Amandine Terrier est enseignante à Crotenay dans le Jura dans une classe multi-niveaux de CE2-CM1-CM2. Elle a expérimenté twitter pour communiquer avec les parents lors d’un voyage scolaire à Paris. Moins contraignant qu’un blog dont la mise à jour pouvait s’avérer fastidieuse après une journée bien remplie, l’outil tweetter permettait aux enfants de raconter en quelques mots les faits marquants en utilisant le téléphone portable de leur maîtresse. Et voilà c’est ainsi que l’aventure twitter a commencé pour s’épanouir et être primée au forum de Lyon.
Depuis le début du projet, Bertrand Formet accompagne Amandine Terrier en tant qu’animateur Tice. Lorsque l’idée a germé, il a pris contact avec Laurence Juin, pionnière dans les twittclasses, pour comprendre ce qu’il fallait faire et ne pas faire, ce qui était transposable entre un usage en lycée et un usage dans l’enseignement primaire. L’idée de tweeter est née aussi de l’étonnement de voir des élèves de la classe d’Amandine utiliser déjà Facebook sans maîtriser les conditions d’une publication sûre d’images et d’informations sur les réseaux sociaux. Une éducation aux usages s’avérait nécessaire. Le voyage à Paris a constitué une opportunité d’encadrer les pratiques et d’informer enfants et parents. Tweetter a été utilisé dès la préparation du voyage. Les parents ont été formés, accompagnés pour ouvrir leur compte. Le compte de la classe a été créé, un compte collectif plutôt qu’un compte par élève pour encadrer là aussi les usages. Une charte d’utilisation a été affichée en classe. Durant le voyage, les élèves ont twitté mots et images, chacun leur tour sur le smartphone d’Amandine. Les parents ont consulté, répondu, de quoi conserver le lien et s’informer tout au long du voyage scolaire.
L’utilisation du réseau social devait s’arrêter là ; une utilisation ponctuelle pour une éducation pratique aux nouveaux médias. Mais peu après le retour à l’école, les élèves expriment leur envie de continuer, de poursuivre l’expérience. Avec leur voyage tweeté, ils ont certes communiqué avec leurs parents mais aussi noué des liens avec d’autres twittclasses, d’autres correspondants qui ont suivi leur périple en s’abonnant à leur compte. Des correspondants de Bombay, du Québec, de Belgique ont échangé, des correspondants dont l’identité numérique a été vérifiée.
Avant de repartir, Amandine et Bertrand ont souhaité se poser pour réfléchir à un usage pédagogique raisonné du réseau social. Les contacts avec d’autres enseignants utilisant twitter sont précieux. Ils se font par le biais de la balise #twittclasse. Bertrand veille sur les publications, les collecte et inventorie les expériences pédagogiques avec twitter. Il a repéré 75 twittclasses francophones en enseignement primaire, au collège et au lycée et trois en université. Les échanges entre enseignants permettent de définir les conditions d’un usage raisonné, réfléchi, où l’outil reste à la place assignée par la pédagogie.
La classe ne répond pas à tous les messages pour ne pas passer trop de temps sur le réseau social. Twitter est utilisé de façon ponctuelle pour des sorties scolaires ou pour explorer un thème en sollicitant les compétences des abonnés au compte de la classe. Un travail sur le climat a été ainsi enrichi par les interventions détaillées de Yann Juin, maire d’un village de Charente Maritime et le témoignage de Mario Asselin qui habite au Québec. Comment gère-t’-on les conséquences des chutes de neige dans le Jura, au Quebec et au bord de l’Océan, qui gère ces conséquences ? Les réponses trouvent un écho pour une exploitation en géographie ou pour la découverte des institutions. Avec Twitter, des experts bienveillants amènent leur éclairage, une richesse accessible et précieuse qui ravive la soif d’apprendre. Pour communiquer, les élèves observent un protocole d’écriture. Ils ont droit à 3 jets avant d’écrire sur Twitter, l’enseignante valide l’écrit avant publication en ligne. Le compte est géré par les élèves qui ont appris à repérer les « followers » (abonnés) indésirables à leur avatar, leur pseudonyme ou le flou de leur biographie. Ils doivent avoir un lien avec l’éducation, ne pas être lié à une marque. Des parents aussi sont devenus des adeptes de Twitter. Avant le passage du bus de la bibliothèque départementale de prêt, une bénévole de la bibliothèque interroge ses abonnés sur les livres qu’ils aimeraient emprunter.
Dans le projet d’Amandine Terrier et de Bertrand Formet, Twitter déborde de l’école pour développer de nouveaux liens sociaux entre la classe et des interlocuteurs éloignés, entre la classe, l’enseignante et les parents et même au sein de la commune. Dans un contexte rural, cette fonction de twitter n’a rien d’anodin, elle offre aux élèves des chances d’accéder à une infinité de ressources éloignées. Les potentialités du réseau social sont aussi une source de danger, en primant ce projet, les associations partenaires du forum ont récompensé un usage de Twitter raisonné par la pédagogie.
Monique Royer