Par François Jarraud
Alors que le rapport Descoings a éveillé peu de passions, le rapport du député Benoist Apparu sur la réforme du lycée, publié quelques jours auparavant, a ses partisans et ses adversaires. Quel peut être l’avenir de ce texte après la publication d’un document plus consensuel ? Quels éléments font sa force ? Benoist Apparu répond à nos questions.
Les projets de réforme se sont succédés ces dernières années. Il y a eu la tentative de réforme du bac. Celle du lycée, stoppée net fin 2008. Pensez-vous qu’on puisse mener à bien une réforme dans l’éducation nationale ?
Oui, bien sûr que c’est possible. Cela peut être délicat, difficile, voire compliqué. Mais ça s’est fait. L’éducation nationale a beaucoup changé. Récemment on peut citer en exemple la réforme LMD dans le supérieur. Il peut y avoir des retards mais des changements sont possibles.
Aujourd’hui, après la publication du rapport Descoings, comment voyez-vous l’avenir de votre projet pour le lycée ?
Des éléments vont sûrement aboutir à un moment ou à un autre. Je ne peux pas dire que mon rapport sera appliqué à 100%. Mais j’ai ouvert des pistes. Le gouvernement fera son marché dans les deux projets. Celui de R. Descoings semble plus facile à appliquer tout de suite. Si Xavier Darcos vise la rapidité il s’en inspirera. Mais certains éléments de mon rapport pourront être repris.
Justement il suscite à la fois des soutiens et des oppositions. Avez-vous identifié où se trouvent celles-ci ?
Je pense que le point plus difficile c’est l’objectif des 35 heures de classe par semaine que j’ai fixé comme un maximum pour les lycéens. Car le mettre en place implique une réforme des contenus disciplinaires. Et là il y a une résistance monstrueuse. C’est très difficile de faire accepter une réduction du temps d’enseignement en français, en maths… Si on veut éviter un lycée light et maintenir un fort volume de connaissances alors il faut réorganiser les champs disciplinaires. Et ça c’est une vraie révolution car les enseignants font toute leur carrière dans un seul champ disciplinaire. Je peux donc craindre pour mon projet l’opposition des associations de spécialistes. Du coté syndical, certains manifestent une opposition totale comme le Snes ou le Snalc. D’autres sont plus positifs.
Alors pourquoi en faites vous un point central de votre projet ?
Cela part de l’idée qu’aujourd’hui la plus forte inégalité au lycée est entre ceux qui disposent de l’aide de leur famille ou qui utilisent les services d’enseignement supplémentaire et ceux qui ne sont pas aidés. L’idée c’est que tout le travail scolaire qui se fait à l’intérieur du lycée est un élément d’égalité des chances.
Et puis le temps total passé au lycée est trop lourd. Aujourd’hui entre les cours et les devoirs à la maison on atteint environ 50 heures hebdomadaires. Je propose de redescendre à 35 heures au total. Il y aurait 30 heures pour le tronc commun disciplinaire et les heures d’accompagnement, et 5 heures d’études pour faire ses devoirs. Ca veut dire que les enseignants feront autre chose que faire cours.
C’est un véritable nouveau métier qui se dessine. Mais c’est possible car nous avons l’opportunité des départs massifs à la retraite et une réforme de la formation des enseignants.
Si vous vous souciez d’égalité des chances, alors pourquoi réformer le bac ? On sait que l’épreuve anonyme du bac est plus juste. Un contrôle continu renforcerait les inégalités dans les évaluations aux dépens des plus faibles.
Mais je n’ai jamais parlé de mettre du contrôle continu au bac. J’ai parlé de mettre plusieurs épreuves en contrôle en cours de formation. Rien n’empêchera les établissements de changer les correcteurs, de rendre les copies anonymes.
Mais je veux revenir sur la semaine de 35 heures. Si on la met en place, il faudra être cohérent et rallonger l’année scolaire. Aujourd’hui le mois de juin est tronqué de la moitié ou des trois quarts. Si on veut raccourcir la semaine de cours il faudra bien allonger l’année pour garder des contenus disciplinaires suffisants.
Des changements aussi importants peuvent-ils être ordonnés par en haut pour redescendre dans les établissements ?
Il y a un moment où soit on donne l’autonomie aux établissements, soit il faut que quelqu’un décide. On est dans ce cas et le système ne peut se réformer que par en haut. D’autant qu’envisager une concertation avec 300 000 profs , ce n’est guère possible… D’ailleurs on voit bien que dans les réformes récentes, comme au primaire, ça se passe bien. Les quelques oppositions ne doivent pas être généralisées.
Benoist Apparu
Entretien François Jarraud
Sur le rapport Apparu : présentation de la réforme et réactions
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Sur le rapport Descoings : présentation de la réforme et réactions
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