Par François Jarraud
« Je croyais tout savoir sur la Shoah. Je me pensais pour ainsi dire immunisée contre la violence de cette période. Mais j’avais tord. Et je m’en suis rendue compte le 26 mars 2003, à 9h30 du matin, lorsque le car a démarré et qu’il a traversé la campagne polonaise » Justine, lycéenne de TL, Lycée Edgar Quinet
L’objectif d’un voyage à Auschwitz est d’approfondir les connaissances des jeunes sur le génocide et le système concentrationnaire nazi, leur faire comprendre ce qu’un homme est capable de faire, pour qu’ils puissent réagir à temps devant « la banalité du mal ».
Aller à Auschwitz- Birkenau, permet de réfléchir sur l’universalité de la Shoah et de lutter contre le racisme. Il ne suffit pas de dire : « Plus jamais cela ». Il faut agir.
Par ces voyages les jeunes prennent conscience du système concentrationnaire et du génocide, avec les baraques, les places d’appel, les gibets, lieux d’exécution, les chambres à gaz et les fours crématoires Si on est en présence d’un témoin, des images fortes se figent dans la mémoire, déterminent une volonté de ne plus voir les choses comme avant, et de témoigner.
« Je croyais tout savoir sur la Shoah. Je me pensais pour ainsi dire immunisée contre la violence de cette période : j’avais entendu nombre de témoignages, vu beaucoup de documentaires, tels que Nuit et Brouillard, d’Alain Resnais et puis il y avait les photos aussi. Mais j’avais tord. Et je m’en suis rendue compte le 26 mars 2003, à 9h30 du matin, lorsque le car a démarré et qu’il a traversé la campagne polonaise aux alentours de Cracovie. C’était une Pologne grise, pluvieuse, morne : elle semblait parler d’elle-même. Pendant tout le trajet, j’ai eu l’affreux sentiment de traverser un espace de transition entre le monde réel (celui dans lequel je vis) et le « hors- monde » des camps de concentration nazis. » Justine, lycéenne de TL, Lycée Edgar Quinet
– Le voyage est préparé par un cours sur le nazisme, l’antisémitisme, une chronologie, la définition des camps. Un témoin peut répondre aux questions des élèves.
– Des lectures sont conseillées.
http://hg.scola.ac-paris.fr/index.php?option=com_content&task=[…]
par exemple : Le système concentrationnaire nazi de Poliakov
– La projection d’un film :
http://hg.scola.ac-paris.fr/index.php?option=com_content&task=view[…]
par exemple des extraits du procès de Nuremberg dans le film de « Nuremberg à Nuremberg » de Frédéric Rossif.
– Les élèves sont invités à constituer un dossier.
http://perso.wanadoo.fr/d-d.natanson/textes.htm
Ils peuvent faire des recherches sur internet : (voir les liens conseillés)
« Le témoignage dans les camps, pendant les voyages d’étude a lui aussi un caractère unique, irremplaçable. D’abord il faut opérer une mise au point : les professeurs ne sont pas en charge de pélerinages ni de commémorations qui sont des démarches légitimes mais à caractère associatif ou familial. Quand les professeurs participent ou organisent des voyages d’étude, ils sont là pour apprendre et pour faire comprendre, c’est à dire appréhender physiquement, concrètement les traces du système concentrationnaire, et là il n’y a que la parole des anciens internés qui puisse donner à voir, à sentir, à réfléchir sur ce qu’a été le vécu des « transports », de l’internement, du travail concentrationnaire, des appels interminables, de la violence extrême, physique et morale, faite à des hommes et des femmes retranchés du reste de l’humanité. » Marie Paule Hervieu, professeur Edgar Quinet
Le voyage accompagné d’un témoin est l’idéal. Le témoin leur explique le passage par Drancy qu’on peut visiter, le transfert en train de marchandises, la sélection, une journée au camp, les marches de la mort, le retour.
http://www.camp-de-drancy.asso.fr/
« J’étais dans un univers dont je n’avais connaissance que par le cinéma et la lecture. Une ancienne déportée, Fanny Segal, cette femme que nous avions devant nous, en chair et en os, avait vécu ou du moins essayé de vivre là, il y a un peu plus de cinquante ans. Tout avait l’air frais dans sa mémoire, y compris et de façon précise les noms et les prénoms de ses compagnes d’infortune. Elle reconnaissait le chemin, elle nous obligeait à y voir autre chose que de l’herbe et des pierres. » Emilien Hamel, Lycéen TL, Lycée Edgar Quinet
Après avoir fait la différence entre le camp d’Auschwitz, où se pratiquent les expériences médicales, et Birkenau, camp de la mort avec sa porte de l’enfer, la rampe construite en 1944 par des femmes, l’escalier menant au faux vestiaire et les chambres à gaz que les nazis ont fait sauter, et des barbelés à perte de vue. Vu du mirador de Birkenau, ce camp à perte de vue, hérissé de cheminées, montre que la barbarie nazie n’avait pas de limites. Il y avait des projets d’extension du camp.
Sur le camp d’Auschwitz
http://clioweb.free.fr/camps/quinet_mem_hist.htm
On peut passer un extrait de Shoah le témoignage de Philipp Müller sur les Sonderkommando, ou lire un témoignage :
http://perso.wanadoo.fr/d-d.natanson/sonderkommando.htm
L’immensité de Birkenau fait comprendre la déshumanisation industrielle :
http://clioweb.free.fr/camps/quinet_mem_hist.htm
Devant l’arrivée des Soviétiques, les nazis évacuent le camp et lancent les détenus sur les routes par un froid glacial, période appelée « les marches de la mort », carte à partir d’Auschwitz :
Il faut discuter avec les élèves qui ne reviennent pas indemnes de ce voyage, répondre à leurs questions en présence d’un témoin. Des photos peuvent servir de base aux échanges. Les élèves en reviennent grandis. Ils ont envie de transmettre ce qu’ils ont vu et ressentis.
On peut faire un site internet avec des photos et des réflexions des élèves, une exposition.
http://home.nordnet.fr/~fghesquier/Ausch000.htm
http://clioweb.free.fr/camps/quinet_mem_hist.htm
Impressions globales des élèves du lycée E. Quinet (Paris) :
« Ce voyage restera gravé dans notre mémoire. Nous avons visité des lieux qui symbolisent la mort. Plus jamais nous ne penserons comme avant. Nous nous battrons pour que de telles choses ne se reproduisent jamais. Merci aux déportés pour leur courage et leur désir de faire partager l’histoire, de nous avoir permis de découvrir ces lieux qui sont les symboles mondiaux de la souffrance et de la folie des hommes. »
Les élèves, revus par la suite, évoquent toujours avec émotion cette expérience intense.
La visite des lieux de mémoire est un choc qui appelle la réflexion. Voir ce qui reste des camps d’internement, de concentration et d’extermination aide à se représenter ce monde de mort. « Anus mundi ». Se rendre compte à quels points les droits de l’homme ont été bafoués à Auschwitz, c’est une leçon d’histoire et aussi d’éducation civique, de tolérance et de compréhension entre les peuples. Cela peut arriver à tous les hommes. En ces temps de judéophobie, nouvelle vague d’antisémitisme, liée au conflit au Proche Orient, il est important de montrer que le rapprochement entre les peuples est possible.
En juin 2003, 500 Arabes, juifs et chrétiens, d’Israël, de France et de Belgique, se sont retrouvés à Auschwitz, à l’initiative du curé de Nazareth, ce qui a permis de saisir la souffrance de l’autre, de mieux se comprendre, d’avoir le respect de l’autre.
http://www.lapaixmaintenant.org/article450
« Dans la haine nazie, il n’y a rien de rationnel. Nous ne pouvons pas la comprendre, mais nous devons comprendre d’où elle est issue et nous tenir sur nos gardes. Si la comprendre est impossible, la connaître est nécessaire, parce que ce qui est arrivé peut recommencer » Primo Levi
Nicole Mullier
Les voyages des lycéens d’Edgar Quinet :