Par François Jarraud
Avec l’accord de Xavier Darcos, Gabriel Cohn-Bendit appelle à la création de collèges expérimentaux. Au départ c’est juste une petite ligne dans l’agenda de X. Darcos : « le 18 septembre à 15 heures réception de Gabriel Cohn-Bendit ». L’information avait de quoi surprendre : voilà deux personnalités bien différentes : d’un coté l’homme politique de droite, plutôt raide que bonhomme, attaché à la tradition; de l’autre l’innovateur reconnu, le docteur es anarchisme, poil à gratter breveté du ministère de l’éducation nationale. Et puis Ferry avait dépensé tant d’énergie pour le bouter hors de la rue de Grenelle. Et voilà que Darcos l’y recevait. Comprenne qui peut…
Pourtant, d’après G. Cohn-Bendit, l’entretien est « chaleureux ». L’ancien pilote du Conseil national de l’innovation apporte une solution à un problème qui va se poser au ministre. Avec la disparition de la carte scolaire, certains collèges de banlieue vont perdre beaucoup d’élèves. Qu’en faire et que vont devenir ces établissements désertés par les élèves les plus aisés ?
Pour G. Cohn-Bendit, « il y a moyen de changer ces établissements, d’adapter l’école aux jeunes, de faire réussir les élèves », y compris ceux qui viennent de l’immigration, « puisque la Suède ou la Finlande y arrivent ».
G. Cohn-Bendit propose de confier ces établissements désertés à de nouvelles équipes pédagogiques, composées de profs volontaires, capables de s’investir dans un projet collectif et innovant. « Ils seront totalement autonomes et dépendront directement du seul ministre » exige-t-il. Il peut se prévaloir de la création d’une structure comparable qui fête cette année ses 25 ans : le Lycée expérimental de Saint-Nazaire. Xavier Darcos est intéressé par le projet et, au ministère, on confirme « attendre les propositions de Gabriel Cohn-Bendit ».
Car, pour que le projet voit le jour, il faut des enseignants. Gabriel Cohn-Bendit est persuadé de trouver les enseignants nécessaires. « Il y a plein d’enseignants qui ont envie que ça change mais qui n’osent pas affronter l’immobilisme des collègues. On leur propose de participer à une vraie équipe pédagogique, organisée, autonome et cohérente » et de faire enfin bouger les choses. Ils pourront garder leur poste actuel et être détachés provisoirement dans un collège expérimental. L’objectif est d’ouvrir les premiers collèges expérimentaux à la rentrée 2008 dans plusieurs régions.
G. Cohn-Bendit appelle tous les enseignants intéressés par ce projet à prendre contact avec lui. Vous pouvez le faire en nous adressant un message à l’adresse ci-dessous. Nous vous renverrons un identifiant pour participer à la communauté virtuelle des partenaires du projet. Le Café pédagogique soutient et accompagne ce projet.
Pour adhérer au projet, la communauté des collèges expérimentaux
http://cafepedagogique.studio-thil.com/communautes/Collegeexperimentaux
G. Cohn-Bendit dans le Café
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lemensuel/lesysteme/Pages/2004/tribune[…]
Découvrir le lycée expérimental de Saint-Nazaire
http://ecolesdifferentes.free.fr/art13a.htm
L’appel aux pédagogues….
Avec l’assouplissement de la carte scolaire, des collèges vont perdre des élèves, le Ministre est d’accord pour que dans ces collèges l’on cherche des solutions différentes.
J’ai assuré le Ministre de l’Education Nationale que des équipes de pédagogues seraient prêtes à s’investir dans ces collèges de banlieue à condition d’y être nommés collectivement sur un projet cohérent.
J’ai réaffirmé mon attachement au collège unique et mon opposition au collège uniforme. A l’Etat de fixer les objectifs, aux équipes pédagogiques de déterminer en toute autonomie et liberté les chemins pour y arriver.
Les enseignants titulaires qui seront nommés dans ces établissements garderont leur poste d’origine. Le Ministre doit désigner un membre de son Cabinet pour suivre le travail d’un comité chargé de la mise en place de ces équipes de volontaires.
Le Ministre m’a posé la question : « trouverez vous les enseignants volontaires, j’ai dit oui. » C’est donc un appel que je lance par l’intermédiaire du Café pédagogique à tous ceux qui sont tentés par cette aventure.
Bien des questions restent à résoudre, le Café nous servira de lieu de dialogue. Nous avons une année scolaire pour tout mettre en place, le choix des établissements, la constitution des équipes, la définition des projets… Nous pourrions envisager des rencontres avant Noël.
Pédagogues de toute tendance unissons nous !…
Gabriel Cohn-Bendit
Fondateur du Lycée expérimental de Saint-Nazaire
Initiateur du Conseil national de l’innovation
Collèges Cohn-Bendit : Le ministère soutient le projet
A l’issue d’une rencontre avec un conseiller de X. Darcos, le projet de collèges expérimentaux entame une nouvelle étape vers l’ouverture de plusieurs établissements à la rentrée 2008. Mardi 11 octobre, le comité de pilotage du projet de collèges expérimentaux a rencontré Mark Sherringham, conseiller pédagogique de Xavier Darcos. Celui-ci a confirmé que le ministre « soutient cette initiative dans le cadre d’une politique globale en faveur des zones défavorisées ».
Des questions concrètes ont été abordées lors de cette réunion. Le projet s’inscrit dans le cadre de l’article 34 de la loi Fillon qui encourage l’expérimentation pédagogique. Le comité de pilotage sera suivi par deux conseillers du ministre, Mark Sherringham et Jean David ainsi que par la Direction de l’enseignement scolaire (Dgesco).
A l’issue de la réunion, le comité de pilotage a décidé de créer une structure permanente. Il va maintenant entrer en contact avec les volontaires et les organisations éducatives.
Gabriel Cohn-Bendit réunira les volontaires franciliens le 17 octobre à 18 heures pour faire le point du projet avec eux, recueillir leurs réactions et les associer aux étapes suivantes. Le lieu précis leur sera communiqué dès qu’il sera fixé, la date est définitive. D’autres réunions seront organisées dans les autres académies. Le comité de pilotage rencontrera prochainement les mouvements pédagogiques, les syndicats enseignants et non-enseignants, les associations de parents d’élèves ainsi que les collectivités territoriales.
Lancé le 20 septembre sur le Café pédagogique par Gabriel Cohn-Bendit, le projet de création de collèges expérimentaux réunit maintenant environ 250 volontaires. Il vise à constituer des équipes pédagogiques innovantes volontaires pour enseigner autrement dans des collèges en difficulté. Le comité de pilotage du projet réunit, autour de Gabriel Cohn-Bendit, Arnold Bac (Ligue de l’enseignement), Pascal Bouchard (AEF), Jean-François Boulagnon (collège lycée Clisthène), Gérard Delbet (école Vitruve), Eric Favey (Ligue de l’enseignement), Jean-Claude Guérin, Gilbert Longhi, François Jarraud (Le Café pédagogique), Lucien Martin, Olivier Masson (Ligue de l’enseignement), Eric de Saint-Denis (Micro lycée de Melun Sénart).
Lire l’appel de Gabriel Cohn-Bendit et adhérer au projet
http://cafepedagogique.studio-thil.com/lexpresso/Pages/2007/09[…]
La communauté des collèges expérimentaux
http://cafepedagogique.studio-thil.com/communautes/Collegeexperimentaux
Les confidences de Gabriel Cohn-Bendit
A l’issue de la réunion du comité de pilotage et de la rencontre avec le conseiller du ministre,Gabriel Cohn-Bendit a bien voulu répondre aux questions du Café.
Avec la réunion d’aujourd’hui le projet a-t-il avancé ?
La première rencontre avec Darcos, en septembre, sur cette proposition d’établissements avec des équipes pédagogiques volontaires aurait pu rester strictement verbale. La réunion d’aujourd’hui l’a actée. On avance et on va mettre le projet sur pied.
On a pu constater que la réunion avait été soigneusement préparée du coté ministériel. Les services ministériels ont répondu aux questions que nous avions posées y compris avec des informations rectorales.
Maintenant la lourde machine Education nationale nous impose d’aller très vite pour qu’à la rentrée prochaine il y ait 3 ou 4 établissements. Il faut que la constitution de équipes soit lancée avant Noël et c’est un vrai problème.
La réunion a aussi permis de notre coté de clarifier le projet. Mettre partout des établissements expérimentaux serait intéressant mais dans l’immédiat on est sur un projet sur lequel on a l’accord du ministère : répondre au problème des établissements qui deviennent très difficiles. On sait qu’aucun des établissements retenus ne sera totalement vide d’enseignants. On a pas réglé la question du chef d’établissement et de ses rapports avec l’équipe. Il faut pourtant aller vite.
Quelles sont les prochaines étapes ?
D’abord il faut réunir les volontaires. Une première réunion est donc prévue en Ile-de-France le 17 octobre. Ce sera une réunion d’information mais aussi un moment pour que les gens se rencontrent et que des groupes se constituent. Il faudra par exemple que les profs franciliens soient capables de trouver parmi eux des animateurs capables d’aider à faire avancer le projet.
Il faudra discuter du projet avec eux. Des libertés pédagogiques qui sont obtenues du ministère. Et aussi des moyens. Par exemple du nombre d’élèves par classe. Quand toute une classe est en difficulté il faut un rapport très précis entre le nombre d’élèves et celui des adultes encadrant.
Il faut maintenant aller vite. On est coincé par le calendrier administratif des mutations. Nous comptons sur les volontaires pour aider le projet à avancer vers sa réalisation à la rentrée 2008.
Qui sont les volontaires des collèges expérimentaux ?
Hussard noir ? Militant envoyé à « l’établi » ? Pédagogue prêcheur ? A la veille d’une réunion importante avec le représentant du ministre, le projet de collèges expérimentaux lancé ici-même par Gabriel Cohn-Bendit enregistre son 235ème volontaire. Le groupe de pilotage du projet a bien prévu de les rencontrer tous mais, pour le moment, ils restent un peu mystérieux. Qui sont ces profs prêts à quitter le ronron douillet des salles des profs des établissements « ordinaires » pour affronter le collèges difficiles ? Qu’attendent-ils de ce projet ? Quelles conditions mettent-ils .à leur collaboration ?
A la guitare, Hervé Grau, 46 ans, prof de physique dans un lycée nantais. « Je ne crains rien de plus que la routine » nous dit-il. Mais son engagement est plus profond. » Nous ne pouvons pas laisser cette population de jeunes en échec plus longtemps » ajoute-il. « Ce serait une forme de suicide de société, et nous avons besoin de ce vivier de ressources humaines. Trop peu d’élèves du collège « ambition réussite » qui est pourtant sur notre secteur arrivent jusqu’à mon lycée. Ce n’est pas normal, quand à ceux qui y arrivent, ils sont déjà bien persuadés qu’ils ne sont pas comme les autres et cela m’est de plus en plus intolérable… ».
Laurence Chabod, prof de maths en collège à Saint-Brieuc, cherche à travailler autrement. « Je supporte de moins en moins de ne pas venir en aide aux élèves auxquels le système ne convient pas » nous confie-t-elle. « Je m’interroge sur les raisons qui transforment des enfants de sixième encore plein de l’envie d’apprendre en élèves qui subissent les cours quelques mois plus tard (alors qu’on devrait tout faire pour conserver cette envie précieuse). Je souhaite qu’on cesse de demander à tous les élèves d’avoir acquis la même chose au même moment, j’aimerais que l’esprit de compétition ne soit pas mis en avant ».
C’est des collègues comme Laurence que Sabine Massiani, une jeune prof de SVT en région parisienne, cherche. « L’immobilisme des collègues … à la fin on en a marre. » J’ai juste envie d’autres choses et de pouvoir parler pédagogie au sein d’une équipe pour rendre plus efficace l’enseignement que l’on apporte aux élèves et répondre au mieux à leurs difficultés ».
L’équipe c’est le vœu de nos trois enseignants. » Travail en équipe, sans hiérarchie (partage des rôles et des tâches sans notion de « supérieur » ou « inférieur ») » demande Laurence qui demande un travail » en équipe avec l’aide de chercheurs, pédagogues, théoriciens, philosophes ». « J’attends un changement en terme d’autonomie.. » précise Hervé. « S’il y avait deux caractéristiques indispensables à ces collèges à retenir elle seraient pour moi les suivantes : tout le monde enseigne, d’une manière ou d’une autre ! Pas de personnel non enseignant ; tous les élèves doivent être amenés à travailler avec des adultes ; donner aux élèves la responsabilité d’un certain nombre de taches traditionnellement dévolues aux adultes (d’où mon point précédent) : on demande aux élèves d’être responsables, et ils ne le sont jamais. Dans les écoles primaires, de nombreuses taches sont déléguées aux élèves, ceci disparaît au collège. C’est un grave non sens ».