines classes sont éclatées en deux groupes classes. A l’école primaire, aujourd’hui, l’écart entre une école prioritaire et une non prioritaire est de deux élèves, 21 élèves par classe dans l’une, 23 dans l’autre. Selon M Valdenaire « la diminution de 5 élèves des tailles de classes de ZEP conduirait dans notre hypothèse basse, à une réduction des inégalités de 37% au primaire, 13% au collège et seulement 4% au lycée ». Si l’impact est faible au lycée, il est majeur à l’école. En réduisant le nombre d’élèves, on améliore grandement la concentration de la classe et on réduit le temps perdu pour la discipline. Pisa a montré qu’il est particulièrement important en France. On donne aussi al possibilité au maître d’apporter des réponses plus variées et plus adaptées aux besoins des élèves.
En Suéde, l’étude de Peter Fredriksson, Björn Öckert et Hessel Oosterbeek basée sur le devenir de jeunes suédois âgés de 10 à 13 ans entrés à l’école entre 1967 et 1982, s’appuie, comme les travaux de Thomas Piketty, sur des effets de seuil dans les réductions de classe. Les résultats de cette étude sont particulièrement intéressants car ils permettent de voir si l’effet de la réduction de la taille des classes existe et s’il est durable ou pas. D’après les auteurs, « réduire la taille des classes est bénéfique dans les tests cognitifs et non cognitifs à l’âge de 13 ans et 16 ans… Plus important, nous trouvons que des classes plus petites augmentent la durée de l’éducation, les salaires et les revenus à 27 ans et 42 ans ». Autrement dit l’effet est durable à 16 ans, trois ans après la sortie du primaire en Suède, et bien au-delà. L’effet est permanent. Pour les auteurs, « réduire d’un élève par classe dans les 3 dernières années du primaire (de 10 à 13 ans) augmente la durée de l’éducation de 20 jours ». Cela augmente donc la probabilité d’accéder à l’enseignement supérieur.
Pourquoi le PDM s’impose ?
Malgré cela, l’administration française écarte cette solution au profit du PDM. Ce refus s’appuie sur une expérimentation menée en 2002 où la réduction du nombre d’élèves en CP en zone prioritaire n’avait pas amené d’effet positif durable. Depuis Pascal Bressoux et Laurent Lima ont pu montrer « un biais de sélection » dans l’expérimentation, les professeurs des classes témoins étant nettement plus expérimentés que ceux des classes d’éducation prioritaire. Une autre étude, lancée en 2005, joue aussi un rôle dans cette situation. Le dispositif PARE s’appuie sur un emploi supplémentaire au cycle 2 qui intervient selon un cahier des charges très précis. Les bilans annuels montrent des résultats positifs chez les élèves et aussi chez les enseignants. Mais aucune évaluation indépendante ne les a confirmé. Et d’une certaine façon, PARE montre que pour être efficace, un dispositif PDM doit s’appuyer sur une formation poussée des enseignants des classes qui en bénéficient. Or c’est quelque chose que l’Education nationale n’a pas les moyens de faire à grande échelle. Inversement chaque enseignant voit bien le profit immédiat qu’il peut tirer d’une réduction importante du nombre d’élèves.
Alors pourquoi le PDM s’impose-t-il sans difficulté ? C’est sans doute qu’il s’appuie sur un consensus de nombreux acteurs : ministère, syndicats, élus locaux. Réduire le nombre des élèves, comme l’envisage Valdenaire, poserait des problèmes de transfert de postes à l’Etat et remettrait en question le système d’affectation. Pour les municipalités cela impliquerait des constructions d’écoles justement dans les communes déjà pauvres. Inversement, le PDM semble techniquement plus facile à mettre en oeuvre, mêm si on intérêt pédagogique est incertain…
François Jarraud
Le rapport de l’inspection
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Étude suédoise
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Une année de PMQC
« Ce poste est avant tout ce que l’équipe en fait ». Professeure des écoles depuis 7 ans en éducation prioritaire, Julie décrit sur son blog le fonctionnement du Plus de maitres que de classes (PMQC). » Il faut réussir à être assez flexible pour les collègues en classe, ce qui n’est pas évident car on est quand même soumis à la « pression » de ses programmations. Mais on se dit souvent qu’il faut savoir prendre du temps pour en gagner par la suite ! Avec ce poste, les formations, on a découvert tout plein d’outils ou de pratiques qu’on a voulu essayer, mais qui ne rentraient pas forcément dans l’organisation des collègues à la base, donc il a fallu faire des choix, pas toujours faciles, car les journées ne sont pas extensibles ! »
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Plus de maîtres que de classes : Des difficultés à anticiper
Mesure phare issue d’un consensus entre le ministère et les syndicats, le dispositif « plus de maitres que de classes » devrait accaparer une bonne partie des moyens avec comme objectif de remédier à la baisse de niveau particulièrement en éducation prioritaire. Deux études de Marie Toullec-Théry, CREN, Université de Nantes et Corinne Marlot, Acté, Université Blaise Pascal pointent des difficultés et des pistes.
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Le Snuipp s’engage pour le Plus de maitres que de classes
» Il s’agit bien là d’un nouveau levier d’actions professionnelles pour aider les élèves à apprendre et à progresser. Travail en petits groupes, décloisonnement, co intervention… c’est un nouveau champ des possibles qui s’ouvre pour faire évoluer le métier. » Principale forme de soutien prévue en éducation prioritaire, le dispositif « plus de maitres que de classes » fait l’objet d’une nouvelle brochure publiée par le Snuipp.
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