Par François Jarraud
« Il y a des craintes légitimes. Mais Big Brother n’est pas obligatoirement caché derrière chaque enquête « . Le climat de défiance et de soupçons qui règne dans la communauté éducative pourrait bien finalement se retourner contre elle. En attendant elle rend le travail des sociologues de l’éducation très difficile, au point que deux chercheurs, Stéphane Beaud et Dominique Glasman, ont lancé une pétition pour obtenir qu’on les laisse travailler.
Ce qu’ils dénoncent c’est la suppression des questions sociologiques dans les enquêtes lancées par le ministère. C’est le cas par exemple de Base Elèves où les questions sur la langue parlée à la maison a été retirée avec beaucoup d’autres. La même mésaventure est arrivée au panel de collégiens de 6èe ou à l’enquête des évaluations CM2.
« Il y a des craintes qui sont justifiées » nous déclare D. Glasman. « Je ne plaide pas pour qu’on remplisse des fichiers n’importe comment et prenne des risques avec nos libertés ». D. Glasman a approuvé le retrait de nombreuses questions du logiciel Base Elèves. « Les craintes étaient légitimes à propos des questions sur la nationalité dans la mesure où le fichier est accessible aux maires et même à la police ».
Mais certaines ne le sont pas à ses yeux. Il cite le panel d’entrée en 6ème où les questions sur la langue parlée à la maison est intéressante pour l’étude de l’échec scolaire. Ou encore la disparition des catégories socio professionnelle dans Base Elèves.
Ce qu’on risque ? « Par exemple de ne pas pouvoir connaître les effets de la suppression de la carte scolaire » nous dit D. Glasman. « On a supprimé la carte scolaire au nom de ses imperfections sociales. Mais faute de connaître les catégories socio professionnelles des parents dans chaque territoire, il sera impossible de déterminer les écoles des riches et des pauvres ». Du coup on ne pourra porter aucun jugement sur les effets ségrégatifs de la suppression de la carte scolaire.
En supprimant les questions sociales ou ethniques de ses enquêtes internes, le ministère fait disparaître la sociologie de l’Ecole , de la même façon que l’Académie des sciences morales souhaite la faire disparaître des programmes de SES. C’est le moyen le plus sûr pour faire disparaître en douce toute mixité sociale.
La pétition