En quoi les outils de géométrie dynamique permettent-ils de réorganiser le rapport au savoir sur les mathématiques ?
Auteure d’activités pour le logiciel 1, 2, 3, Cabri, Sophie Soury-Lavergne constate que ce type d’outil informatique, dont les premières versions remontent à plusieurs dizaines d’années, est peu utilisé dans le primaire. Alors, pour quelles raisons les choses ne sont-elles pas aussi simple que l’évolution technologique le permet ?
Pourtant, en permettant des situations de tâtonnement, de retour en arrière, de symbolisation, de mise en commun sous la conduite de l’enseignant des démarches, par des verbalisations et des traces écrites, ces logiciels promettent une usage didactique efficace…
Pourtant, leur utilisation ne va pas de soi. Dans un logiciel de géométrie dynamique, il faut d’abord pointer l’outil à utiliser (point, droite, segment, cercle…) avant de faire ce qu’on veut faire, alors que dans le monde « ordinaire », on fait l’inverse : on commence à faire avant de se demander ce qu’on fait. De la même manière, dans l’exemple d’une voiture dont on doit dessiner la roue manquante, les élèves sont tentés de commencer à dessiner le cercle avant de chercher à définir l’axe autour duquel la roue va tourner. La situation va progressivement les amener à comprendre en quoi la situation est géométrique : le centre d’un cercle correspond au milieu du segment inscrit dans son diamètre.
En jouant sur les outils disponibles, on peut aider les élèves à passer d’une procédure à l’autre, en contraignant ses manières de faire.
Passer du sensible au savoir savant
Les connaissances spatiales ne sont pas les connaissances géométriques : se mettre « au milieu » se confond-il avec se mettre « entre » ? Les connaissances spatiales sont du domaine de l’expérience de la vie sociale, alors que le passage aux connaissances géométriques est l’enjeu de l’enseignement la géométrie à l’Ecole. On passe du sensible, contrôlé par la perception et l’implicite, à la connaissance scientifique, défini par les propriétés des figures géométriques. Il faut donc ne pas confondre les deux, s’appuyer sur ce qu’ils savent déjà tout en mesurant toutes les difficultés pour passer d’un registre à l’autre. De même, une figure n’est pas un dessin. Des logiciels comme Cabri permettent de lever les difficultés de traçage pour accéder à un étage supérieur de symbolisation : on trace des rectangles à partir de droites et de points dynamiques qui permettent de penser plusieurs états du même carré. On espère qu’ils vont ainsi au concept de carré, indépendamment de telle ou telle figure. On a désormais des outils qui permettent de tourner autour d’un objet en le regardant sous toutes ses faces, voire en masquant certains morceaux pour mieux en abstraire les propriétés. On peut manipuler le solide et le patron qui sert à sa conception. On passe concrètement de la vue 2D à 3D, faire et défaire, avec des rétroactions qui aident l’élève avant la validation, qui l’aident à trouver des stratégies différentes lorsque la première n’est pas adaptée…
Les logiciels ne sont pas les seules outils disponibles. D’autres tâches, comme la construction de figures de grande taille dans la cour de l’école, permettent aussi de sortir du sensible pour accéder à une vision de géomètre
Des situations pour la classe :
magesi.inrp.fr