Par François Jarraud
Le premier ministre a annoncé le 18 septembre un nouveau décret remplaçant celui qui avait créé Edvige. Les opposants à Edvige ont-ils gagné ? Ils se déclarent insatisfaits et manifestent le 16 octobre pour la Saint-Edvige.
Ce fichier de police tous azimuts (y compris les adolescents de 13 ans) a suscité une vague de rejet. Selon le décret publié au J.O. du 1er juillet, Edvige peut recueillir des « informations ayant trait à l’état civil et à la profession ; adresses physiques, numéros de téléphone et adresses électroniques ; signes physiques particuliers et objectifs, photographies et comportement ; titres d’identité ; immatriculation des véhicules ; informations fiscales et patrimoniales ; déplacements et antécédents judiciaires ; motif de l’enregistrement des données ; données relatives à l’environnement de la personne, notamment à celles entretenant ou ayant entretenu des relations directes et non fortuites avec elle » pour des mineurs de 13 ans. Pour les organisateurs de la pétition « non à Edvige », ce fichier « menace les libertés individuelles et publiques y compris en touchant à des garanties constitutionnelles ou celles des conventions internationales (Convention des Droits de l’Enfant par exemple) ». Le 18 septembre, le non à Edvige totalisait environ 200 000 signataires.
Selon le communiqué du premier ministre du 18 septembre, « Les données ne pourront être collectées que dans la mesure où elles concernent soit des personnes dont l’activité individuelle ou collective indique qu’elles peuvent porter atteinte à la sécurité publique ainsi que les personnes entretenant ou ayant entretenu des relations non fortuites avec elles ; soit des personnes travaillant dans des secteurs ou des domaines sensibles et faisant à ce titre l’objet d’enquêtes administratives. Le décret devra prévoir explicitement qu’aucune donnée touchant à l’orientation sexuelle ou à la santé des personnes intéressées ne peut être collectée, même à titre exceptionnel. La possibilité de collecter des informations concernant les mineurs susceptibles de porter atteinte à la sécurité publique sera maintenue afin de doter les services de police d’un outil efficace de prévention et de lutte contre les nouvelles formes de délinquance juvénile. Ces mineurs bénéficieront d’un « droit à l’oubli » puisque les informations les concernant seront effacées à leur majorité sauf si un élément nouveau justifiant leur inscription au fichier est intervenu ».
Ces restrictions ne sont pas jugées suffisantes aux yeux des opposants à Edvige.
La Défenseure des enfants « reste préoccupée par la prolifération des fichiers dans lesquels des mineurs peuvent être inscrits pour des raisons diverses : le casier judiciaire national, le STIC, le FNAEG, JUDEX, FIJAISV, ELOI et plus récemment EDVIGE. Les mineurs peuvent se retrouver ainsi inscrits dans un ou plusieurs fichiers, sans qu’eux-mêmes ou leurs parents en aient connaissance, et donc sans pouvoir exercer leurs droits à cet égard ».
La Défenseure rappelle que la Convention internationale des droits de l’enfant encadre étroitement l’inscription de jeunes dans des fichiers. « S’agissant du droit d’information, d’accès et d’opposition aux données, l’article 40 de la Convention précise que : « …tout enfant suspecté ou accusé d’infraction à la loi pénale doit avoir le droit d’être informé dans le plus court délai et directement des accusations portées contre lui ou le cas échéant par l’intermédiaire de ses parents ou représentants légaux (…). » Dans cet esprit, il n’est pas envisageable que ne soit pas prévu de droit d’accès ni de rectification à un fichier » note-elle. En conséquence, la Défenseure des enfants « s’élève contre l’inscription dans des fichiers de mineurs à des fins uniquement administratives et pour des actes reposant sur une seule éventualité ».
Pour les organisateurs de l’appel « Non à Edvige« , « plusieurs aspects importants et tout aussi dangereux demeurent dans la version 2.0. « . « Deux finalités très différentes sont toujours amalgamées : enquêtes administratives et suspicion de risques pour la sécurité publique… Les enfants sont toujours fichés, dès 13 ans, avec un « droit à l’oubli » en trompe l’oeil… Les enfants comme les adultes sont toujours fichés sur de simples suspicions, sans avoir commis aucune infraction, et sans même que ces suspicions reposent sur « le recours ou le soutien actif apporté à la violence » qu’ils manifesteraient, comme le spécifiait la formulation du décret de 1991. Des données extrêmement sensibles sont toujours collectées et traitées : origines « raciales » ou ethniques, opinions philosophiques, politiques ou religieuses et appartenance syndicale ». Le collectif appelle à se rassembler le 16 contre Edvige.
La pétition
Communiqué du 18/9
http://www.premier-ministre.gouv.fr/chantiers/securite_854/c[…]
Communiqué Défenseure des enfants
http://www.defenseurdesenfants.fr/communiquePresseAll.php#com_21