Comment renforcer les liens entre l’éducation nationale et le monde économique pour favoriser l’insertion professionnelle des jeunes ? La réponse est à chercher dans un rapport auquel ont collaboré pas moins de 4 inspections générales (IGEN, IGAEN, IGF, IGAS), la Dgesco, le Secrétariat général pour la modernisation de l’action publique et la sénatrice (du Rhône) Christiane Demonthès, responsable du projet. Le résultat final tient en 40 recommandations bureaucratiques d’où émergent par exemple l’envoi des cadres du système éducatif en stage en entreprise..
Un rapport surprenant
Alors que le ministère a mis en place un Conseil Education Economie (le CNEE), c’est à la sénatrice socialiste du Rhône Christiane Demontès que le ministère a confié une vaste mission d’enquête associant 4 inspections générales pour évaluer les partenariats Education – Entreprise dans une optique d’insertion professionnelle des jeunes.
Remis le 30 octobre le rapport est assez surprenant. D’abord dans sa justification. Le rapport serait nécessaire en raison de « la situation économique difficile de la France dans le monde avec un taux de chômage des jeunes très élevé » et de » l’arrivée en Europe de nouvelles populations plutôt jeunes, posant la question de leur intégration par la formation et l’emploi ». Rien dans le solde migratoire français ne semble justifier cette dernière formule qui fleure bon l’air du temps…
Des évaluations partielles
L’autre surprise c’est l’importance du dispositif par rapport à la maigreur des évaluations. Dans le détail, les inspections ont travaillé sur 16 dispositifs pour se rendre compte que beaucoup n’étaient pas évaluables ou qu’ils ne sont pas d’accord sur l’évaluation. Ainsi la Découverte Professionnelle en 3ème est « jugée positivement » mais « un stage et plus rien, pas de suivi ». Le Parcours Avenir ne peut être évalué car c’est trop tôt. Les stages pour les enseignants sont « de qualité inégale ».
Par contre le rapport valide les formations en alternance et l’apprentissage, il juge positivement le dispositif « les boss invitent les profs », les mini entreprises (pour ses acquis en terme de « comportement et compétences relationnelles »). Les lycées des métiers s’attirent ce commentaire vachard : « interrogation sur la réalité de la prise en compte des critères »…
Un nouveau pilotage
Le rapport a visité les dispositifs existant et conclue en « l’absence d’une politique publique nationale ». Il souligne « un foisonnement d’initiatives territoriales peu coordonnées et peu pilotées, avec un grand nombre d’acteurs, une absence d’évaluation et de mesure d’impact sur l’orientation scolaire et l’insertion professionnelle des jeunes ».
Au final, le rapport estime que « la relation Ecole-monde économique doit franchir une nouvelle étape, marquée par l’élaboration et le déploiement d’une politique publique interministérielle, partenariale et territorialisée, pilotée au plus haut niveau par le ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche ; un déploiement dans les territoires académiques et régionaux qui favorise les initiatives, l’expérience acquise par les acteurs, la complémentarité et la cohérence, par la mise en réseaux ; un soutien aux acteurs (personnels de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, acteurs économiques, acteurs institutionnels, partenaires sociaux, parents) pour améliorer la connaissance mutuelle, le dialogue et la coopération dans l’action ».
La plupart des propositions tournent autour du pilotage qui serait confié à la Dgesco, une structure ministérielle qui semble déjà bien chargée. Dans ce cadre le rapport demande de « refonder les accords cadres et les conventions cadres », de « redéfinir les rôles », bref pratiquement de redémarrer à zéro.
En dessous du pilotage national, le rapport recommande de développer des Comités locaux école entreprise et de créer un nouveau dispositif « enseignants pour l’entreprise ». Ce dispositif permettrait de détacher des enseignants quelques mois en entreprise pour pour y diffuser « une information de qualité » sur l’organisation du monde éducatif et d’assurer le tutorat des stagiaires ». Est-ce à dire que les stagiaires quitteraient l’Ecole pour retrouver des profs en entreprise ? En tous cas les enseignants devraient y retrouver leurs cadres. Le rapport suggère aussi d’intégrer dans la formation des personnels de direction et des inspecteurs un stage d’une semaine en entreprise. C’est l’école alors qui va dans l’entreprise et pas l’inverse ?
François Jarraud