Patrick Picard
Ce mardi 7 juin, les couloirs de la mythique Ecole Supérieure de l’Education nationale (ESEN), chargée de la formation initiale et continue des cadres de l’Education nationale (Inspecteurs…) bruissaient de la nouvelle du jour, à la Une de Libération : la loi Fillon filait un mauvais coton. L’annonce de Fillon, selon laquelle sa loi resterait le seul vestige du septennat Chirac légué aux générations futures, avait précipité sa chute, et l’annonce de De Robien selon laquelle il était urgent d’attendre. » Et avec tout ce gâchis, on va nous demander de savoir comment mobiliser les acteurs » s’exclamait un chercheur invité. Mais les participants au colloque chargés de passer à la loupe les » politiques locales d’éducation » n’étant pas du genre à se laisser démonter pour si peu, ils ont confronté les paroles de chercheurs (principalement sociologues) invités à décortiquer le réel. On a évidemment interrogé la décentralisation, comme nouveau mode de régulation, même s’il est inscrit dans l’histoire comme l’a montré A. Prost, mais d’une autre nature : pas seulement une répartition des compétences, mais comme facteur d’évolution de l’ajustement du système éducatif à un territoire ou des publics variés. Ont été aussi abordés les nouveaux espaces de négociation et de mise en œuvre des politiques éducatives : qui participe ? qui est absent ? quels risques de dérives technocratiques ? à quel prix peuvent-ils devenir démocratiques ? délibératifs ? permettre des confrontations sur les finalités et les valeurs de l’Ecole ? ou simplement réduits à des espaces de communication ? de justification ? avec quelles urgences et quelles activismes ? au détriment parfois de la construction de l’action ? Les procédures, les outils, les partenariats ont été examinés. Mais ces nouveaux modes de contrats ne sont-ils pas eux aussi retransformés en outils bureaucratiques, entremêlés, fragmentés, empilés jusqu’au niveau des établissements sans parvenir jusqu’au niveau de la classe ? Ce fut aussi l’occasion de prendre du recul en faisant une rapide photographie des différents systèmes à l’œuvre dans d’autres pays européens, malgré la difficulté à comprendre des systèmes sans en maîtriser toutes les évolutions historiques… Ce colloque a été l’occasion pour les chercheurs de montrer les limites du savoir acquis sur les conséquences de la décentralisation en matière de résultats des élèves, au risque de laisser prise aux purs discours idéologiques favorables ou opposés à la décentralisation. » Pourtant, expliquait en conclusion Agnès Van Zanten, cheville ouvrière du projet, ce que nous savons nous informe sur le caractère composite des avantages et inconvénients, nous montre que les résultats dépendent des modalités précises des mécanismes de décentralisation : les changements brutaux et imposés sans compromis préalable ne sont généralement pas facteurs de changement positifs. La recherche doit établir un dialogue avec les responsables du système éducatif. Il n’est pas toujours facile, tant les points de vue peuvent être distincts entre les uns et les autres. La prise de distance qui en résulte est indispensable, si difficile dans l’action quotidienne. Elle est utile aux chercheurs dans la remise en cause de leur méthodologie, permet les comparaisons entre les méthodologies. Je vous invite à poursuivre ce travail de réflexion commune pour mettre en œuvre les actions à construire sur le terrain. » Sommaire de ce dossier :
Sur le site de l’ESEN :
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