Par François Jarraud
Organisé les 16 et 17 juin derniers à Nantes, le colloque « Ce que l’école fait aux individus » visait à faire un état des lieux des recherches récentes en sociologie de l’éducation et de la formation autour d’un axe directeur large : les conséquences sur les individus (les élèves mais aussi les professionnels de l’éducation au sens large, les usagers, etc.) des transformations des systèmes d’enseignement, de la forme scolaire et des relations entre l’école et les autres institutions.
Les actes sont maintenant disponibles en ligne. S’il est impossible de rendre compte de la trentaine de contributions, on peut signaler celles qui sont davantage en lien avec les préoccupations des enseignants.
Et d’abord le métier. Ainsi le travail de Frédéric Charles sur la redéfinition du statut et du métier des professeurs de l’enseignement secondaire général montre que « les enseignants seraient passés d’une conception du travail et du métier plutôt fermée et autocentrée sur la discipline à une conception ouverte etlarge de leur travail ». 72% des nouveaux enseignants se définiraient d’abord en éducateurs. « Une très forte majorité de (ces) nouveaux accédants étaient déjà disposés, du moins dans leurs réponses à notre enquête, à travailler différemment avec leurs élèves du fait d’une conception élargie de leur professionnalité. Les futurs enseignants interrogés au moment de l’enquête étaient déjà conscients que cette redéfinition statutaire pouvait passer par une implication plus forte et différente au sein de leur établissement, notamment en s’impliquant dans des études dirigées rendues obligatoires. En ce qui concerne ces dernières, ils perçoivent nettement les bénéfices qu’elles sont à même d’apporter au niveau des résultats scolaires des élèves mais aussi au niveau de la nouvelle relation pédagogique et éducative qu’elles induisent forcément avec leurs élèves. Les raisons qui poussent ces jeunes enseignants à accepter cette redéfinition statutaire sont multiples. D’abord, on trouve les effets des différents types de socialisation auxquels ils ont été soumis. Ces socialisations, dès leur entrée dans le métier, les disposent favorablement à percevoir sa dimension éducative. Ensuite, les transformations de l’environnement social et l’émergence d’une concurrence scolaire de type associatif et commerciale qui ont commencé à entamer leur monopole de la transmission des savoirs ne sont sans pas neutres dans l’émergence de cette nouvelle posture professionnelle ». Pour F. Charles, cette situation devrait conduire rapidement à une redéfinition autoritaire du statut. D’autant que le nouveau mode de recrutement devrait faire apparaître une nouvelel catégorie particulièrement malléable : les jeunes reçus au master d’enseignement mais recalés au concours.
Sur un thème proche, Gilles Monceau s’intéresse à l’intervention des parents d’élèves sur l’évolution du métier d’enseignant. Il montre que les enseignants ajustent leurs pratiques aux évolutions institutionnelles qui redéfinissent les rapports avec la société. Ils ont maintenant à produire l’engagement des parents dans l’institution scolaire et à la réguler.
D’autres articles concernent davantage les élèves. P. Rayou et S. Kakpo ont analysé les lectures hors la classe et particulièrement les interventions des parents. Ils montrent que leurs interventions « est aussi en mesure de renforcer les malentendus des enfants ». Du coup cela dévalorise certains discours de simplification des programmes pour les rendre accessibles aux parents.
Dany Hamon s’est interessé aux apprentissages internet des jeunes. » Les représentations des élèves nous révèlent l’opposition de deux mondes dans le cadre scolaire : un monde figé, fait de livres et de cahiers, d’obligations, où dominent l’ennui, la solitude, l’écrit et la dépendance à l’enseignant, et une certaine pression, une contrainte ressentie même physiquement (mal au poignet, au dos…) face à un monde en mouvement, celui d’Internet, de la découverte, de la liberté, des images, du plaisir, du partage avec d’autres, de l’expression possible, mais aussi un monde plus complexe ». Internet apparaît comme un pourvoyeur de statut. Tout cela donne à l’Ecole de nouvelles obligations pour « interfacer » le monde.
Les actes
http://www.sociologie.univ-nantes.fr/70511134/0/fiche___pageli[…]
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