Maternelle
Stéphanie LESCHIERA
Henda ZINE, jeune professeur des écoles de 24 ans, a choisi pour sa première année d’enseignement de travailler en cycle 1. Elle a accepté de témoigner ici, et de nous raconter les joies et les difficultés de son premier trimestre à l’école maternelle.
S.L. : Quel a été votre parcours avant cette rentrée 2003 ?
H.Z. : Après un bac scientifique puis un DEUG MASS (Mathématiques Appliquées aux Sciences Sociales), j’ai eu une expérience professionnelle en tant que vendeuse tout en faisant de l’aide aux devoirs (primaire, collège et lycée). Puis j’ai obtenu une licence pluridisciplinaire à dominante Sciences de l’Education ce qui m’a menée directement à l’IUFM (PE1, concours à la fin de la première année puis PE2).
S.L. : A la fin de vos deux années d’IUFM, vous sentiez-vous prête à prendre une classe en main ?
H.Z. : Ma formation initiale a été globalement satisfaisante. J’ai eu de la chance car cela dépendait des groupes. L’enseignement du français occupe le plus gros volume horaire. Nous avons bénéficié de l’intervention d’une IMF (maître formateur) qui nous a apporté beaucoup de pistes concrètes ce que rechignent à faire certains professeurs de l’IUFM. Je veux dire par là que sans nous donner des fiches de préparation » prêtes à l’emploi » elle illustrait ses propos de nombreux exemples, de choses qui paraissent évidentes aux enseignants qui ont un peu plus d’expérience mais auxquelles les débutants ne pensent pas. Cela m’a simplifié la tâche.
Mais cette année de PE2 est bizarre. Les périodes de stage sont les seuls moments très actifs. Le reste du temps, les professeurs veulent nous faire réfléchir sur nos pratiques (je pense particulièrement au mémoire que l’on doit rendre en fin de deuxième année). Or, c’est une année où on a » le nez dans le guidon » et pour ma part je n’étais absolument pas mûre pour analyser ma pratique.
De plus, le cycle 1 est vraiment le parent pauvre de la formation. On passe beaucoup plus de temps sur les deux autres cycles. Je n’ai par exemple reçu aucune formation en Arts Plastiques (ni en PE1, ni en PE2, ni en stage de trois semaines » d’accompagnement de l’entrée dans le métier « ) ce qui est un comble lorsqu’on enseigne dans un cycle où on a la possibilité de laisser une grande place à la créativité.
S.L. : Avez-vous choisi d’être en maternelle pour cette première année sur le terrain ?
H.Z. : J’avais demandé uniquement des postes en maternelle mais je n’ai rien obtenu au mouvement. J’ai donc été mise à disposition de la circonscription de Pierrefitte-Villetaneuse (Seine-Saint-Denis). J’avais pas mal d’appréhension à la veille de cette rentrée car c’est une circonscription réputée difficile sur laquelle sont nommés de nombreux débutants qui ne restent pas les années suivantes. Finalement j’ai eu la chance de pouvoir choisir un poste en maternelle. J’ai une classe de 25 élèves (9 petits et 16 moyens) dans une école de 5 classes qui n’est pas classée ZEP (contrairement aux autres de la ville).
S.L. : Comment avez-vous été accueillie dans votre école ?
H.Z. : Bien. Il y a eu une ouverture de classe dans l’école et nous sommes deux nouvellement nommés. L’équipe était divisée l’an dernier et nous avons été accueillies chaleureusement dans l’espoir que ce » sang neuf » effacerait les anciens conflits. J’ai eu quelques conseils d’un ou deux collègues, mais dans l’ensemble les enseignants de l’école ne sont pas spécialement motivés pour travailler en équipe, ou ne s’entendent pas assez pour cela. C’est dommage.
S.L. : L’idée que vous vous faisiez de la maternelle était-elle en adéquation avec la réalité que vous avez vécu durant ce premier trimestre ?
H.Z. : Dans l’ensemble, oui. J’ai eu la chance d’observer de nombreuses classes de maternelle (entre les différents stages en licence et à l’IUFM, j’ai vu 5 maternelles différentes dont certaines pendant 1 mois), je savais donc à quoi m’attendre.
Notamment je savais que j’aurai beaucoup de travail de préparation (je n’avais pas cette idée préconçue qu’à la maternelle il y a moins à faire).
Par contre le fait d’avoir » ma » classe avec la responsabilité entière des enfants m’a effrayé. J’imagine que c’est une angoisse fréquente chez les débutants, celle de ne rien apprendre aux enfants… et d’avoir du coup des comptes à rendre à leurs parents ! !
S.L. :Quelles sont vos principales difficultés dans votre classe ?
H.Z. : Comme je débute, je ne suis pas forcément sûre de mes choix pédagogiques, et le fait qu’ils soient parfois différents de ceux de mes collègues de l’école est perturbant. Ma peur de ne rien apprendre à mes élèves reprend alors le dessus …et je n’ai pas la force de l’expérience pour la combattre ! !
Par exemple, pour le travail en ateliers, je n’ai pas mis de système de couleur en place comme mes collègues. L’accès aux ateliers est pour l’instant libre dans ma classe et à partir de janvier il y aura un système d’inscription par les enfants pour l’accès aux ateliers. L’organisation de mes collègues étant beaucoup plus » cadrée » j’avais l’impression d’être trop souple, trop fouillis. Lorsqu’en début d’année, je comparais ce que je proposais aux moyens de ma classe avec ce que proposait ma collègue de la classe de MS/GS je culpabilisais car mes élèves vivaient des activités de manipulation, de création alors que ma collègue faisait faire beaucoup plus de » travail écrit » sous forme de fiches à ses élèves.
Heureusement, la conseillère pédagogique qui est venue me visiter m’a aidée à affirmer mes choix en me rassurant et en m’expliquant que les apprentissages chez les jeunes enfants mettaient du temps à se construire et que nous ne devions pas » brûler » des étapes. Elle m’a aussi beaucoup aidée en apportant des réponses à mes innombrables questions ainsi que des » petits trucs » qui facilitent la vie dans la classe.
La lecture de certains sites internet comme Matern’ailes de Christine Colomer ou le site de l’école maternelle Julie Daubié des Lilas (93), m’a permis de me sentir moins seule dans les choix pédagogiques que j’avais fait et m’a encouragée à continuer dans ce sens.
Mais je suis encore bien souvent noyée dans l’organisation de mon travail : comment gérer cette masse de choses à concevoir, penser, préparer, que dois-je privilégier, comment mettre en place un vrai projet, comment et surtout quand évaluer mes élèves? Autant de questions que je me pose depuis le début de l’année et qui n’ont pour l’instant pas de réponses. Pour tenter d’y remédier, j’ai trouvé quelques pistes sur internet et je travaille avec deux collègues, T1 (titulaire première année) comme moi.
Nous avons eu aussi un stage de 3 semaines en fin de ce trimestre, appelé » stage d’accompagnement de l’entrée dans le métier « . Nous avions une grande attente par rapport à ce stage et nous avons été déçus… ce ne fut que quelques séances parachutées sans aucun lien entre elles… une perte de temps, nécessaire sans doute pour que nous libérions nos classes afin que les PE2 puissent effectuer leur stage sur le terrain.
S.L. : Souhaitez-vous continuer à travailler en maternelle ? Pourquoi ?
H.Z. : Mon stage en cycle 3 m’avait beaucoup plu mais la maternelle est vraiment mon élément et j’aimerai y continuer mon cheminement pendant quelques temps. J’aime cette liberté d’action que nous laissent encore les programmes, le temps qu’on peut se donner et offrir aux enfants pour être à l’écoute de leurs besoins même si les pressions structurelles et institutionnelles sont parfois lourdes (nombre d’enfants dans les classes, évaluations…).
J’ai choisi d’enseigner en Seine-Saint-Denis auprès de populations parfois en grande difficulté car je crois au rôle de la maternelle notamment pour contribuer à réduire les inégalités face aux savoirs…
J’apprécie aussi le contact privilégié avec les familles qui n’existe plus en élémentaire. Nous les voyons tous les jours et lorsqu’il y a problème nous sommes immédiatement en contact, ce dialogue permettant de faire avancer les choses plus vite (même s’il y a parfois des situations compliquées plus délicates que d’autres).
En résumé, au bout de ce premier trimestre sur le terrain et malgré les difficultés que j’ai rencontrées, j’ai gardé mon enthousiasme et suis persuadée que l’école maternelle joue un rôle essentiel dans la » carrière » scolaire des enfants… à nous de faire en sorte que ce soit un bon départ !
Quelques sites offrant des » pistes » pour débuter en maternelle :
http://maternailes.net/ de Christine COLOMER
http://www.ac-creteil.fr/innovalo/PNI4/jdaubie.htm le site de l’école maternelle Julie Daubié
http://crdp.ac-bordeaux.fr/cddp33/attirelire/somatirelire.htm pour travailler avec certains albums de jeunesse.
http://www.livrjeun.tm.fr/ un site d’informations sur la littérature de jeunesse
http://www.edp.ipbhost.com le forum du site » enseignants du primaire « .