Depuis plusieurs décennies, dans la lignée des travaux de Bernard Rey, l’équipe bruxelloise travaille sur la genèse de la notion de compétence.Depuis quelques siècles, les systèmes éducatifs ont cherché à regrouper en classes homogènes des élèves afin d’enseigner simultanément à l’ensemble de la classe, selon une progression unique, avec des dispositifs spécifiques pour ceux qui ne suivent pas (redoublement, filières). Depuis le début du XXe siècle, la « pédagogie par objectifs » (ou pédagogie de maîtrise) se donne pour objectif de découper aussi finement que possible la matière enseignée, en évaluant aussi régulièrement que possible les micro-éléments à apprendre. « On a parcellisé les savoirs pour faire apprendre des procédures, en risquant de mettre à distance la complexité des savoirs ».
Les compétences sont-elles le moyen de remédier à cette éclatement ? Dans les pays francophones, la notion de compétence fait référence à des tâches effectuées en contexte complexes, en mobilisant les acquis à bon escient, dans des situations inédites. Ils ont donc différencié trois niveaux de compétences différentes. S. Kahn prend trois exemples :
– 12-7 : c’est une procédure
– Victor à 7 euro, il veut acheter un jouet qui vaut 12 euro : c’est une compétence avec mobilisation
– Une intitutrice veut acheter 9 exemplaires d’un livre qui coute 12 euro. Le marchand lui fait une réduction d’un euro si elle en prend 10. A-t-elle intérêt à accepter la proposition du marchand ? Dans ce cas, il n’y a pas qu’une réponse, et montrer sa compétence revient à choisir selon plusieurs critères, et à argumenter sur ses choix.
Comment faire acquérir ses compétences à être efficace en situation complexe ?
– enseigner les procédures et nécessaire, mais pas suffisant pour accéder à la maîtrise des situations complexes.
– les élèves n’identifient pas forcément les « familles de situations » dont fait partie le problème à résoudre. Derrière le triangle rectangle, beaucoup d’élèves n’identifient pas Pythagore…
Il semble que ce qui soit décisif soit la nature du cadrage donné aux élèves face à la tâche : de nombreux élèves se comportent face à la tâche comme s’ils feraient dans la vie, n’ayant pas compris ce qu’ils font en classe : à des élèves devant faire un problème dans lequel on leur demande combien de pots de peinture seront nécessaires pour repeindre une pièce aux dimensions données, certains répondent simplement qu’ils achéteront d’abord un pot avant de retourner au supermarché s’ils n’en n’ont pas assez… Ils montrent qu’ils n’ont pas compris la spécificité du travail scolaire et de ce qu’il réclame.
C’est pourquoi son équipe a imaginé des évaluations en trois phases :
– la première permet d’évaluer la compétence à faire le problème complexe
– la seconde découpe le problème en sous-ensemble structurés
– la phase trois évalue les procédures de base nécessaires pour réaliser le problème.