« On va avoir une nouvelle étape ». Interrogé de façon précise par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances de l’Assemblée nationale le 24 juin, le ministre de l’éducation nationale éveille des espoirs. Cette nouvelle étape résultera de rapports qui devraient sortir cet été et qui pourraient conduire à des décisions. Parmi elles, JM Blanquer se déclare favorable à « des objectifs quantitatifs » pour le choix des spécialités. Reste à voir comment cela serait possible. En attendant JM Blanquer fustige à nouveau l’écriture inclusive.
Une délégation très active face au ministre
Quand le ministre de l’éducation nationale est interrogé sur l’égalité filles garçons, ce qu’on retient d’abord c’est l’image du ministre au centre de l’image avec la déléguée ministérielle aux droits des femmes, Claude Roiron, en bout de table à droite. D’autant que cette nomination, qui remonterait à 2019, fut discrète : le journal officiel n’en garde pas trace.
Face au ministre les député.es membres de la délégation aux droits des femmes qui arrivent avec des données précises sur l’état de la question dans l’éducation nationale. il sera question des manuels et des programmes scolaires, des choix très genrés de filières, d’éducation sexuelle et du manque d’hommes dans les classes du premier degré, particulièrement en maternelle. Karine Lebon (GDR) rappelle par exemple que les manuels scolaires participent à la diffusion des stéréotypes de genre. C’est aggravé par les délais très courts pour réaliser les manuels (moins de 12 mois avec le renouvellement accéléré des programmes) et le fait que beaucoup de communes gardent de vieux manuels. Gaël Le Bohec (LREM) pose la question des choix de spécialités au lycée très genrée, de l’éducation sexuelle « négligée ».
Des objectifs quantitatifs pour les spécialités des lycées
Jean-Michel Blanquer a une annonce à faire. Un rapport du Groupe de travail sur l’égalité filles garçons installé dans le comité de suivi de la réforme du lycée sera publié le 9 juillet et va tout changer. « Je suis prêt à fixer des objectifs quantitatifs » pour les spécialités annonce le ministre. « Politiquement j’y suis prêt. On peut préparer des décisions prochaines pour du volontarisme en matière d’orientation.. Dans les prochains jours des actions placeront le ministère à l’avant garde de cette action. On va avoir une nouvelle étape ».
En fait les choix de spécialités sont très genrés. Une note de la Depp de novembre 2020 montre que » près de neuf élèves ayant choisi « mathématiques et SI » ou « mathématiques et NSI » sur dix sont des garçons. La doublette « mathématiques et physique » demeure largement masculine (64 %). À l’inverse, parmi les élèves ayant choisi « humanités et LLCER » et « humanités et SES » plus de huit sur dix sont des filles. Elles sont aussi surreprésentées dans les doublettes « LLCER et SES », « HGGSP et LLCER », et « HGGSP et humanités » ».
Comment créer davantage d’équilibre dans ces choix ? Le ministre a beau dire que « la réforme du lycée est un outil majeur pour rééquilibrer les parcours », la logique de la réforme, « donner la liberté aux jeunes de choisir leur spécialité », va à l’encontre de l’équilibre. Comme outils pour renforcer l’égalité, JM Blanquer cite un guide sur l’engagement lycéen où il est question de l’égalité et un conseil de la vie lycéenne annuel consacré aux violences contre les femmes. Comment passer de la liberté de choix à des objectifs quantitatifs pour chaque spécialité ? La responsabilité va t-elle retomber sur les chefs d’établissement ?
Un autre rapport attendu
JM Blanquer a peu de réponses sur l’éducation sexuelle. Officiellement il y a 3 séances par an dans chaque classe mais la réalité est très en dessous. Le ministre « travaille sur un vademecum » pour le premier degré qui sera disponible sous peu. Mais il ne peut s’empêcher d’évoquer « des embardées » dans le passé. Allusion peut-être aux ABCD de l’égalité, une tentative d’enseigner l’égalité dans le premier degré que la droite a réussi à faire échouer.
Sur la formation des enseignants, un autre point noir selon la délégation, le ministre attend un autre rapport cette fois de l’inspection générale « dans les prochains jours ». En attendant il attend de la nouvelle formation pré professionnalisante des PE qu’il met en place à coté des Inspe qu’elle rééquilibre le ration hommes femmes dans le premier degré. Mais elle comptera seulement 1000 à 2000 étudiants.
Déidéologiser la langue
JM Blanquer est beaucoup plus enflammé pour parler de l’écriture inclusive. « Je me bats contre le point médian qui est une catastrophe pour les enfants », explique t-il pour bien marquer qu’il n’a rien contre la féminisation des noms de métier. « Quand on crée de la polémique sur la langue et qu’on fait exploser la grammaire , il y a des intentions derrière cela », dit-il. Des ennemis de la République ? Il appelle à « déidéologiser » la langue.
Pour JM Blanquer, « l’égalité n’est pas un sujet que pour les filles ». Il estime « qu’il faut s’inquiéter pour les garçons dont les résultats scolaires sont inférieurs.. Les choix de spécialité se font au détriment des deux sexes ».
François Jarraud
Les inégalités hommes femmes persistent dans l’Education nationale