Par François Jarraud
Freinet est bien vivant et il l’a montré à Paris le 17 novembre, où l’ICEM organisait le second Salon Freinet parisien. Près de 400 enseignants ont participé à une journée d’ateliers et de débats. Parmi eux de nombreux jeunes.
Ateliers au choix. Un Salon Freinet c’est d’abord des ateliers animés par les militants du mouvement, enseignants expérimentés mais surtout très divers. Puis qu’il s’agissait « d’apprendre dans une classe apaisée, créatrice et coopérative », les participants avaient le choix entre apprendre à faire des maths (dans l’apaisement), à favoriser la participation de tous, à mettre en place des pratiques artistiques ou encore à gérer les émotions dans la classe, pour ne reprendre que quelques intitulés des 17 ateliers proposés. Il y avait aussi des présentations par des élèves de leurs outils de classe. Ces 4 heures de formation permettent des échanges de pratiques, de l’intergénérationnel, parfois la découverte de la méthode Freinet.
Pourquoi une aussi forte participation ? Car des enseignants stagiaires du primaire avaient choisi d’être là. En Ile-de-France ils sont encore, jusqu’à la semaine prochaine, en formation. « Programmation, fiche de séquence, fiche de préparation, progression, B.O., programmes : on connaît cela par coeur », témoigne l’une. « Mais tout cela ne nous apprend pas comment faire face aux élèves. Ce qu’ils veulent c’est des classeurs, pas des classes ». A quelques jours de leur début dans le métier, la prise de conscience les a amené chez Freinet sur les conseils d’un formateur.
De la formation des enseignants à celle du gouvernement. C’est justement la question de la formation des enseignants qui était posée lors du débat final. Jean-Jacques Hazan, président de la Fcpe, Sylvain Grandserre, François Le Ménahèze, formateur non renouvelé, et André Ouzoulias (IUFM de Versailles), étaient censés répondre à la question un peu provocante « Faut-il former les enseignants ». Pour F Le Ménahèze, il faut surtout apprendre à se décentrer par rapport à son travail d’enseignant, à prendre une posture réflexive, à déconstruire la représentation que les enseignants e font de leur métier. Il faut aussi transmettre la culture pédagogique, lire les pédagogues pour enrichir sa réflexion. André Ouzoulias souhaite une formation qui permet l’expérience et inclut l’alternance, la distance que procure l’écrit pédagogique. « Il faut voir les attentes des parents et de la société envers les enseignants », rappelle Sylvain Grandserre. « L’enseignant doit savoir prendre en compte les avis médicaux et des psys, dialoguer avec les parents, gérer des classes hétérogènes. Alors la formation est indispensable. Mais celle qui est délivrée actuellement nous fait travailler mal ». Il met en garde contre la multiplication des injonctions bureaucratiques, par exemple à propos des évaluations. « Il ne faut pas accepter que les politiques nous fixent des objectifs tout en sciant le mât et en perçant la coque du navire ».
Comme un vent de rébellion. « La liberté pédagogique des enseignants avec les programmes actuels ça s’appelle être seul face à ses problèmes ». Pour Jean-Jacques Hazan, il est clair qu’il faut une vraie rupture par rapport à la politique éducative actuelle. « On a perdu la bataille idéologique sur l’éducabilité de tous. Mais on peut être optimiste », estime-t-il, « car on peut s’appuyer sur des exemples qui fonctionnent » comme l’école finlandaise ou danoise. Au Danemark les futurs enseignants reçoivent une formation pédagogique durant 3 ans et demi. « Il faut changer les évaluations », affirme-t-il, « dans leur contenu, leur calendrier et leur forme ». JJ Hazan a plaidé pour une école qui apprendrait l’autonomie, qui abandonnerait les devoirs du soir au primaire. « Pour que cela change il faut se préparer et construire un mouvement progressiste pour gagner l’opinion ».
Une vision à laquelle la salle était toute acquise. Le mouvement Freinet peut mettre en avant, face à l’opinion publique, les bons résultats, évalués, des écoles Freinet du Nord. Mais, dans l’immédiat, la coalition des pédagogues doit affronter le programme UMP qui prône l’autoritarisme, les mises à l’écart dès la 4ème et la fin du collège unique. Les prochains résultats de PISA, attendus début décembre, serviront-ils le renouveau de l’Ecole ou le traditionalisme ? Au Salon Freinet on souhaitait s’y préparer.
Liens :
Le programme du Salon
http://www.icem-pedagogie-freinet.org/node/9798
20eme Salon Freinet de Nantes
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2009/0[…]
Une école Freinet sous la loupe des chercheurs
http://cafepedagogique.net/communautes/Forum2009/L[…]
Sur le site du Café
|