Par Laurent Piau
Afin de nous placer le plus possible dans l’actualité, nous allons étudier ce mois ci deux sujets : d’une part, l’indemnité de départ volontaire qu’une récente circulaire du Ministre va enfin permettre de mettre en place dans les académies et d’autre part, les commissions administratives paritaires dont le principe et le fonctionnement sont, actuellement, un peu mis à mal par l’administration.
L’indemnité de départ volontaire
L’indemnité de départ volontaire a été instituée par le décret n°2008-368 du 17 avril 2008 et son application est prévue par la circulaire n°2009-067 du 19 mai 2009.
Ce décret dispose qu’une indemnité de départ volontaire, exclusive de toute autre indemnité de même nature, peut être attribuée :
- Aux fonctionnaires qui quittent définitivement la fonction publique de l’Etat à la suite d’une démission régulièrement acceptée
- Aux agents non titulaires de droit public recrutés pour une durée indéterminée qui démissionnent dans les conditions fixées par l’article 48 du décret du 17 janvier 1986 (Préavis de 8 jours pour les agents qui ont moins de 6 mois de services, un mois pour ceux qui ont entre 6 mois et 2 ans de services, 2 mois pour ceux qui ont au moins 2 ans de services, 15 jours avant le terme d’un congé maternité ou d’adoption).
Cette indemnité peut être versée :
- A l’agent dont le service est restructuré par un arrêté du ministre intéressé qui précise les services, corps, grades, emplois ou assimilés concernés par cette restructuration ainsi que la période durant laquelle l’indemnité peut être allouée.
- A l’agent qui quitte définitivement la fonction publique de l’Etat pour créer ou reprendre une entreprise au sens du code du travail (activité économique, industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, soit à titre individuel, soit sous la forme d’une société, à condition d’en exercer effectivement le contrôle, ou entreprendre l’exercice d’une autre profession non salariée). Vous noterez que dans ce cas, l’agent dispose d’un délai de six mois pour communiquer aux services de l’Etat le K bis attestant de l’existence juridique de l’entreprise qu’il crée ou reprend et qu’il devra transmettre, à l’issue du premier exercice, les pièces justificatives permettant de vérifier la réalité de l’activité de l’entreprise. Dans ce cas, l’indemnité de départ volontaire est versée, pour la moitié de son montant, lors de la communication du K bis précité, et, pour l’autre moitié, après la vérification de la réalité de l’activité de l’entreprise mentionnée à l’alinéa précédent.
- A l’agent qui souhaite quitter l’administration pour mener à bien un projet personnel dès lors que sa demande de démission a été acceptée par l’administration. Mais attention, cette dernière doit apprécier l’attribution à l’agent de cette indemnité compte tenu du respect du principe de continuité et de la situation des effectifs du service. Voilà une formule qui va ouvrir la voie à des interprétations variables selon les services et les ministères.
Le montant de l’indemnité de départ volontaire ne peut excéder une somme équivalente à vingt-quatre fois un douzième de la rémunération brute annuelle perçue par l’agent au cours de l’année civile précédant celle du dépôt de sa demande de démission et le montant peut être modulé à raison de l’ancienneté de l’agent dans l’administration.
La circulaire du Ministre de l’Education Nationale fixe ainsi les fourchettes suivantes :
Ancienneté |
Montant minimum de l’I.D.V. |
Montant maximum de l’I.D.V. |
– de 10 ans |
0 mois |
12 mois |
Entre 10 et 25 ans |
12 mois |
24 mois |
Plus de 25 ans |
7.2 mois |
19.2 mois |
Cette circulaire précise que les agents de corps, de grade et d’ancienneté équivalents, dont le motif du départ volontaire est identique, doivent percevoir des montants similaires.
Elle recommande aussi que les agents qui disposent d’un plafond d’I.D.V. supérieur en raison de la perception de majorations de traitement outre-mer ou de l’indemnité de résidence à l’étranger ne touchent pas une indemnité de départ volontaire substantiellement différente de celle attribué à un agent d’ancienneté comparable en fonction en métropole.
Enfin, cette circulaire précise que le montant de l’I.D.V. doit être fixé dans la partie haute des fourchettes figurant dans le tableau ci-dessus dans le cas où la demande d’Indemnité est présentée dans le cadre d’une création ou d’une reprise d’entreprise.
Dans tous les cas, l’ancienneté de service à prendre en compte est la durée de l’ensemble des services effectivement accomplis en qualité de fonctionnaire de l’État ou d’agent non titulaire de droit public de l’État.
La procédure pour obtenir l’indemnité de départ volontaire est la suivante :
- Préalablement à votre demande de démission, vous adresserez, par la voie hiérarchique, à l’autorité compétente, une demande d’attribution de l’I.D.V. précisant la situation dans laquelle vous faites votre demande (restructuration, création ou reprise d’entreprise, projet personnel).
- Puis, vous serez informé par écrit de la suite qui pourra être donnée à votre demande et du montant de l’I.D.V. qui vous sera attribuée si votre démission est acceptée.
- Enfin, vous présenterez, par lettre recommandée avec accusé de réception ainsi que par la voie hiérarchique, votre démission à l’administration qui aura quatre mois pour vous répondre.
Terminons en relevant quelques restrictions au dispositif :
- Quel que soit le motif de sa démission, l’agent ne peut bénéficier de l’indemnité s’il est à cinq ans ou moins de l’âge d’ouverture de son droit à pension.
- L’agent qui a signé un engagement à servir l’Etat à l’issue d’une période de formation doit avoir accompli la totalité de la durée de service prévue par cet engagement.
- L’agent qui, dans les cinq années consécutives à sa démission, est recruté en tant qu’agent titulaire ou non titulaire pour occuper un emploi de la fonction publique de l’Etat ou de la fonction publique territoriale ou de leurs établissements publics respectifs ou un emploi de la fonction publique hospitalière, est tenu de rembourser à l’Etat les sommes perçues au titre de l’indemnité de départ volontaire.
- L’indemnité de départ volontaire est exclusive de toute autre indemnité de même nature.
Les commissions administratives paritaires
Les Commission paritaires sont régies par le décret n°82-451 du 28 mai 1982 relatif aux commissions administratives paritaires
La règle est que dans toutes les administrations de l’Etat et dans tous les établissements publics de l’Etat occupant du personnel fonctionnaire, il est institué des commissions administratives paritaires (ci après CAP). Ainsi, une CAP est généralement créée pour chaque corps de fonctionnaires mais elle peut être commune à plusieurs corps de fonctionnaires.
Toute commission administrative paritaire intéressant les enseignants est placée auprès du Ministre (CAPN), du Recteur (CAPA) ou de l’inspecteur d’académie (CAPD).
1°) La désignation des représentants
Les commissions administratives paritaires comprennent en nombre égal des représentants de l’administration et des représentants du personnel. Elles ont des membres titulaires et un nombre égal de membres suppléants.
Le nombre des représentants du personnel est défini comme suit :
Fonctionnaires d’un même grade |
Représentants du personnel |
1<nombre<20 |
1 titulaire + 1 suppléant |
20<nombre<1000 |
2 titulaires + 2 suppléants |
1000<nombre<5000 |
3 titulaires + 3 suppléants |
nombre<5000 |
4 titulaires + 4 suppléants |
Ils sont élus au bulletin secret à la proportionnelle pour une période de trois années lors d’élections aux commissions administratives paritaires qui ont lieu quatre mois au plus et deux mois au moins avant la date d’expiration du mandat de la Commission en exercice (sauf cas de renouvellement anticipé d’une commission).
Sont éligibles au titre d’une commission administrative déterminée les fonctionnaires remplissant les conditions requises pour être inscrits sur la liste électorale de cette commission.
Sont électeurs, au titre d’une commission administrative déterminée, les fonctionnaires en position d’activité ou en position de congé parental appartenant au corps représenté par cette commission. Les fonctionnaires en position de détachement sont électeurs à la fois dans leurs corps d’origine et dans le corps où ils sont détachés.
La désignation des membres titulaires est effectuée en fonction des résultats de chaque liste de candidats et c’est la liste ayant droit au plus grand nombre de sièges qui choisit les sièges de titulaires qu’elle souhaite.
Quant aux représentants de l’administration, titulaires et suppléants, ils sont choisis parmi les fonctionnaires de l’administration intéressée.
2°) Les attributions des commissions paritaires
Les CAP connaissent des propositions de titularisation ou de refus de titularisation, du détachement, de la disponibilité, de la notation, de l’avancement, de la mutation, de la discipline, du licenciement pour insuffisance professionnelle et, enfin, de ce qui touche à la radiation des cadres et à la perte de la qualité de fonctionnaire.
Elles peuvent aussi être saisies, à la demande du fonctionnaire intéressé, des décisions refusant l’autorisation d’accomplir un service à temps partiel, des litiges d’ordre individuel relatifs aux conditions d’exercice du temps partiel et des décisions refusant des autorisations d’absence pour suivre une action de préparation à un concours administratif ou une action de formation continue.
Elles peuvent enfin être saisies de toutes questions d’ordre individuel concernant le personnel par leur président ou sur demande écrite signée par la moitié au moins des représentants du personnel.
3°) Leur fonctionnement
Les commissions administratives paritaires sont présidées par le directeur général, le directeur ou le chef de service auprès duquel elles sont placées.
Un procès-verbal est établi après chaque séance. Il est signé par le président et contresigné par le secrétaire et le secrétaire adjoint et transmis, dans le délai d’un mois, aux membres de la commission. Ce procès-verbal est soumis à l’approbation des membres de la commission lors de la séance suivante.
Les CAP se réunissent au moins deux fois par an, sur convocation de leur président, à son initiative ou, dans le délai maximum de deux mois, sur demande écrite de la moitié au moins des représentants titulaires du personnel.
Le président de la commission peut convoquer des experts à la demande de l’administration ou à la demande des représentants du personnel afin qu’ils soient entendus sur un point inscrit à l’ordre du jour mais les experts ne peuvent assister qu’à la partie des débats, à l’exclusion du vote, relative aux questions pour lesquelles leur présence a été demandée.
S’il est procédé à un vote, celui-ci a lieu à main levée ou, à la demande de l’un des membres titulaires de la commission, à bulletin secret. En cas de partage des voix l’avis est réputé avoir été donné ou la proposition formulée. Les abstentions sont admises.
Les séances des commissions administratives ne sont pas publiques et les membres des commissions administratives sont soumis à l’obligation de discrétion professionnelle en ce qui concerne tous les faits et documents dont ils ont eu connaissance en cette qualité.
Lorsque l’autorité compétente prend une décision contrairement à l’avis ou à la proposition émis par la commission, cette autorité doit informer la commission des motifs qui l’ont conduite à ne pas suivre l’avis ou la proposition.
Un dernier détail : si les membres des commissions administratives paritaires sont indemnisés de leurs frais de déplacement et de séjour, ils ne perçoivent aucune indemnité du fait de leurs fonctions dans ces commissions.
4°) Les évolutions récentes du rôle de ces Commissions
Pendant des décennies, la règle de la gestion consensuelle a prévalu entre les représentants du personnel et l’administration puisque cette dernière prenait l’avis des CAP avant de rendre sa décision. On pouvait même parler, dans certaines situations, de co-gestion de l’administration par les organisations syndicales, du moins certaines.
Or, cette année, les professeurs, qui avaient fait des demandes de mutation, ont été informés avant la tenue de ces CAP de leur affectation par le service mobilité.
Certes, ils ont été avertis que l’information n’était qu’un projet et qu’elle leur était donnée sous réserve de l’avis de la Commission administrative.
Mais quoi qu’il en soit, c’est bien une remise en cause du consensus et de l’organisation qui prévalaient jusqu’à présent.
Et c’est bien dommage parce que, si on peut s’interroger sur le bien fondé de certaines actions, ou inactions syndicales, on ne peut que louer le travail que les Commissaires Paritaires font depuis des années, travail qui consiste principalement à corriger les erreurs générées par l’informatisation croissante des services administratifs et l’utilisation rigoriste d’un barème de mutation qui, rappelons-le, n’a pas d’existence réglementaire.
Les enseignants qui font des demandes de mutation auront donc tout intérêt à prendre l’information qui leur sera donnée par les services administratifs avec la plus grande prudence puisque, d’une part, l’avis des CAP reste obligatoire avant la prise de décision, et que, d’autre part, cette information ne sera que le résultat d’un traitement informatique et non d’un travail de spécialistes dont la capacité à résoudre, dans le respect des textes, les situations humaines les plus difficiles n’est plus à démontrer.
Laurent Piau
Laurent Piau, juriste, est l’auteur de l’ouvrage Le Guide juridique des enseignants aux éditions ESF
Sur cet ouvrage :
http://cafepedagogique.net/lexpresso/Pages/2008/09/1209200[…]
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