« Au début du XXI° siècle, notre culture historique ne peut plus demeurer celle de nos parents. Les enfants d’aujourd’hui sont de plain pied dans le one world pour le pire mais aussi peut-être pour le meilleur. Cela, notre éducation nationale ne l’a pas assez pris en compte. La formation des enseignants l’ignore presque entièrement. Il est indispensable d’ouvrir un débat sur ces problèmes dont dépend l’avenir de notre discipline« . Répondant aux questions du Café pédagogique, Claude Liauzu justifie ainsi la publication du Dictionnaire de la colonisation française.
Le sujet est particulièrement difficile à aborder en classe tant les enjeux de mémoire encombrent le débat historique (rappelons-nous une récente loi finalement annulée). L’ouvrage, publié par Larousse, est annoncé pour le 3 avril. Il offre près de 700 notices qui permettent de rechercher directement une information, de passer d’un thème à l’autre ou de dégager les principales étapes du passé colonial. Il aborde aussi bien la première colonisation (16ème – 18ème) et la traite des esclaves et l’impérialisme des 19ème et 20ème siècles. 220 biographies font revivre les acteurs de la colonisation. Les articles ont été rédigés de telle sorte qu’ils soient accessibles au grand public et aux élèves du secondaire.
Pour Claude Liauzu, le Dictionnaire devrait donner la possibilité au grand public d’accéder à une information sérieuse, éloignée de la repentance ou de la glorification de l’œuvre coloniale. » Opposer aux mémoires conflictuelles, particularistes, un état des connaissances, établir les faits, surtout les plus controversés, avec rigueur, fournir des repères, c’est assumer la fonction sociale de l’histoire. Il y avait un vide à combler. De manière plus ou moins marquée, cette obligation morale a été partagée par tous les auteurs. C’est vrai aussi pour les historiens étrangers, confrontés dans les pays hier colonisés à une tyrannie de la mémoire officielle, comme en Algérie ou au Vietnam. Croiser les points de vue des historiens, de part et d’autre de la barrière, mais aussi dans l’espace « mixte » constitué par la situation coloniale, est un but indissociable du premier. Il est impossible, désormais, de soliloquer sur le destin de l’Occident en ignorant les acteurs des autres sociétés et leur voix« .
Dictionnaire de la colonisation française, 2007, Larousse, Claude Liauzu (dir.), conseil scientifique : Hélène d’Almeida Topor, Pierre Brocheux, Myriam Cottias, Jean-Marc Regnault.