La pétition qui fâche les profs de SVT
Une élève de 5ème de 12 ans, après avoir assisté à la dissection d’une tête de poisson (pour étudier le fonctionnement du système respiratoire) met en ligne une pétition relayée par les réseaux sociaux. Elle en appelle également à François Peillon «La dissection dans les collèges finance la mort d’animaux et encourage la maltraitance envers les animaux. Avons-nous besoin de massacrer des cadavres d’animaux pour apprendre? Non, c’est pourquoi je trouve cela injuste “d’apprendre” avec des animaux morts.»
Un journal reprend l’information mais c’est surtout une dépêcha AFP, relayée par de nombreux médias en ligne qui fait connaître cette histoire. D’un site à l’autre seule la photo change, de limite « gore » pour certaines à plus « soft » pour d’autres. Depuis de nombreuse années des pétitions de ce type circulent mais sans avoir le succès de celle-ci.
Dissection de tête de poisson
Que s’est-il passé ?
La collègue concernée par la pétition enseigne depuis 16 ans, elle a été très étonnée de la découvrir. Pour faire le point sur cette affaire, elle a aussitôt alerté sa direction et le Rectorat et discuté avec son élève. L’affaire est terminée à son niveau mais les nombreux médias qui ont relayé l’information continuent a alimenter la polémique ainsi que les commentaires, entre ceux qui félicitent l’élève et ceux qui l’insultent en oubliant son âge, entre ceux qui sont pour et ceux qui sont contre les dissections, sans parler de ceux qui font un amalgame entre vivisection, dissection et l’observation d’une tête de poisson provenant de la poubelle d’un poissonnier.
Le témoignage de cette enseignante
« Je suis l’enseignante de la collégienne qui a lancé sa pétition contre les dissections… je tiens à préciser qu’à aucun moment de l’année elle ne m’a fait part de son refus de disséquer, qu’elle a été libre comme tous les autres élèves de le faire ou non. J’ai comme tous pris connaissance de son action par les médias!!
Les dissections sont toujours introduites dans mes cours avec beaucoup d’explications, et aussi attendues et appréciées par la grande majorité de mes élèves. Bien-sûr le matériel que j’utilise provient de la poissonnerie (des poubelles du poissonnier…) pour les têtes de poissons, et de la charcuterie pour les cœurs de porc. Les autres élèves ne « s’amusent » pas lors des dissections… les protocoles sont précis et évalués… Brefs beaucoup d’infos véhiculées sont fausses et le plus
drôle c’est que rien n’a été vérifié par AUCUN journaliste!! Ni moi ni le collège n’avons été contacté!! Sauf par des courriers incendiaires de personnes qui n’ont rien d’autre à faire et qui n’ont pas pris la peine de lire nos programmes officiels…Voilà, nous vivons dans l’air de la désinformation… ce n’est pas nouveau mais c’est encore un bel exemple! »
Des règles strictes encadrent les dissections.
Celle histoire aurait pu arriver à la plus parts des enseignants de SVT qui font réaliser ces « petites dissections » à leurs élèves, comme le recommandent les instructions officielles.
Un document « Risque et sécurité en SVT » de l’Observatoire national de la Sécurité des établissements scolaires et de l’enseignement supérieure précise : L’utilisation d’animaux dans les classes, l’observation dans le milieu de vie, l’observation en élevage, l’expérimentation, la dissection d’organes ou d’animaux morts permettent de confronter les élèves à la complexité du vivant, et se justifient par trois objectifs éducatifs essentiels :
– la motivation des élèves par le réel afin de développer durablement le goût pour les sciences de la vie ;
– l’apprentissage de valeurs fondamentales, notamment le respect de la vie animale ;
– la protection de l’environnement(diminution des prélèvements, absence de rejet d’espèces allochtones).
Dans le même document des règles strictes encadrent ces dissections :
– se procurer les animaux morts et les organes dans un commerce de produits alimentaires de préférence (poissonnerie, boucherie…), ou un abattoir pour certains organes autorisés, ou auprès d’un fournisseur spécialisé (animaux et organes non formolés). Se faire remettre une attestation de vente;
– utiliser des logiciels de simulation ou des documents vidéo pour remplacer l’expérimentation sur les vertébrés ou les manipulations sur invertébrés pouvant choquer les élèves.
Dissection virtuelle de l’appareil reproducteur de souris
Les opposants aux dissections souhaitent que le numérique remplace le concret. Même si certains logiciels proposent des dissections virtuelles, ils ne doivent pas remplacer la dissection lorsque celles-ci sont possibles. Elles permettent une remédiation ou peuvent être utilisées lorsque le groupe est trop important ou qu’il n’est pas possible de réaliser ces dissections.
Le document « Risque et sécurité en SVT »
ftp://trf.education.gouv.fr/pub/edutel/syst/ons/risque_securite_SVT.pdf
Dissections virtuelles et autres animations en SVT
JP Gallerand